Marie-Claire Moschetti : une vie marquée par la déportation
Marie-Claire Moschetti, âgée aujourd’hui de 94 ans, avait 14 ans quand elle a vécu la déportation de Moulinet. Grâce à une attache à Sospel, elle put vivre au village pendant la guerre. Son mari actuel, lui, fut déplacé à la caserne de Cuneo. Aujourd’hui, ils habitent tous deux Moulinet.
Elle raconte :
« À 14 ans, nous étions déjà des adultes. Quandnousavonsdûpartirduvillage,je faisaismesdevoirs.Mononcleétaitdans le maquis, il est venu nous prévenir qu’il fallait vite s’en aller. Quand nous sommes arrivés au Col de Brouis, il y a eu des obus, desgensblessésoumorts.Nousavons rebroussé chemin pour nous établir à Sospel.Nousétions70personnes,logées dans une cave. Pour se laver, nous allions à la fontaine, sans savon, à l’eau glaciale. Nousétionsrationnés,maisparchance,les Sospellois nous portaient des vivres et nousaidaient.Maislespontsétaient coupés, comme l’approvisionnement. Les Américains nous portaient de temps en temps du pain, mais il y en avait peu et il fallait nourrir tout le monde. Vous savez, toutes ces choses, il faut les vivre pour comprendre à quel point ça marque. Encore aujourd’hui mon mari se demande pourquoi j’achète... C’est sûrement un traumatisme. »
Des épisodes marquants
« Je me souviens lorsque mon oncle a été capturé par des Allemands, ils allaient le tuer. Par chance, son chien est venu nous avertir et c’est grâce à lui que nous avons prévenulessoldatsaméricains.Jeme souviendrai toujours de ce couple d’anciens, ils avaient cultivé des oignons pour l’hiver. Les Allemands sont venus piller leurs récoltes. Le papi en a gardé quelques-uns pour subsister. Quand ils l’ont appris, ils l’ont tué, et sa femme a perdu la tête de chagrin. », livre MarieClaire, la gorge serrée.
« La désolation »
« Quand nous sommes rentrés au village, cefutladésolation.Ilyavaitdeschevaux morts,lesmaisonsavaientétépilléespar lesAllemands,leblépoussaitsurles trottoirs,toutétaitdétruit.Maisles habitants voulaient tout rebâtir, il y a eu un immense élan de générosité, d’entraide et de solidarité. Au village, ça a toujours été comme ça, une grande famille, toutes les portes ouvertes et nous pouvions compter les uns sur les autres. Quand je suis revenue dans ma maison, il y avait encore l’encrier que j’avais laissé, à la même place.Jenesuisplusjamaisretournéeà l’école… Cet épisode a bouleversé des vies », conclut cette Moulinoise, dont la vie fut marquée par la déportation.