Sans guichets, est-ce la fin de « l’humain » en gare ?
La Région a annoncé la fermeture définitive de certains guichets dans des gares secondaires des Alpes-Maritimes, pour leur très faible utilisation. Reportage au Cros-de-Cagnes.
Gare du Cros-de-Cagnes, jeudi 9 mai, 15 heures. Deux petites dames italiennes s’énervent sur la borne SNCF et finissent par demander de l’aide. Elles veulent aller à Villefranche-sur-Mer. Mais les méandres de la machine leur proposent une obscure destination, pour 170 euros.
Férié ou pas férié, le guichet de cette gare secondaire de Cagnessur-Mer est définitivement fermé depuis le 1er mai, comme c’est le cas dans plusieurs gares de la Côte d’Azur. Sospel, La Trinité, Cannes la Bocca et Mandelieu n’ont plus « de présence commerciale ». Menton Garavan, Carnoles, Villefranche, Biot, Cros-de-Cagnes, Villeneuve-Loubet, Golfe-Juan et Grasse ont, elles, des « présences commerciales », plusieurs fois par semaine, mais sans guichet. Mais fermer le guichet de gare veut dire fermer la gare, tout simplement.
« Le contact, c’est de plus en plus vital »
Une décision de la Région « supprimant encore du service public aux usagers est aussi une provocation au monde du travail » a taclé l’association des Amis du rail azuréen, qui « réclame le retour des guichetiers ».
À l’inverse, l’argument de la Région et de la SNCF est la très faible fréquentation de ces guichets.
« C’est plus pratique d’avoir des gens, c’est de l’humain aussi, répond Graziella, après avoir réussi à acheter son billet pour Villefranche. C’est important qu’il y ait de l’aide, notamment pour les étrangers. Les gens ont besoin d’un contact, c’est de plus en plus vital. »
Des gares aux guichets déjà très rarement ouverts
Ils sont plusieurs à ne pas être surpris. Ces petites gares sont déjà très souvent fermées, disent-ils. Et puis, il y a cette tendance globale. « Franchement, ici ou à Golfe-Juan, c’était ouvert deux fois dans la semaine, souffle Thierry, qui n’a jamais besoin du guichet. Après, du moment qu’il y a une machine… Mais c’est sûr qu’ils cherchent à faire des économies. Ou c’est pour pousser les gens à prendre le bus… » Certes, il y a la machine ou Internet, mais ça ne suffit pas toujours. JeanClaude attend le train pour rentrer chez lui, à Saint-Laurent-du-Var, canne à la main. « La machine ne va pas me dire le temps que j’ai entre chaque arrêt. Comme je boite, qu’il faut se taper des escaliers, ça m’est arrivé d’en louper. Il faut passer par Internet, j’ai 70 ans, j’y arrive, mais ce n’est pas super familier. Du coup ça m’arrive de prendre la voiture, c’est trop compliqué ».
Surtout, il y a ces gares définitivement fermées. Pour éviter d’en arriver là ou pour leur redonner vie, la SNCF travaille parfois avec les institutions ou des associations pour proposer d’autres services.
Le maire se dit « en discussion »
Mais ici ? Est-ce que cela a été envisagé ? La fermeture est-elle une préoccupation ? La municipalité s’y est-elle opposée ? Le maire de Cagnes-sur-Mer, Louis Nègre a beau être également président du Groupement des autorités responsables de transport, il n’a pas vraiment de position sur la question.
« On savait qu’il y avait des préconisations en cours, mais j’attends d’avoir une position officielle, je n’ai rien reçu, esquive-t-il. Les gares font partie des paysages de nos villes, mais parfois il n’y a pas grand monde. Je suis en discussion avec la Région pour faire rouvrir la gare de l’hippodrome. Alors je suis très très prudent. Ce n’est pas noir ou blanc. »