Renée Puissant
Après la Première Guerre mondiale, un souffle de pragmatisme rafraîchit les créations destinées aux femmes, que ce soit dans le monde de la couture ou dans celui de la joaillerie. Chez Van Cleef & Arpels, une femme a compris cette nouvelle équation, c’est Renée Puissant, qui n’est autre que la fille des fondateurs Alfred Van Cleef et Esther Arpels. Femme d’une remarquable élégance, elle est aussi douée d’un grand sens pratique. Ses premières initiatives relèvent en effet de ce qu’on appellerait aujourd’hui du “marketing”. En 1921, pour les fêtes de fin d’année, elle imagine une vente de bijoux “à prix spéciaux”. Ne vient-elle pas d’inventer en quelque sorte le prêt-à-porter de la joaillerie ? Son flair s’exerce aussi dans les créations. En 1926, après le décès de son époux, elle endosse le rôle de directrice artistique de la maison fondée par ses parents. C’est sous sa direction que les créations s’enveloppent d’une sensualité particulière, se dote de volumes triomphants. Elle forme avec le dessinateur René Sim Lacaze un tandem fructueux. C’est sous son mandat que voit le jour le célèbre serti mystérieux ou encore la minaudière. Elle introduisit également des éléments du quotidien dans la conception d’objets précieux. On pense bien sûr au collier Zip qui incarne l’art de la transformation chez Van Cleef & Arpels. Il tirait son inspiration des robes d’Elsa Schiaparelli qui avait métamorphosé les fermetures à glissière des vestes d’aviateurs en agréments de toilettes. La conception de ce collier fut longue et difficile. Il fallut attendre le début des années 50 pour que le premier collier Zip sorte des ateliers. Renée Puissant avait entretemps été emportée par les ténèbres de la guerre en 1942. La postérité éclatante du collier Zip qui, à bien des égards, domine la haute joaillerie du siècle dernier, atteste aujourd’hui encore l’immense contribution d’une femme qui a choisi jusqu’au bout la voie de l’indépendance et de la liberté.