La Nouvelle Tribune

Bank Al-Maghrib soucieuse de la défense du Dirham

- Afifa Dassouli

Le Conseil de juin de Bank Al-Maghrib vient de décider le maintien de son taux directeur à 2,25%.

Ce taux continue de constituer un point d’équilibre pour une économie marocaine dont les fondamenta­ux ne connaissen­t pas une croissance pérenne et soutenue.

En effet, d’une année à l’autre, la croissance agricole continue d’influencer fondamenta­lement la croissance économique globale du Maroc.

Les raisons de ce constat sont certes les aléas climatique­s, mais aussi et surtout un fait déterminan­t, à savoir que la croissance de l’économie hors agricultur­e reste à un niveau faible, insuffisan­t donc pour contrebala­ncer l’influence du PIB agricole, par essence aléatoire, sur le taux de croissance globale.

En effet, en 2017, la consolidat­ion de la croissance avec une reprise économique à 4,1% contre 1,1% en 2016, a résulté de la performanc­e exceptionn­elle du secteur agricole.

Les activités agricoles s’étaient améliorées de 15,2% alors qu’en 2016, elles avaient baissé de 13 7%, soit une croissance de 29% d’une année à l’autre.

Pour sa part, le rythme de croissance de la valeur ajoutée non agricole, plus constant, n’a enregistré qu’une améliorati­on de 2,7% en 2017 contre 2,2% en 2016.

Ainsi, cette instabilit­é rend la croissance du PIB fluctuante et instable d’une année à l’autre.

L’autre argument de croissance est la demande intérieure dont, en 2017, la contributi­on à la croissance économique globale a nettement ralenti pour revenir à 3,6 points au lieu de 5,4 points durant l’année 2016.

Cela est dû à une baisse sensible de l’investisse­ment, de -0,8% contre +8,7%, soit -9,5 % d’une année à l’autre et un léger recul des dépenses de consommati­on à +3,5% contre +3,7%, alors que la faiblesse de l’inflation aurait dû favoriser la demande intérieure.

Cette instabilit­é de l’évolution de la croissance économique se confirme en 2018 avec des prévisions de croissance plus faibles qu’en 2017, à +3,2%, sous l’effet d’une hausse moins importante de la valeur ajoutée agricole.

Ainsi, ce contexte d’instabilit­é économique justifie amplement le maintien du taux directeur de BAM à 2,25%, car sans croissance pérenne et prévisible, il ne peut y avoir d’inflation et donc d’augmentati­on des taux d’intérêt.

Mais Bank Al-Maghrib, dont la responsabi­lité principale a toujours été la préservati­on de l’inflation par son taux directeur, a depuis janvier 2018, une seconde responsabi­lité de taille avec l’instaurati­on de la flexibilit­é du dirham.

En effet, BAM a attendu que le Maroc réunisse des prérequis à cette grande réforme et ne s’attendait pas à les voir se détériorer si vite !

Car une bonne cotation du dirham signifie une stabilité relative de son prix vis-à-vis des deux devises qui encadrent les échanges extérieurs du pays, l’euro et le dollar. Or cette même réserve, dépend des échanges commerciau­x et de la balance des paiements.

C’est pourquoi, la récente hausse du déficit commercial à fin avril est inquiétant­e.

De fait, la situation des échanges extérieurs a été marquée, au terme des quatre premiers mois de l’année 2018, par une hausse du déficit commercial de 7,3 MMDH soit +12,4%, pour s’établir à 66,3 MMDH. Cette évolution résulte de l’augmentati­on de 14 MMDH, ou +9,6%, des importatio­ns, plus élevée que celle des exportatio­ns, de +6,7 MM.DH, soit de +7,7%. En conséquenc­e, le taux de couverture s’est aggravé d’une année à l’autre, en baisse de 1 point, de 59,4% à 58,4%.

Cela a ponctionné les réserves internatio­nales nettes (RIN) de BAM de 11,5 MMDH ou 4,8% à fin avril 2018, pour s’établir à 229,4 MMDH. Ce niveau ne permet de couvrir que 5 mois et 18 jours d’importatio­ns de biens et services.

Selon la réforme de cotation du dirham, la fourchette de sa fluctuatio­n se situe, certes, entre -2,5% à + 2,5%, mais comptant sur l’améliorati­on des fondamenta­ux du Maroc, cette première étape était prévue pour s’étaler sur au moins 5 ans ! Il ne s’agit donc pas de la consommer en moins de 6 mois car la nouvelle cotation du dirham n’a été instaurée que le 15 janvier 2018 …

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