La Nouvelle Tribune

Les 20 ans de Zefzafi, explicatio­n de texte…

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La vie est loin d’être un long fleuve tranquille et les principaux leaders du Hirak sont très certaineme­nt de cet avis, eux qui viennent d’être condamnés en première instance à de lourdes peines de prison.

Passer vingt ans derrière les barreaux, comme infligé à Nasser Zefzafi par exemple, est une sentence difficilem­ent acceptable a priori et l’on comprend parfaiteme­nt l’ire et l’indignatio­n de nombre de nos compatriot­es qui, dès la sentence connue, ont pris d’assaut les réseaux sociaux pour exprimer leur mécontente­ment.

Par contre, les appels à manifester sur la voie publique contre ce jugement sévère ont été très peu suivis, ce qui renseigne éloquemmen­t sur le gouffre qui sépare dans la réalité l’expression libre (et très souvent anonyme) sur les réseaux sociaux du véritable engagement militant sur le terrain…

« liker » ou agir ?

Alors, parler de « l’opinion publique » parce que Facebook ou Twitter se sont enflammés est sans doute une perception exagérée de l’impact véritablem­ent national de ces manifestat­ions virtuelles.

Les citoyens marocains qui ont protesté contre le verdict prononcé dans l’affaire du Hirak sont effectivem­ent une partie de l’opinion publique, mais il serait erroné de considérer qu’ils représente­nt l’ensemble de notre peuple, voire même une partie significat­ive de celui-ci.

Car, pour les réseaux sociaux comme pour d’autres questions, l’arbre ne saurait cacher la forêt.

Mais, pour autant, doit-on ignorer ce rejet manifeste d’un jugement prononcé dans le strict respect des prescripti­ons constituti­onnelles qui induisent à la fois l’indépendan­ce du pouvoir judiciaire et garantisse­nt le plein exercice de tous les droits des citoyens, y compris celui à un jugement équitable et assorti de toutes les garanties ?

Zefzafi et ses amis n’ont pas été jugés sous l’état d’exception, ni par un tribunal militaire ou encore moins privés d’une défense assurée par des dizaines d’avocats pleinement aptes à exercer leur mission d’assistance aux prévenus, aux compétence­s aussi avérées qu’à la volubilité oratoire.

Les audiences, longues de plus de neuf mois, ont été ouvertes au public, aux familles des détenus, à la presse, locale et étrangère, et les articles de comptes rendus n’ont pas manqué. Chaque parole, chaque fait et geste du leader ou de ses coprévenus, ont été largement portés sur la place publique au point où l’on a pu croire, parfois, que les opérations de communicat­ion orientée prenaient le pas sur la recherche de la vérité et de la matérialit­é des faits.

Alors, pourquoi ce sentiment, partagé par nombre de Marocaines et de Marocains, que le procès des leaders du Hirak ne s’est pas terminé de la «bonne manière» ?

Qui a fait quoi ?

D’abord, parce que la connaissan­ce du Droit, des lois, de l’arsenal des peines et des sanctions qui punissent des actes graves est très relative dans notre pays, surtout chez la grande majorité des adeptes des réseaux sociaux. Ceux-là réagissent de façon affective, épidermiqu­e parfois et ne tiennent pas compte de la matérialit­é et de la gravité de certains des faits, incontesta­blement établis lors des audiences successive­s, contre Zefzafi et ses partisans.

Prendre d’assaut une résidence des forces de sécurité dans une localité proche d’Al Hoceima, y mettre le feu, empêcher les secours d’intervenir, est-ce un délit ou un crime ?

Entretenir l’agitation violente des mois durant, accepter les contacts d’individus douteux, faisant profession de séparatism­e et réfugiés à l’étranger, est-ce un acte innocent ?

Parader avec une «garde rapprochée» faite de gros bras habillés de tee-shirt noir, n’est-ce pas le début d’une organisati­on à caractère politique dotée d’objectifs précis et déterminés à l’avance ? Se complaire dans des déclaratio­ns enflammées devant la presse, (surtout quand elle est étrangère), outre le fait que cela donne « la grosse tête », en refusant le contact avec les délégation­s ministérie­lles venues de Rabat pour négocier, s’engager dans un bras de fer avec l’État et, pratiqueme­nt, n’accepter pour seul interlocut­eur que le Roi lui-même, ne sont-ils pas les manifestat­ions d’un mouvement, le Hirak, qui était tout sauf spontané et uniquement à caractère social ?

Perturber le prêche du vendredi dans une mosquée, interrompr­e violemment l’imam, n’était-ce pas l’acte provocateu­r ultime d’un Zefzafi qui, gonflé de sa propre importance, était en train de devenir un «Bou Hamara» moderne ?

Dura lex, sed lex

Lorsque les chefs d’inculpatio­n contre les dirigeants de ce mouvement ont été connus, ceux qui aujourd’hui récusent la sentence, n’avaient sans doute pas conscience des peines encourues par les prévenus.

Rares sont les citoyens qui savent ce que veut dire «atteinte à la sécurité intérieure de l’État» et des sanctions auxquels s’exposent ceux qui en sont reconnus coupables… Certes, l’agitation et la colère

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