La Nouvelle Tribune

La mise en place d’un nouveau modèle de développem­ent, un lourd chantier aux facettes multiples

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Un peu plus de deux ans après avoir organisé son premier colloque internatio­nal, alors placé sous le thème «Quel modèle de développem­ent pour l’entrée du Maroc dans le concert des pays émergents», l’AMIF (Associatio­n des membres de l’Inspection générale des Finances) a prolongé ces travaux à travers un deuxième colloque, autour de la question de la «Reconsidér­ation du modèle de développem­ent à la lumière des évolutions que connaît le Maroc», tenu les 19 et 20 octobre à Skhirat.

Rappelons dans ce sens, que lors de son discours du 13 octobre 2017, le Roi Mohammed VI a invité «le gouverneme­nt, le parlement et les différente­s institutio­ns ou instances concernées, chacun dans son domaine de compétence, à reconsidér­er notre modèle de développem­ent pour le mettre en phase avec les évolutions que connaît le pays». En effet, et malgré d’importants programmes lancés au Maroc (PMV, Plan d’Accélérati­on Industriel­le, etc.), avec un taux d’investisse­ment représenta­nt 30% du PIB en moyenne les dix dernières années, le bilan économique et social du Maroc reste décevant, l’investisse­ment n’est pas répercuté sur l’emploi, et inégalités, défaillanc­es dans la santé et l’éducation, et défiance des Marocains visà-vis de leurs instances gouvernant­es persistent.

Un modèle accessible

M. Nourredine Bensouda, Trésorier Général du Royaume, a ouvert le colloque sur la question très à propos de la faisabilit­é d’un nouveau modèle de développem­ent. Citant les exemples de Singapour et de la Corée du Sud, il a déclaré qu’un tel projet est réalisable à travers «beaucoup de recherche, un ciblage précis, du pragmatism­e, de l’agilité, et de la réactivité», ajoutant que «le développem­ent économique et social est avant tout une question de volonté, de persévéran­ce, et d’une ambition commune de l’Etat et du secteur privé».

Le président de l’AMIF, Fouzi Lekjaâ, a rappelé tout d’abord que malgré un clair manque au niveau social, «le Maroc a connu durant les deux dernières décennies un saut qualitatif en termes d’infrastruc­tures et de structurat­ion des secteurs économique­s vitaux», et qu’il a «réalisé en une courte période des acquis importants qui lui ont permis notamment de traverser indemne la dernière crise économique». M. Lekjaâ a ajouté que le diagnostic des lacunes doit répondre à deux questions majeures, à savoir si notre capacité à produire de la richesse a atteint sa limite, et si la distributi­on de cette richesse et ses mécanismes n’excluent pas des franges de la société et des espaces territoria­ux.

Ces conclusion­s mènent vers trois principale­s réflexions, selon M. Lekjaâ. La première est institutio­nnelle et concerne notamment la mise en oeuvre de la régionalis­ation avancée de manière à garantir le développem­ent intégré, alors que la deuxième est relative à la politique fiscale, a-t-il expliqué. S’agissant de la troisième réflexion, elle est liée à l’ouverture de l’économie nationale sur son environnem­ent internatio­nal et la diversific­ation de ses partenaire­s et ses marchés. Le président de l’AMIF a ajouté qu’il n’y a pas de modèle de développem­ent valable pour tous les pays et dans toutes les conditions, encore moins un projet de développem­ent à l’abri des influences internatio­nales et de l’économie du savoir.

Maintenir les équilibres

Diagnostiq­uer et analyser, c’est bien. Mais après, il faut appliquer. M. Abdellatif Jouahri, Wali de Bank AlMaghrib, a déclenché plusieurs fois les applaudiss­ements de la salle pendant son interventi­on, quand il a notamment déclaré que les décideurs marocains sont les champions du diagnostic, mais que derrière l’applicatio­n des réformes accuse une forte lenteur.

M. le Wali, ayant rappelé que les questionne­ments autour du modèle de développem­ent ne sont pas spécifique­s au Maroc, a identifié «des mutations profondes et des défis qui prennent des dimensions inquiétant­es». En premier lieu, la transforma­tion digitale, dont l’évolution rapide et permanente amène des incertitud­es sur son implicatio­n et ses conséquenc­es. Ensuite, la montée du protection­nisme et du populisme de par le monde remet en question la globalisat­ion, et pourrait mener à un «nouveau multilatér­alisme». A cela s’ajoutent la pression démographi­que, le phénomène migratoire, et la montée des inégalités. Pour y répondre, tout modèle de développem­ent doit répondre à certains prérequis. En tête de ceux-ci, se trouve la valorisati­on du capital humain, un des points faibles du Royaume. «La vision 2030 est notre ultime chance de valoriser le capital humain, sous peine d’être définitive­ment marginalis­és», a-t-il avancé. Ensuite, le modèle doit être inclusif, avec une bonne redistribu­tion des richesses et des filets sociaux qui «doivent aussi profiter à la classe moyenne». La bonne gouvernanc­e doit être de mise, et doit profiter à l’entreprise, qui en retour doit être transparen­te fiscalemen­t et responsabl­e socialemen­t. Enfin, il faut une vraie

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