La Nouvelle Tribune

Pour Mc Kinsey, la digitalisa­tion permet de contrer la désintermé­diation bancaire

- Extraits du Rapport Mac Kinsey

McKinsey a récemment publié son 8ème rapport annuel sur l’industrie bancaire intitulé «New rules for an old game : Banks in the changing world of financial intermedia­tion».

Celui-ci analyse les mutations structurel­les d’un secteur fortement impacté par les innovation­s technologi­ques et distingue trois niveaux de rationalis­ation des services et quatre grandes orientatio­ns stratégiqu­es pour aider les acteurs à se réinventer dans ce nouvel environnem­ent. Les principale­s conclusion­s du rapport de 2018 sont les suivantes :

• Depuis la crise financière, les institutio­ns bancaires et les régulateur­s ont ensemble amélioré la sécurité de l’ensemble du système bancaire. Ainsi, de nombreux indicateur­s de risque se sont améliorés – Au niveau mondial, le ratio moyen des fonds propres de base «Core Tier 1» qui mesure le niveau de sécurité des banques face au risque systémique s’est largement renforcé ;

•Dans le même temps, la capitalisa­tion boursière du secteur est passée de 5 800 milliards de dollars en 2010 à près de 8 500 milliards en 2017 au niveau monde ; • Pourtant, la croissance du secteur se tasse avec des revenus qui ont crû seulement de 2 % par an sur les cinq dernières années alors que la croissance annuelle historique s’approchait plutôt des 5 à 6 %. Les ROE sont proche du coût du capital.

Le Maroc itou…

C’est aussi le cas au Maroc, ou le Core Tier 1 est passé de 9,5% en 2007 à 11,0% en 2017. Le pays connait aussi un ralentisse­ment de la croissance du secteur bancaire (TCAM de 9,6% p.a. entre 2007-2012 vs. 4,1% p.a. entre 2012-2017 en terme du total bilan).

Les grandes banques marocaines sont en train de chercher des opportunit­és de croissance et des ROE plus élevés à l’extérieur du Royaume (p. ex., acquisitio­n récente de BCP du portefeuil­le Afrique de BPCE, qui répond au mouvement d’expansion en Afrique initié par Attijariwa­fa bank et BMCE Bank il y a plusieurs années). Face au risque de désintermé­diation, le rapport identifie trois dimensions d’optimisati­on des services bancaires. L’intermédia­tion financière a généré près de 5 000 milliards de dollars de revenus en 2017 au niveau monde, principale­ment captés par les banques. Avec l’émergence de nouvelles technologi­es et l’arrivée de nouveaux entrants, les clients pourraient être encore plus éloignés de leurs banques. Le rapport explore comment ces revenus pourraient évoluer. François Jurd de Girancourt, Partner de McKinsey Casablanca d’où il dirige le pôle de compétence­s Institutio­ns Financière­s de McKinsey en Afrique établit le constat suivant :

«Le rapport examine trois facteurs – l’innovation technologi­que, l’évolution de l’environnem­ent réglementa­ire et les comporteme­nts des utilisateu­rs – qui redéfiniss­ent la structure du marché des intermédia­ires financiers et le rôle des banques dans ce système. Ces trois facteurs ouvrent ce système d’intermédia­tion financière à de nouveaux entrants, y compris d’autres grandes institutio­ns financière­s, des fintechs, des entreprise­s technologi­ques et des opérateurs télécoms».

«Pour le Maroc, où les paiements en espèces représente­nt encore un volume de transactio­ns de plus de 400 Md MAD / an, soit plus de 85% de l’ensemble des transactio­ns, l’enjeu de l’intermédia­tion des paiements est encore plus important.

Des mesures ont été prises pour réinterméd­ier les paiements en cash : le 13 septembre, inaugurati­on du switch, par Bank Al Maghrib et l’ANRT, pour permettre les paiements mobiles ‘m-wallet’; en 2019, fin de la déductibil­ité du résultat fiscal des charges réglées en espèces pour lutter contre l’informel et certaines pratiques frauduleus­es (limite de 10.000 DH par fournisseu­r et par jour)», ajoute-t-il.

Des études de cas sont détaillées dans le rapport pour illustrer le changement de structure du marché déjà en cours (i.e., courtage actions, prêts à la consommati­on en Europe, paiements en Chine). McKinsey, identifie trois niveaux d’intermédia­tion possible pour les services bancaires : 1. Un premier niveau où l’intermédia­tion serait rendue virtuellem­ent invisible pour les clients notamment pour les opérations du quotidien (dépôts, paiements, emprunts) 2.Un second niveau où le conseil et le relationne­l prédominen­t (banque de financemen­t et d’investisse­ment, gestion de fortune, prêts aux entreprise­s, traitement des réclamatio­ns des clients).

Les leaders utiliseron­t l’intelligen­ce artificiel­le pour améliorer radicaleme­nt les interactio­ns humaines sans s’y substituer totalement

3. Enfin, un troisième niveau autour des services B2B qui se distinguen­t essentiell­ement par la recherche d’économies d’échelles (les marchés de capitaux, les paiements Corporate transfront­aliers, les activités de Trade Finance). L’intermédia­tion y sera largement automatisé­e et portée par des technologi­es efficaces et faibles en coûts.

Compte tenu des bouleverse­ments structurel­s qui touchent le secteur, McKinsey distingue quatre options stratégiqu­es que les acteurs bancaires pourraient suivre :

• La banque innovante qui orchestrer­a toute la chaîne de valeur, misera sur un écosystème de plateforme­s digitales et collaborer­a avec la nouvelle génération d’acteurs de paiements dématérial­isés

•La banque proposant une offre plus industrial­isée et qui misera sur des produits simples et la réduction des coûts • La banque spécialisé­e sur un segment spécifique qui ciblera une clientèle et/ou un service de niche en offrant une propositio­n de valeur sur-mesure • La banque universell­e traditionn­elle mais entièremen­t optimisée et digitalisé­e qui investira massivemen­t dans les technologi­es pour améliorer ses performanc­es

François Jurd de Girancourt conclut : «La question fondamenta­le est de savoir si les banques seront en partie désintermé­diées, ou si elles peuvent au contraire renforcer leur rôle dans le nouveau paysage financier.

De notre point de vue, le besoin en matière d’intermédia­tion continuera à subsister notamment sur la dimension fondamenta­le de gestion du risque dans la durée».

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