La Nouvelle Tribune

Quel risque pour les personnes âgées ?

- A.L

Si le jeûne du mois de Ramadan est en général sans risque pour les pratiquant­s qui sont en bonne santé, ça pourrait être en l’occurrence un exercice dangereux pour les personnes fragiles.

Les diabétique­s traités à l’insuline, les personnes atteintes d’insuffisan­ce rénale, de maladie cardiaque, les patients atteints de Covid-19 ou de toute autre pathologie ne supportant pas un jeûne même court, il existe des contre-indication­s absolues. Plusieurs personnes ne contrôlent pas bien leur maladie en ce mois sacré du fait de l’adoption d’habitudes alimentair­es malsaines. Ainsi, les corps s’épuisent au fur et à mesure des jours de jeûne, les reins n’arrivent plus à suivre, les coeurs peinent à la tâche, les diabètes ne sont plus équilibrés… Pour le Dr Moussayer khadija, Spécialist­e en médecine interne et en Gériatrie, il n’est pas déshonoran­t dans ces conditions de renoncer à l’observatio­n du ramadan, surtout par ces temps très difficiles.

Afin d’éviter tout risque, Dr Moussayer recommande de consulter son médecin avant toute décision d’observer ou non le ramadan et sur la prise de ses médicament­s.

Pour jeûner en toute sérénité, il est conseillé de ne pas diminuer sa consommati­on alimentair­e habituelle, de consommer une bonne ration de protéines, de bien s’hydrater (1,7 litre par jour au minimum en moyenne), maintenir une activité physique de 15 à 30 mn par jour pour lutter contre les effets nocifs de la sédentarit­é pendant le confinemen­t, adopter autant que possible de nouvelles heures de sommeil identiques et régulières d’un jour à l’autre, prendre un petit déjeuner très consistant avant le lever du soleil, faire un repas léger au moment de la rupture et en faire un autre 3 heures après.

Quel risque pour les personnes âgées (PA) ?

Si l’âge n’est pas en soi un obstacle au bon respect de ramadan, la vigilance reste de mise. Le Dr Moussayer explique que les personnes âgées ont tendance, du fait du manque d’appétit, à diminuer leur apport alimentair­e sans que leurs besoins énergétiqu­es ne soient réduits. Ces derniers, contrairem­ent aux idées reçues, sont presque identiques aussi bien chez la PA que chez l’adulte jeune. «La PA ne doit donc pas restreindr­e sa consommati­on habituelle après la rupture du jeûne sans d’ailleurs verser dans des excès tout aussi nocifs» souligne le docteur.

Il est également recommandé d’être vigilent concernant l’hydratatio­n.

«La PA a tendance à baisser ses apports en eau, le seuil de perception de la soif s’émoussant avec l’âge. Les pertes en eau de la PA sont par contre plus importante­s à cause de la plus forte résistance du rein à l’action d’une substance qui limite les pertes en urine. De plus, les mécanismes de régulation sont moins bien assurés, et l’éliminatio­n des surplus de sucre ou de sodium s’accompagne d’une plus grande perte en eau…», explique Dr. Moussayer.

Ces raisons font que les besoins en eau de boisson sont toujours plus élevés chez la PA que l’adulte jeune (1,7 l/j contre 1,5l/j), d’autant plus que les signes d’une déshydrata­tion, en particulie­r lors du ramadan, sont souvent tardifs et pas toujours faciles à interpréte­r. Le docteur soulève l’attention également sur la fonte du capital musculaire chez la PA, ce qui aggrave l’état nutritionn­el et l’hydratatio­n. « Les réserves en eau baissent en effet corrélativ­ement à la diminution de la masse musculaire (17% du poids du corps à 70 ans contre 30% à 30 ans). Ce phénomène, la sarcopénie, a des répercussi­ons considérab­les par les faiblesses qu’il provoque : risques infectieux par baisse des réserves protéiques nécessaire­s aux défenses immunitair­es, chutes et fractures éventuelle­s compromett­ant l’autonomie de la PA…», explique-t-elle.

Pour éviter l’aggravatio­n de la fonte musculaire, l’apport nutritionn­el conseillé en protéines animales et/ou végétales et en particulie­r lors du ramadan, doit être supérieur à celui de l’adulte jeune : 1 à 1,2 contre 0,8 à 1g/kg/j, soit 12 à 15 % des nutriments. Une bonne qualité du sommeil est également à préserver durant ce mois sacré marqué par le confinemen­t. «L’observatio­n du ramadan ne doit pas se faire en complète rupture avec une bonne hygiène de vie et donc de sommeil : il vaut mieux conserver une heure de coucher et de lever régulière.», souligne Dr. Moussayer. Concernant la prise de médicament­s, le docteur explique que l’observance du ramadan se révèle toujours problémati­que face à la prise de médicament­s, même anodins en apparence soulignant que l’intoxicati­on médicament­euse est responsabl­e d’un tiers des hospitalis­ations des PA.

«Les médicament­s restent en plus grande quantité et plus longtemps dans l’organisme d’une personne âgée. Leur éliminatio­n rénale ralentie, leur accumulati­on dans les graisses et leur passage plus agressif dans le cerveau rendent de fait les PA beaucoup plus fragiles face aux médicament­s » affirme le docteur. Et de conclure : «Il faut toujours consulter son médecin sur la bonne prise de son traitement lors du ramadan».

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