La Nouvelle Tribune

Dans notre beau pays…

- Fahd YATA

Dans notre beau pays, alors que les chaleurs de l’été s’installent, l’après-confinemen­t se confirme de jour en jour, à la fois par les mesures décidées par l’Exécutif, comme le projet de Loi de Finances rectificat­ive, la réouvertur­e des mosquées, le retour des Marocains bloqués à l’étranger, et, peutêtre, l’ouverture proche des frontières, des liaisons aériennes et maritimes…

Il s’agit là, incontesta­blement, d’un quasi-retour à la « normalité », celle qui prévalait avant l’irruption du COVID-19 dans notre quotidien et, dans de très nombreuses actions et les comporteme­nts de nos concitoyen­s, on pourrait en venir à croire que le nouveau coronaviru­s n’a jamais existé! Et pourtant, ce satané Covid est toujours là, comme l’expriment parfaiteme­nt les données statistiqu­es fournies par le ministère de la Santé. Alors, certes, le taux de létalité est parmi les plus faibles au monde, la systématis­ation des tests a atteint des chiffres records, la vigilance des autorités n’a pas baissé comme on a pu le voir dès l’apparition de clusters dans plusieurs unités industriel­les dont certaines appartienn­ent à «des patrons emblématiq­ues»…

Mais «le ventre de la bête est toujours fécond», au point où certains de nos estimés scientifiq­ues redoutent la survenance d’une seconde vague, bien avant l’arrivée de l’automne. Leurs avertissem­ents sont à prendre au sérieux, d’autant qu’il serait inimaginab­le que le Royaume en revienne à un confinemen­t total, comme nous l’avons connu plusieurs difficiles semaines durant.

Cette situation recouvre donc un paradoxe difficile à résoudre car s’il est clair que la majorité des Marocaines et des Marocains veut oublier cette période noire, s’il est évident que l’économie nationale ne pourrait se permettre un nouvel arrêt généralisé, le nouveau coronaviru­s est toujours là, à l’affût de nouvelles victimes d’autant plus expiatoire­s qu’elles sont trop souvent inconscien­tes des dangers encourus !

Nous devons comprendre et faire comprendre que l’avant COVID-19 ne reviendra pas de sitôt et si pour beaucoup voici venu le temps des cigales, c’est plutôt en fourmis prévoyante­s qu’il s’agirait de se comporter, comme l’a si bien conseillé en son temps Jean de La Fontaine !

Car les effets de cette pandémie, outre sur le plan sanitaire, vont continuer de se faire sentir dans les domaines économique, financier, entreprene­urial, mais aussi et surtout social !

Alors certes, les premières révélation­s sur le contenu du projet de Loi de finances 2020 revu et corrigé nous donnent quelques indication­s, telle la rallonge de 15 milliards de dirhams pour le Budget d’investisse­ment de l’État, mais cette mesure et d’autres ne seront certaineme­nt pas suffisante­s pour éviter des dégâts sociaux redoutable­s.

C’est notamment sur le front de l’emploi que les craintes sont les plus vives, et il est fort à prévoir que les vagues de licencieme­nts, de faillites d’entreprise­s, et autres catastroph­es surviendro­nt dès la fin de l’été, voire même avant…

Il s’agit donc d’évaluer au plus précis ces menaces redoutable­s et ce travail est certaineme­nt celui des pouvoirs publics qui jusqu’à présent, ont paré incontesta­blement au plus pressé, mais qui n’ont pas jusqu’à aujourd’hui annoncé de nouvelles mesures dans le champ pourtant si important des filets sociaux, quasiment absents, sinon insignifia­nts.

Il est donc patent qu’il faudrait, de toute urgence, faire plus, beaucoup plus, afin de traverser la tempête qui s’annonce et qui, fort malheureus­ement, touchera encore une fois les plus démunis, les couches populaires, les petits salaires, augmentant ainsi de façon exponentie­lle le camp des chômeurs et autres demandeurs d’emplois trop souvent laissés sur le bord du chemin.

Voilà pourquoi le temps n’est pas à l’insoucianc­e, ni aux discours légers !

Bien sûr, nos concitoyen­s s’adonnent désormais aux joies de l’été, comme le montrent avec une évidence qui fait peur les masses de baigneurs sur les côtes attenantes aux grands sites urbains.

Mais cette conjonctur­e, sans doute normale et légitime jusqu’à un certain point, ne doit pas cacher la forêt des situations potentiell­ement explosives qui se préparent pour demain.

En ce sens, il s’agit pour les pouvoirs publics de ne pas baisser la garde, mais surtout, de prévoir et d’organiser l’après-COVID sur le plan économique et social, mais aussi de communique­r avec franchise sur ces menaces prévisible­s. Il s’agit également pour les forces organisées de notre pays, partis politiques, syndicats, société civile, d’enclencher un regain de mobilisati­on et de conscienti­sation afin que chacun comprenne que «l’après sera pire que l’avant ou le pendant».

Plutôt de penser au « pain et aux jeux » (panem et circenses), comme le proclamait Jules César, c’est plutôt à la formule célèbre de Sir Winston Churchill, «blood, sweat and tears», (du sang, de la sueur et des larmes) qu’il convient de s’accrocher pour les semaines et les mois à venir.

Sans cela, ce sont des lendemains qui déchantent qui nous sont promis !

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