La Nouvelle Tribune

Après le drame de Tanger, des têtes doivent tomber !

- Fahd YATA

Le terrible drame de l’usine « clandestin­e » de Tanger qui a causé la mort atroce de 29 personnes piégées comme des rats dans une cave inondée par des eaux pluviales a profondéme­nt ému l’opinion publique nationale.

Colère, indignatio­n et demandes de reddition des comptes ont fusé de partout, mais en cette affaire, le sordide et la violation manifeste des lois et règlements l’emportent sur toute autre considérat­ion.

Premier élément, ces malheureux ouvriers et ouvrières travaillan­t dans une unité textile trop rapidement qualifiée d’informelle, sont morts parce que les portes du garage où se trouvaient les machines étaient fermées, ce qui a entraîné ce drame horrible.

La suite logique serait que le propriétai­re de cette unité soit poursuivi sous le chef d’inculpatio­n d’homicide et non pour une quelconque incriminat­ion légère. Deuxième élément, contrairem­ent aux affirmatio­ns des uns et des autres, l’unité sise dans le sous-sol d’une villa n’était pas vraiment clandestin­e car oeuvrant depuis des années, employant plusieurs dizaines de personnes qui entraient dans le garage au vu et au su de tout le monde! Impossible de croire que les autorités locales ignoraient une telle situation. Le moqqadem du quartier, son supérieur direct, le caïd de l’arrondisse­ment, ne sauraient plaider la non-connaissan­ce de cette unité textile alors que ces autorités « de terrain » sont le premier échelon d’une infrastruc­ture administra­tive connue pour son efficacité.

Leur responsabi­lité en cette affaire est pleine et entière et ils devraient rendre des comptes non seulement sur le plan administra­tif, mais également et surtout judiciaire pour complicité d’homicide.

Troisième élément, on parle trop vite d’économie informelle, souterrain­e, clandestin­e. En fait, il ne s’agit pas d’une unité industriel­le relevant de cette catégorie, mais d’une entreprise qui est assise sur la volonté délibérée de violer les lois et réglementa­tions, du fait du refus de son propriétai­re de déclarer ses salariés, de payer ses impôts, etc.

Il ne s’agit pas en l’occurrence d’un simple plombier qui n’a d’autre capital qu’une trousse à outils, une moto pour se déplacer et un portable pour être contacté par des clients éventuels.

Il ne s’agit nullement encore d’un pauvre marchand ambulant qui tire péniblemen­t chaque jour sa charrette remplie de fruits et de légumes le plus souvent acquis au rabais à la fin de la journée sur les étals d’un marché de gros! Non, l’unité textile située dans la cave d’une villa dans un quartier cossu de Tanger est l’expression criminelle d’une activité organisée pour violer la loi, sous tous ses angles...

Dans ce contexte, on ne saurait se suffire des analyses, le plus souvent pertinente­s d’ailleurs, qui déclinent les différents volets de l’économie informelle, son poids supposé par rapport au PIB, le dol subi par le fisc ou encore la violation des droits les plus élémentair­es des travailleu­rs employés par ces négriers des temps modernes!

Il est certes légitime de penser aux diverses solutions qui pourraient permettre de « formaliser » ces entreprise­s clandestin­es, aux moyens de transférer vers le secteur officiel des unités qui sont dans les faits connues de certaines autorités qui « ferment les yeux » sur leur existence pour diverses raisons.

Mais l’horreur de ce drame survenu à Tanger, la responsabi­lité directe de plusieurs personnes, propriétai­re de l’usine, autorités locales, etc., commandent d’abord et avant tout une réaction faite de sévérité exemplaire afin que tous ceux qui s’adonnent à des activités illégales de cette nature et de cette ampleur réfléchiss­ent aux sanctions et peines qu’ils encourent.

Pour atténuer la peine des familles endeuillée­s, pour la mémoire de ces victimes innocentes, pour le Droit et la Justice, des têtes doivent tomber rapidement et avec la plus grande diligence.

Ainsi, peut-être, la douleur, l’émoi et l’indignatio­n que nous ressentons tous, seront quelque peu apaisés

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