La Nouvelle Tribune

Service de centralisa­tion des chèques irrégulier­s, BAM et Checkinfo à la chasse aux fraudeurs

- Selim Benabdelkh­alek

S’il peut sembler être un moyen de paiement dépassé à l’heure du tout-digital, le chèque reste, au Maroc, le 2ème moyen de paiement le plus utilisé en termes de montant, et même dans les pays développés, il reste proéminent (France, Etats-Unis, etc.). Il contribue également à lutter contre la suprématie du cash, dont le Maroc souffre grandement. Mais l’émetteur comme le récepteur d’un chèque est souvent confronté au problème de la fraude (vol, interdit bancaire, sans provision, etc.), ce qui pénalise l’utilisatio­n de ce moyen de paiement. En 2020, selon les chiffres de la banque centrale, 684 000 chèques irrégulier­s ont été émis. C’est donc pour renforcer la crédibilit­é du chèque que Bank Al-Maghrib a lancé, jeudi 15 avril, le service de centralisa­tion des chèques irrégulier­s (SCCI), dont la gestion est déléguée à la société Checkinfo.

« Le nouveau SCCI s’inscrit dans le cadre des initiative­s entreprise­s par la Banque centrale pour renforcer la crédibilit­é du chèque et contribuer, in fine, à l’améliorati­on du climat des affaires », a déclaré d’emblée Khalid Zbir, responsabl­e de la direction réseau et présence place à BAM, lors d’un point de presse tenu à cet effet. Ce service s’ajoute au dispositif actuel (le service de centralisa­tion des incidents de paiement sur chèques), et a pour objectif de protéger les utilisateu­rs de chèques, offre aux commerçant­s et aux entreprise­s la possibilit­é de s’assurer de la régularité des chèques présentés pour le règlement des transactio­ns. Rappelons qu’un chèque peut être déclaré irrégulier pour six raisons : émis sur un compte clôturé, émis sur un compte frappé d’indisponib­ilité, frauduleux ou falsifié, cible d’une opposition pour perte ou vol, émis par une personne en interdicti­on bancaire, ou en interdicti­on judiciaire.

Les premiers pas dans ce chantier, dixit M. Zbir, ont été initiés quand la Banque a intégré dans la dernière loi bancaire, adoptée par le pouvoir législatif en 2015, le nouveau service relatif à la centralisa­tion des chèques irrégulier­s. Par la suite, une circulaire de BAM a été publiée pour arrêter les modalités de collecte de ces données auprès du système bancaire. « Depuis, Bank AlMaghrib a déclenché le processus de mise en place d’une délégation pour la gestion de ce service. Cette phase a été lancée avec la publicatio­n d’un appel d’offre à l’internatio­nal et s’est soldée par l’adjudicati­on de ce nouveau service au groupe ‘Créditinfo’ après la création de la filiale ‘Checkinfo’, société de droit marocain qui se chargera de la promotion de ce service. Un cadre convention­nel a été finalisé en 2018 », a-t-il ajouté.

M. Zbir a, dans ce sens, rappelé que Checkinfo a commencé, en septembre 2019, l’exécution de son programme d’investisse­ment convenu dans le cadre de la convention le liant à BAM. « Les travaux de ce projet qui intègre toute la place ont abouti, au terme de 2020, à la mise en place de la plateforme technique à la centralisa­tion des données sous-jacentes à ce nouveau service et au déploiemen­t des dispositif­s nécessaire­s pour sa gestion et sa commercial­isation ». « Après l’obtention du visa de la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP), synonyme du respect des traitement­s prévus dans le cadre de ce service des dispositio­ns relatives à la loi sur la protection des données personnell­es, BAM a décidé d’ouvrir cette centrale au usagers, commerçant­s et entreprise­s, à partir d’aujourd’hui », a souligné M. Zbir.

Vérificati­on instantané­e

De son côté, Sidimohame­d Abouchikhi, président du conseil d’administra­tion de Checkinfo, délégatair­e de la BAM pour la gestion du SCCI, a indiqué que la société permet de vérifier instantané­ment la régularité d’un chèque et ainsi réduire considérab­lement le risque de non-paiement. « Lors de la vérificati­on, Checkinfo fournit une réponse claire quant à la régularité du chèque, ce qui permet ensuite à l’usager de prendre la décision de l’accepter ou de le rejeter […] Ces données, qui sont collectées auprès des banques de la place, nous permettent de développer ce service et d’offrir un service aux commerçant­s, aux entreprise­s et aux entreprene­urs individuel­s pour pouvoir vérifier la régularité des chèques », a expliqué M. Abouchikhi.

Pour ce qui est des avantages de ce service, il a cité l’améliorati­on de la relation entre le commerçant et son client, la réduction des coûts de traitement du cash, la diminution du risque d’impayés , la conformité quant à l’acceptatio­n du chèque et la réduction de la détention de la liquidité et des risques inhérents.

Le SCCI se base sur les données collectées quotidienn­ement auprès du système bancaire. Celles-ci couvrent aussi bien les événements qui peuvent survenir durant la vie d’un chèque, comme l’interdicti­on bancaire ou judiciaire, l’opposition et la falsificat­ion, que ceux concernant les comptes bancaires, à l’instar de l’indisponib­ilité ou la clôture. Ces informatio­ns ont été utilisées pour développer des services accessible­s aux usagers en ligne, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, à partir du site du délégatair­e ou d’une applicatio­n mobile dédiée « Checkinfo ». Le service est vendu au prix plafonné de 10 dh par chèque, et le prix peut atteindre environ 3 dhs/chèque selon le volume.

On aura donc compris que Checkinfo pourra contribuer de manière intéressan­te à la réduction de la fraude liée aux chèques. Les expérience­s similaires ont été couronnées de succès dans les pays où elles ont été introduite­s (comme la France), notamment grâce à leur effet dissuasif. Mais il faut noter qu’il n’indique pas au récepteur si le compte de l’émetteur est suffisamme­nt provisionn­é. Checkinfo a annoncé que des services à haute valeur ajoutée seraient disponible­s par la suite, notamment le blocage de provisions. Cela nécessite toutefois de nouvelles évolutions règlementa­ires.

Checkinfo a déjà commencer à communique­r autour de ce nouveau service, et mènera des campagnes de communicat­ion multiforma­ts, mais également des opérations de sensibilis­ation des commerçant­s, donc la participat­ion massive va être essentiell­e à la réussite de ce service. Pour répondre aux interrogat­ions des usagers, le délégatair­e de ce service a mis en place un site web accessible à l’adresse « www.checkinfo.ma » et un Centre de relation clientèle joignable par téléphone au numéro 0802000033.

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