La bourse et la guerre
En ce début de semaine, les marchés financiers occidentaux ont cru vivre un lundi « noir », cet adjectif associant les crises financières à un krach boursier.
Certes, l’ampleur de la correction connue par tous les marchés financiers ne justifie pas encore ce terme catastrophique, mais un constat s’impose, les Bourses occidentales et asiatiques ne résisteront pas à l’inflation, un mal qui avait disparu depuis 30 ans et qui se traduit par la flambée des prix du pétrole, du gaz, de l’électricité ou du blé et qui risque de s’étendre à d’autres produits du fait de leur rareté.
Tous les indices boursiers occidentaux, le CAC français, le Dax allemand, le FTSE anglais, le Dow Jones newyorkais, connaissent tous des pertes qui contrastent avec leurs bonnes performances des deux années précédentes où elles ont défié la crise de la pandémie de la COVID 19. Pour ne prendre qu’un exemple, le CAC 40 a perdu 20 % par rapport à son record historique du 5 janvier dernier.
Sur les bourses, la panique se traduit par une volatilité dont l’indice occidental, qui est à un haut niveau de 60, témoignant d’une réelle peur des investisseurs.
Or, depuis ce mardi, avec l’annonce par les États-Unis d’un embargo sur le pétrole et le gaz russe (bien qu’ils n’en importent que très peu), le prix du baril de pétrole a dépassé la barre des 130 dollars. Sachant que certains pays européens, « alliés » des ÉtatsUnis, envisagent aussi d’interdire les importations de pétrole russe, la flambée des prix du baril et du gaz devient irréversible.
Pour les investisseurs, l’accélération de l’inflation s’accompagnera d’une correction drastique de la croissance économique, faisant tomber les pays occidentaux dans une stagflation, avec le retour d’un choc énergétique qui est en effet, assez fort pour annihiler la croissance de l’économie mondiale, qui touchera tous les pays, des plus riches aux plus pauvres, les États-Unis y compris.
Preuve en est que les bourses asiatiques sont aussi en chute libre avec des pertes de plus de 4% par jour. Du Nikkei à Tokyo, au Kospi à Séoul, au Shanghaï Composite chinois et au Hang Seng à Hong Kong, tous sont en perte de vitesse.
Les sociétés et groupes cotés en bourse qui risquent de souffrir de la hausse des cours du pétrole voient leur cours dégringoler. La méfiance s’aggravera avec le retard des négociations avec d’autres pays producteurs de pétrole comme l’Iran qui pourraient prendre la relève de la Russie.
Car, avant même que l’embargo sur le pétrole russe adopté par Washington risque de se généraliser, les flux de pétrole russe ont déjà beaucoup baissé, instaurant une vraie inquiétude de rareté. Les grands groupes pétroliers européens ne s’approvisionnent plus en Russie car la hausse des prix de transport et les primes d’assurance liées à la guerre, compliquent considérablement les transactions et risque de propulser à plus de 150 dollars le prix du baril dans un avenir proche, voire 180 dollars d’ici la fin de l’année. En conséquence, un baril à 200 dollars est aujourd’hui envisageable…
Pour toutes ces raisons et d’autres encore, les marchés financiers occidentaux resteront perturbés faute de bonnes nouvelles susceptibles de les calmer.
L’inflation, résultat de la flambée des prix du pétrole, gaz et autres matières premières, pèse lourdement sur la croissance économique partout dans le monde, poussant toutes les économies vers une récession structurelle, après l’effet de rattrapage de croissance réalisé en 2021. Les banques centrales dans cette crise ne pourront faire prévaloir aucune politique de soutien, pas même de maintenir les taux d’intérêt à des bas niveau ! Cette situation d’incertitude et la correction à la baisse des marché financiers, entrainent sans surprise une appréciation des valeurs refuges comme l’or dont l’once d’or a franchi le seuil des 2.000 dollars, ou encore le Franc Suisse qui s’approche de la parité de 1 pour 1 avec l’Euro, une première depuis 2015.
Le Maroc, en tant que pays partenaire de l’Europe, et sa Bourse, alors même qu’elle reste domestique et n’a pas à sa côte des sociétés directement concernées, subiront les effets du choc pétrolier et de la crise économique, aussi fortement. Il faut savoir cependant, que les premiers indices de cette dernière, ne sont guère la baisse des indices boursiers, comme on l’entend dire, même si la méfiance des investisseurs en bourse se traduit de la même façon sur tous les marchés par la vente.