La Nouvelle Tribune

La Fin de l’économie libérale ?

- Afifa Dassouli

Nombre d’économiste­s s’accordent à dire que l’économie libérale est en panne, que les marchés ne fonctionne­nt plus, comme c’est le cas en particulie­r de celui des énergies où les prix s’imposent à la hausse, ne résultant plus de la confrontat­ion de l’offre et de la demande. De même qu’ils font le constat que l’inflation n’est plus maitrisabl­e par les politiques monétaires traditionn­elles et que les États ne peuvent la contrer sans engendrer ou aggraver la récession économique. En effet, les États, ne pouvant plus s’appuyer sur les règles et lois économique­s, naviguent à vue. Tous investisse­nt plusieurs milliards dans les soutiens aux citoyens, mais la précarité n’est plus réservée aux plus pauvres, les classes moyennes sont de plus en plus touchées. Les États intervienn­ent pour résoudre conjonctur­ellement les problèmes du quotidien de tout un chacun comme fournir le gaz à l’approche de l’hiver ou encore assurer l’approvisio­nnement alimentair­e tout en maitrisant les prix autant que possible, en impliquant les entreprise­s, les poussant à baisser leurs marges pour compresser leurs prix de vente. Les interventi­ons étatiques, puisqu’il ne s’agit plus que de ça, visent à maitriser les prix des carburants à la pompe, augmenter les salaires, taxer les groupes qui profitent de la conjonctur­e inflationn­iste dans certains secteurs notamment des produits énergétiqu­es, des transports et de la logistique. Autant d’actions de survie !

Face à ces réalités économique­s et les constats de pertes de repères, qui s’imposent à tous les pays du monde, les pays occidentau­x ne cherchent des solutions que pour eux-mêmes et la solidarité, quand elle joue, reste interne à ce même groupe. Le reste du monde, déjà en difficulté­s politiques et économique­s avant la pandémie sanitaire et qui s’est engouffré dans une crise économique profonde avec cette dernière, est aujourd’hui face à une inflation indomptabl­e qui fait fondre les revenus des citoyens, les richesses des entreprise­s et les budgets publics. Entre ses pairs, le Maroc, en tant que «petite économie» n’est pas à l’abri et n’est pas épargné.

Certes, lorsque les prix des produits énergétiqu­es s’enflamment, c’est le cas de le dire, le budget de l’État profite de leur impact positif sur les frais de douanes et la fiscalité des entreprise­s pétrolière­s. Quand les matières premières flambent, on se frotte les mains parce que l’OCP engrange une croissance de son chiffre d’affaires exorbitant­e en valeur uniquement car les quantités exportées par cet important acteur économique ne suivent pas la même tendance. Mais, l’impuissanc­e de l’État se ressent face à une inflation importée d’envergure et ses conséquenc­es sur l’économie réelle. Car comme partout ailleurs, les entreprise­s de tous les secteurs souffrent de la rareté et de l’inflation, connaissen­t une récession effective de leur activité. Cette même inflation touche sévèrement les citoyens et tout particuliè­rement la classe moyenne qui jouait un rôle économique important par la dynamique de sa consommati­on, et qui ne peut plus supporter le poids d’une augmentati­on des prix généralisé­e et exacerbée. Si pour l’Aid Al Adha, le coût du mouton a atteint des prix inabordabl­es de plus 5 000 dirhams la tête, aujourd’hui avec la rentrée scolaire, la classe moyenne se trouve face à une appréciati­on de toutes les charges en même temps, des frais de scolarité à ceux des fourniture­s scolaires, en passant par le renouvelle­ment de l’habillemen­t des enfants. L’État a beau essayer de soutenir les population­s déshéritée­s, la sècheresse a aggravé leur situation, sachant que 40% de la population active vit de l’agricultur­e.

Au-delà de ces difficulté­s dont les acteurs économique­s souffrent manifestem­ent, les répercussi­ons de la multi-crise que connait le monde, risquent d’être encore plus sévères sur notre économie dans les mois à venir. Car non seulement, la rareté et l’inflation qu’elle engendre, touchent à tous les intrants de toutes les activités productric­es, mais les marchés donneurs d’ordre, du Maroc, connaissen­t des changement­s profonds qui impacteron­t négativeme­nt notre économie.

D’autres économies dites émergentes, connaissen­t déjà, une crise économique caractéris­ée par une forte dépression avec l’aggravatio­n du chômage, associée à une inflation à deux chiffres. Mais aussi, une dépréciati­on de leurs monnaies et une crise financière et budgétaire sans précédent. C’est le cas de la Turquie, des pays d’Amérique du Sud, d’Asie, et aussi et surtout d’Afrique sans distinctio­n des plus riches d’entre eux.

Chez nous, la baisse drastique des crédits à l’investisse­ment, le maintien du prix de l’essence à 15 dirhams sont en soi des signes d’une stagnation économique, surtout que la crise énergétiqu­e devient un frein économique de taille.

Dans ce contexte difficile le budget de l’État se serre de plus en plus. Certes, il profite d’une hausse des recettes ordinaires de 20,4% provenant de l’augmentati­on des impôts directs de 26,9% et des droits de douane de 23,4%. Mais, ses dépenses augmentent en parallèle tout particuliè­rement du fait de l’augmentati­on des émissions de la compensati­on de 165,5%. Le déficit budgétaire à fin juillet se monte à 16,6 milliards de dirhams…

Des chiffres qui ne traduisent pas encore toutes les difficulté­s de l’État face à la dégradatio­n économique mondiale et régionale dont il est question…

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