À Marrakech, le transport routier face aux impératifs de la mobilité durable
Jeudi 6 octobre a été organisée à Marrakech la 4è édition de la Conférence Internationale sur la mobilité durable (CIMD), jumelée avec la conférence annuelle de la Fédération Routière Internationale (IRF), dont la présidence est assurée par le Maroc. Dans un contexte mondial où les impératifs du développement durable se font de plus en plus sentir face aux effets du changement climatique, et où le transport routier subit la forte pression des prix des carburants, le secteur routier dans son ensemble est appelé à relever de grands défis dans des délais relativement courts. C’était justement l’occasion occasion pour d’éminents intervenants politiques, institutionnels, économiques, techniques, scientifiques et associatifs, de partager leurs expériences et de débattre des stratégies futures à adopter ainsi que des nouveaux mécanismes de financement à explorer pour des actions efficaces en la matière.
Placée sous le thème « Décarboner, financer et digitaliser le secteur routier pour une mobilité et un développement durables », cette rencontre, qui avait été initiée en 2016 à la veille de la COP22, se veut être une véritable plateforme de dialogue pour l’ensemble des parties prenantes de la mobilité durable, venus échanger sur les politiques déployées, partager des expériences, capitaliser sur les bonnes pratiques, sensibiliser et enfin positionner durablement la mobilité comme une priorité nationale.
Il a donc été question, durant les travaux de cette journée, de la réalité de l’urgence climatique, mais aussi des solutions envisagées, et même parfois déjà implantées, pour rendre le secteur routier moins polluant. Rappelons déjà que le transport le 2ème plus gros émetteur de gaz à effet de serre, et que certaines économies avancées envisagent déjà la possibilité d’interdire les véhicules à carburant fossile d’ici 2035.
Lors de son discours d’introduction, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, M. Nizar Baraka a réitéré, lundi à Marrakech, l’engagement multidimensionnel du Maroc face à l’urgence climatique. « Le Royaume est profondément investi dans la lutte contre le changement climatique, malgré sa faible contribution aux émissions de gaz à effet de serre », a ajouté M. Baraka à l’ouverture des travaux Et de poursuivre que le Maroc a hissé au niveau international son niveau d’ambition, déjà élevé initialement, à un objectif conditionnel de réduction des gaz à effet de serre de 45,5% et un objectif inconditionnel de 18,3%, alors que la contribution déterminée au niveau national comprend 61 mesures pour un budget total de près de 40 milliards de dollars. « Sur la base des orientations du Nouveau Modèle de Développement ainsi que de l’Accord de Paris, le Maroc a élaboré une Stratégie Bas Carbone à Long Terme publiée en octobre
2021, qui vise 40% d’énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie et qui met en place l’électrification d’usages, la transition numérique, l’investissement dans le développement de nouvelles infrastructures de transport bas carbone, et l’intégration de l’hydrogène vert pour la décarbonation des transports, comme axes stratégiques de développement », a-t-il insisté.
De son côté, Anouar Benazzouz, DG d’Autoroutes du Maroc, et président de l’IRF, a rappelé que « la mission de l’IRF est le partage d’expertise, pour soutenir la durabilité et les évolutions réglementaires », notant qu’« à l’approche de la COP 27, il n’y pas de meilleur moment pour se réunir en tant que communauté et évoquer la décarbonisation, la digitalisation, et de manière générale la mobilité durable ». Pour ce faire, a-t-il poursuivi, « nous avons invité de nombreuses organisations soeurs », et « cette édition a un grand focus sur l’action, les best practices, l’innovation… ». Et d’insister sur le fait que vu les enjeux et les financements nécessaires, « transformer la mobilité requiert un changement systémique qui nécessite l’apport de tous ».
Pour clore les premières interventions, le président du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE), M. Ahmed Réda Chami, a relevé que « le Royaume a pu réaliser des progrès indéniables en matière de mobilité durable notamment avec des projets d’envergure, tels que la ligne du Train à Grande vitesse, les tramways, les bus électriques entre autres ».
Dans ce sillage, il a fait remarquer que le Maroc, qui importe actuellement 80% de ses besoins énergétiques, est fortement engagé pour réussir sa transition énergétique, qui est de nature à lui assurer sa souveraineté en la matière : « Le Maroc dispose d’un énorme potentiel des énergies renouvelables (solaire et éolienne), à même de lui permettre une croissance économique durable, de relever les défis de l’avenir et de réussir sa transition énergétique ». Selon M. Chami, le potentiel de production énergétique du Maroc, grâce au renouvelable, est équivalent à celui du Venezuela ou du Nigéria, qui ont de larges réserves d’énergie fossile. Et d’ajouter que les études montrent que le Maroc pourra devenir l’un des pays pionniers en matière de production de l’hydrogène vert grâce notamment, au Partenariat Public-Privé (PPP). La journée s’est poursuivie par une succession de panels, durant lesquels experts et décideurs ont abordé les mutations du secteur routier et les mécanismes pour les financer, ainsi que des ateliers de démonstrations où des startups du secteur présentaient leurs innovations pour contribuer à la mobilité durable. La mutation du transport routier pour le conformer aux enjeux du développement durable est un chantier colossal qui nécessite d’énormes budgets, mais également une volonté d’agir de toutes les parties prenantes, de la sphère politique aux usagers de la route…