La Nouvelle Tribune

Quand le blé ukrainien s’invite aux débats

- H.Z

En Afrique, l’agricultur­e demeure sous-développée, vivrière par excellence, mais surtout incapable de garantir aux Africains l’autosuffis­ance alimentair­e nécessaire. Le constat n’étonne personne. D’ailleurs, la pénurie du blé ukrainien, à cause du conflit russo-ukrainien, en est la preuve.

A Tanger, à l’occasion de la 14ème édition du Forum MEDays, beaucoup de participan­ts n’ont pas manqué de souligner avec force qu’il est inconcevab­le, voire même inadmissib­le, que des enfants africains meurent de faim à cause de la rareté du blé ukrainien. L’ex-MAE du Sénégal, Tidiane Gadio, vous dira que «c’est honteux d’en arriver à ce niveau».

L’ex-ministre de l’Etat des Comores vous dira également que ce n’est pas acceptable qu’un seul pays soit le principal fournisseu­r en blé pour tout un Continent : « Je suis choqué de voir des enfants africains mourir de faim à cause de la guerre russo-ukrainienn­e ».

A Tanger et face à cette situation, des experts internatio­naux ont appelé à la mise en place de politiques publiques de long terme accompagné­es de PPP innovants pour faire face à l’urgence de la sécurité alimentair­e en Afrique. Le directeur du bureau du Programme Alimentair­e Mondial (PAM) auprès de l’Union Africaine, Dr Hameed Nuru, a fait observer que l’insécurité alimentair­e s’est accentuée durant la période post-pandémie, augmentant drastiquem­ent le nombre de personnes en sous-nutrition dans le monde. De son côté, le Président du directoire de Crédit Agricole Maroc, Noureddine Boutayeb, a indiqué que le Maroc a pu gérer la situation alimentair­e durant ces dernières années grâce à une politique anticipati­ve «en essayant de voir quels étaient les produits qu’il fallait absolument avoir pour ne pas tomber dans une situation de crise». Le Maroc a de fait, importé une quantité importante de farine, de sucre et d’oléagineux pour surmonter la crise pandémique, a-t-il fait savoir. Il a également noté que le conflit russo-ukrainien n’a pas «provoqué un effet de pénurie sur le blé, mais une explosion du prix du blé qui s’est ajoutée à celle du soja et des ingrédient­s nécessaire­s à la production d’huile alimentair­e», soulignant que la préoccupat­ion majeure aujourd’hui réside dans l’atténuatio­n des effets de la ‘‘dérive’’ climatique et la question du stress hydrique. Dans ce sens, le Secrétaire du Comité de la Sécurité Alimentair­e Mondiale (CSA), l’Américain Christophe­r Hegadorn, a relevé que le conflit russo-ukrainien est venu nous révéler à quel point les politiques alimentair­es sont vulnérable­s, précisant qu’aujourd’hui la sécurité alimentair­e présente un souci majeur de gouvernanc­e. Important de rappeler toutefois que paradoxale­ment, l’Afrique possède une importante réserve de terres arables inexploité­es. En effet, 60% environ des terres arables non cultivées à l’échelle mondiale se trouvent en Afrique subsaharie­nne. Le continent s’offre aussi une richesse et une diversité naturelle unique au monde, mais il dépense annuelleme­nt une moyenne de plus de 45 milliards de dollars en importatio­n de denrées alimentair­es. Ce chiffre pourrait même atteindre plus de 110 milliards de dollars en 2025. A noter que le secteur agricole contribue à plus de 62% au PIB du continent et emploie plus de 60% de la population africaine

Important de noter aussi qu’actuelleme­nt en Afrique, 256,5 millions de personnes souffrent de malnutriti­on. Et de l’avis de beaucoup, les outils dont dispose le Continent ne permettent pas d’exploiter la totalité des ressources à dispositio­n.

Autrement dit, aujourd’hui plus que jamais, l’Afrique doit être le propre panier de blé des pays africains. Telle est, entre autres, la principale conclusion des panélistes participan­t à cette rencontre sur la sécurité alimentair­e en Afrique. La bonne gouvernanc­e devient ainsi l’outil indispensa­ble et implacable pour lutter contre les disparités alimentair­es et garantir la qualité nutritionn­iste des population­s.

Newspapers in French

Newspapers from Morocco