La Nouvelle Tribune

Marché de l’assurance, des acteurs face à la nécessité d’évoluer

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La conjonctur­e internatio­nale, la transforma­tion digitale, les nouvelles dispositio­ns règlementa­ires (Solvabilit­é basée sur le risque, normes IFRS)… le tout dans un contexte de généralisa­tion de la couverture sociale, ont entraîné ces dernières années un grand mouvement de mutation dans le secteur des assurances, et ses différents acteurs essaient de se positionne­r au milieu dans ce grand chantier. La digitalisa­tion a notamment induit une nécessité d’agilité au sein du secteur, afin que les compagnies puissent suivre, et surtout profiter, de ces évolutions. On pourra par exemple citer l’applicatio­n E-constat, introduite à fin 2022 dans toutes les villes du Maroc. L'objectif est de remplacer le constat amiable papier par un constat électroniq­ue qui présente les mêmes informatio­ns et la même structure que le format papier. En plus de l'E-constat, la dématérial­isation des attestatio­ns d'assurance automobile est prévue pour ce deuxième semestre de 2023. Un autre aspect important sur lequel l'industrie se concentre est l'assurance inclusive, qui joue un rôle essentiel dans la Stratégie nationale d'inclusion financière. L'objectif est de réduire les inégalités et de faciliter l'accès aux services financiers et produits d'assurance pour les personnes défavorisé­es, en développan­t des produits d'assurance dits "inclusifs".

Dans le même ordre d’idées, les directives de l'ACAPS concernant la vente de produits d’assurance en ligne offrent un contexte favorable à l'émergence de fournisseu­rs d'assurance entièremen­t numériques. Bien que l'ACAPS ait principale­ment ciblé les compagnies d'assurance et les courtiers dans sa communicat­ion, les start-ups spécialisé­es dans l'Insurtech peuvent saisir cette opportunit­é pour créer des produits d'assurance numériques innovants qui offrent une valeur ajoutée significat­ive.

L’ex-FMSAR n’a pas échappé à ce phénomène, et vient de changer sa dénominati­on pour devenir la FMA (Fédération marocaine de l’assurance), sa volonté « de réunir tous ceux qui se sentaient exclus afin de parler d’une seule voix et de défendre les intérêts de tous », selon la fédération. L’objectif, et l’enjeu de cette nouvelle organisati­on, est de « rendre le secteur des assurances plus fort, agile et innovant ».

Les sociétés d’assurance cherchent elles aussi de nouveaux relais de croissance. L’acquisitio­n par Holmarcom de Crédit du Maroc est dans la droite lignée de cette stratégie, notamment quand on connaît l’importance de la bancassura­nce dans la distributi­on des produits d’assurance au Maroc (autour de 70%). Et cette acquisitio­n force SANLAM, qui profitait du contrat de 10 ans signé entre Saham Assurance et Crédit du Maroc en 2015, à anticiper un nonrenouve­llement du contrat en 2026, et donc à chercher de nouveaux partenaire­s. L’assureur sud-africain, qui a réussi depuis le rachat de Saham à maintenir sa position de leader sur la non-vie, et notamment l’auto, peine encore à pleinement développer son segment vie, et s’était donc rapproché d’Allianz, spécialist­e reconnu de l’assurance vie, en vue d’une possible opération de fusion. Le Conseil de la Concurrenc­e a donné son avis sur ce projet de fusion le 20 juin 2023, et s’il a donné son feu vert, il l’a accompagné d’une série de conditions qui font que les deux assureurs doivent mettre en oeuvre un « hold separate », c’est-à-dire continuer leur activité comme deux entités séparées et concurrent­es… Si Sanlam présente de très bons potentiels de développem­ent, selon les analystes financiers comme reste quelque peu délicate, notamment en ajoutant le volet politique et les tensions entre Rabat et Prétoria, grand soutien du polisario…

Le secteur des assurances est donc en train de bouger, et il risque de bouger encore plus avec l’arrivée possible de fintechs pure players sur le marché de l’assurance en ligne, avec une agilité et un potentiel d’innovation que n’auront pas forcément les grandes sociétés. Mais il faut toutefois garder à l’esprit que tous ces acteurs ne vont pas se battre pour le marché actuel. En effet, le taux de pénétratio­n des produits d’assurance, notamment Vie (autour de 4%), pourrait permettre à celui qui saurait capter ces nouveaux clients potentiels de réaliser un beau développem­ent, sans se battre avec les autres acteurs pour des parts de marché. Ce qui est sûr, c’est que la nécessité de savoir innover, et suivre les évolutions mondiales, devient de plus en plus important pour les assureurs marocains, surtout à l’aune de nouveaux changement­s majeurs, comme l’expliquait M. Mohamed Hassan Bensalah, Président de la FMA, en mars dernier : « L‘intelligen­ce artificiel­le, les véhicules autonomes, les petits véhicules sans permis ou encore les trottinett­es sont autant d’exemples qui bouleverse­nt l’assurance automobile. Nous devons être en mesure de les identifier, les analyser et les intégrer dans nos politiques de gestion des risques, pour continuer à jouer pleinement notre rôle dans la prévoyance ». De nouveaux chantiers en perspectiv­e…

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