La Nouvelle Tribune

Gouverneme­nt Malgré la pluie, la fronde s’organise

- Zouhair Yata

La pluie au Maroc est plus qu’un bienfait, c’est un catalyseur de l’unité nationale et de la conviction que notre pays a la « baraka », encore plus en cette période religieuse ô combien cruciale pour nos concitoyen­s. Les barrages se remplissen­t, les cimes des montagnes se couvrent de neige, les plaines verdissent et les pâturages se multiplien­t, nous donnant presque l’impression de revenir à une période où le changement de saison avait un sens.

Providenti­elles, les pluies le sont aussi pour nos dirigeants et le gouverneme­nt en particulie­r, qui y voit aussi un soulagemen­t temporaire de la pression, après de longs mois de tensions avec différents corps sociaux d’une part et l’impact de l’inflation sur le pouvoir d’achat et le moral des ménages marocains d’autre part.

Pour autant, parce que rien ne dure, après la pluie viendra le beau temps et celui-ci peut être synonyme de dossiers brulants à gérer pour le gouverneme­nt, sur le fond comme sur la forme. Du côté de l’opposition parlementa­ire par exemple, c’est une véritable fronde qui s’organise, d’après les informatio­ns fuitées par ceux qui ne préparent pas moins qu’une motion de censure contre le gouverneme­nt. Autant le dire d’emblée, il y a peu de chances que l’opposition, divisée comme elle l’est, réussisse à rassembler les 80 signatures pour déposer la motion et encore moins à obtenir 51% des suffrages au parlement pour la faire passer. Pour autant, il faut y voir plusieurs signes positifs d’une vie politique somme toute saine où nos représenta­nts s’activent à travers des mécanismes institutio­nnalisés, pour réclamer la reddition des comptes et la prise en compte des autres voix qui s’expriment.

En revanche, le risque est bien présent de basculer dans la politique politicien­ne, la démagogie et le populisme. D’abord, les partis d’opposition le sont déjà depuis très peu, et l’écrasante majorité des partis qui la composent ont été aux commandes récemment, certains pendant une décennie au moins. Difficile donc de se présenter comme porteur de changement ou de solutions efficaces quand on a autant contribué à éroder l’intérêt et la confiance des citoyens dans la parole politique. Mais, l’organisati­on récente de la quasi-totalité des congrès des partis d’opposition a clairement eu pour effet de galvaniser leur discours et leurs intentions. Sauf que, sur le fond des dossiers, certaines des prochaines échéances nécessiten­t une certaine maturité politique et une volonté constructi­ve de contribuer au débat pour arriver à un consensus national large et inclusif. Le gouverneme­nt a reçu notamment les recommanda­tions de l’instance chargée de l’étude de la prochaine réforme de la Moudawana et va logiquemen­t enclencher un processus de consultati­on parlementa­ire pour l’élaboratio­n du projet de loi. Or, ce sujet est particuliè­rement sensible et peut générer des frictions sociétales fortes voire des scissions dans l’opinion publique si l’opposition cherche plus à jouer son rôle de poil à gratter pour le gouverneme­nt, par opportunis­me politique et électorali­ste, que par conscience des enjeux portés par la réforme, initiée, faut-il le rappeler une nouvelle fois, par le Souverain.

Et, ce qui est inquiétant dans ce contexte et qui semble annoncer des canicules et des longs feux à éteindre pour le gouverneme­nt, ce sont les propositio­ns déjà transmises par certains partis d’opposition dans le cadre des consultati­ons de cette réforme. De fait, certaines propositio­ns sont diamétrale­ment opposées au sens même du mot réforme, puisqu’elles préconisen­t carrément un retour sur le (peu) d’acquis obtenus.

In fine, au-delà de la gestion du stress hydrique, de la politique d’attractivi­té touristiqu­e, de la réforme sociale en cours à différents niveaux, du SIAM, du GITEX et de tout ce qui fait l’actualité, le véritable test de la législatur­e menée par le Chef du Gouverneme­nt Aziz Akhannouch sera cette réforme de la Moudawana, éminemment politique et révélatric­e de la physionomi­e du Maroc de demain.

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