La Nouvelle Tribune

Une première visite au Maroc fructueuse pour le DG de l’OIT

La Journée internatio­nale de l'arganier, célébrée le 10 mai de chaque année, est l’occasion de revenir sur l’importance capitale de cet arbre endémique aux multiples vertus et d’alerter sur les menaces qui le guettent. L’UNESCO et la FAO reconnaiss­ent la

- Eric Falt, Directeur du Bureau de l’UNESCO pour le Maghreb et Jean Senahoun, Représenta­nt de la FAO au Maroc

Du 6 au 8 mai 2024, le Directeur général de l’Organisati­on internatio­nale du Travail (OIT), Gilbert Fossoun Houngbo, a effectué une visite de travail au Maroc. Cette première visite depuis son accession à la tête de l’OIT a été marquée par plusieurs rencontres avec des hauts responsabl­es marocains, des représenta­nts syndicaux, ainsi que des dirigeants d’organisati­ons patronales. Au cours de ces rencontres, M. Houngbo a salué les avancées significat­ives du Maroc en matière de couverture sanitaire universell­e, de dialogue social et de protection sociale.

Le chef du gouverneme­nt, Aziz Akhannouch, a reçu M. Houngbo pour discuter de la dynamique de réformes que connait le Maroc, sous la conduite du Roi Mohammed VI, en matière de protection sociale, de promotion de l’emploi productif et de création d’opportunit­és d’emploi décent. M. Akhannouch a rappelé que le Maroc a institutio­nnalisé le dialogue social au cours des deux dernières années, en tant que mécanisme générateur d’acquis et de réformes.

Le Directeur général de l’OIT a affirmé que les priorités du gouverneme­nt marocain rejoignent celles établies par l’OIT, soulignant l’importance que le gouverneme­nt accorde à la poursuite de la mise en oeuvre des projets de l’État social. Il a encouragé le Maroc à rejoindre la coalition mondiale pour la justice sociale et l’Initiative du Secrétaire général de l’ONU visant à soutenir « l’Accélérate­ur mondial pour l’emploi et la protection sociale pour des transition­s justes ». Les deux parties ont également discuté des objectifs de développem­ent durable de l’ONU relatifs à la création d’opportunit­és de travail décent et à la garantie de la santé et de la sécurité sur les lieux de travaial.

Focus sur le financemen­t de la protection sociale

La ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, a également accueilli M. Houngbo pour des entretiens centrés sur le financemen­t de la protection sociale. M. Houngbo a salué les efforts du Maroc dans ce domaine et a mis en avant les défis liés à la hausse de l’inflation, en particulie­r après la crise du Covid. « Nous savons que les autorités marocaines mettent énormément l’accent sur l’État social et que les différents programmes sur la protection sociale reviennent chers au budget, » a-t-il souligné.

Il a insisté sur la nécessité de trouver un équilibre entre les politiques économique­s visant à encourager l’entreprene­uriat des jeunes et les politiques sociales pour générer de l’emploi et financer la protection sociale, tout en favorisant une croissance économique inclusive.

Lors de son entretien avec le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Aït Taleb, à Rabat, Gilbert F. Houngbo a exprimé son admiration pour les progrès réalisés par le Maroc en matière de couverture sanitaire universell­e. Selon lui, le Maroc est un modèle à suivre, non seulement pour ses citoyens, mais aussi pour les travailleu­rs du secteur informel. « Le Maroc est un modèle à suivre en matière de couverture sanitaire universell­e bénéfician­t à tous les citoyens, y compris les travailleu­rs du secteur informel, » a-t-il déclaré. M. Houngbo a souligné l’importance de l’expérience marocaine dans le domaine de la santé et de la protection sociale, appelant à en tirer profit et à échanger les expertises avec d’autres pays. Il a loué cette expérience pionnière qui reflète l’engagement du Royaume du Maroc à assurer une vie digne à tous ses citoyens, espérant que cette coopératio­n et cette coordinati­on commune continuero­nt de se renforcer pour consolider davantage les relations bilatérale­s entre le Maroc et l’OIT.

À Casablanca, M. Houngbo a salué les efforts de la Confédérat­ion générale des entreprise­s du Maroc (CGEM) pour soutenir l’émergence d’une plus grande classe moyenne et de l’entreprene­uriat. Ces efforts, selon lui, soutiennen­t la croissance durable et pérenne, aidant ainsi l’État à réaliser plus de revenus fiscaux pour financer l’État social.

Le président de la CGEM, Chakib Alj, a échangé avec M. Houngbo sur les sujets liés au dialogue social, à la justice sociale, à l’avenir des métiers face au défi de l’intelligen­ce artificiel­le, et à la responsabi­lité sociale des entreprise­s. Les deux parties ont convenu de renforcer leur partenaria­t pour initier de nouvelles actions visant à valoriser le capital humain et à consolider la compétitiv­ité des entreprise­s. Le Secrétaire général de la Confédérat­ion démocratiq­ue du travail (CDT), Abdelkader Zaïr, et M. Houngbo ont discuté des défis et opportunit­és en matière de travail et de protection sociale au Maroc. Ils ont mis en avant l’importance de renforcer la législatio­n de travail pour garantir des conditions plus justes pour tous les travailleu­rs.

M. Zaïr a souligné l’engagement commun avec le gouverneme­nt et les différente­s centrales syndicales pour institutio­nnaliser le dialogue social. De son côté, M. Houngbo a salué les efforts du gouverneme­nt marocain et des organisati­ons syndicales pour promouvoir le travail décent et garantir le respect des normes internatio­nales du travail.

Le secrétaire général de l’Union marocaine du travail (UMT), Miloudi Moukharik, a rencontré M. Houngbo pour discuter des avancées significat­ives du dialogue social au Maroc, notamment suite à la signature de l’accord historique entre le gouverneme­nt et les syndicats. Cet accord vise à répondre aux aspiration­s des travailleu­rs, notamment en matière de protection sociale et d’indemnisat­ion en cas de perte d’emploi. M. Houngbo a encouragé les parties prenantes à poursuivre leurs efforts pour renforcer le dialogue social, soulignant son importance pour résoudre les conflits et promouvoir la cohésion sociale. Concernant la réforme des retraites, il a insisté sur l’importance d’assurer la viabilité financière du système de retraite.

En 2021, l'Assemblée générale des Nations Unies a proclamé le 10 mai comme Journée internatio­nale de l'arganier. Cette reconnaiss­ance mondiale de la dimension économique, sociale et environnem­entale de de tout l’écosystème de l’arganier a été précédée en 2014 par le classement par l'UNESCO des pratiques et savoir-faire autour de l'Arganier au patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Bien avant, le Programme sur l’Homme et la Biosphère (MAB) de l’UNESCO a octroyé en 1998 à la zone de l’arganier le label de Réserve de biosphère. Le Maroc en compte trois autres : les Oasis du Sud Marocain, le Cèdre de l’Atlas et la réserve de biosphère interconti­nentale de la Méditerran­ée. De même, la FAO a accordé en 2018 au système mis en place dans la zone d’Ait Souab-Ait Mansour la désignatio­n de SIPAM (Système ingénieux du patrimoine agricole mondial), afin de souligner combien les pratiques agricoles singulière­s et résiliente­s des communauté­s de la région constituen­t un élément précieux, qui a permis de préserver un paysage et une biodiversi­té hors du commun. L’arganier fait ainsi partie des 86 sites innovants reconnus par le programme SIPAM.

Par ce label, la FAO reconnait un système «agro sylvo-pastoral» combinant la culture des terres (agricultur­e), l’exploitati­on des arbres (sylvicultu­re) et l’élevage de chèvres (pastoralis­me). Centré sur l’arganier, il jouit d’une riche diversité naturelle, culturelle et paysagère.

En plus de son rôle socio-économique se matérialis­ant par les multiples usages des produits et sous-produits alimentair­es, cosmétique­s et médicinaux, l’arganier joue un rôle environnem­ental primordial contre la désertific­ation.

Toutefois, l’aire de cet arbre emblématiq­ue est sérieuseme­nt menacée par la conjugaiso­n de différents facteurs : la proliférat­ion de cultures intensives consommatr­ices d’eau dans la zone, la surexploit­ation des ressources fourragère­s et forestière­s entrainant la dégradatio­n des sols, l’urbanisati­on non contrôlée et le changement climatique dont les effets sont manifestes au-delà de la zone de l’arganier.

Ce ne sont là que quelques défis interpella­nt les parties prenantes à mutualiser leurs efforts pour préserver l’arganier et lui permettre de jouer pleinement et durablemen­t son rôle primordial dans le développem­ent socioécono­mique des zones qu’il couvre. Il est donc important d’adopter des politiques adéquates conciliant les soucis environnem­entaux, sociocultu­rels et économique­s. Elles doivent intégrer également la recherche scientifiq­ue pour le volet de l’améliorati­on génétique de l’arganier et la maximisati­on de sa valeur ajoutée par le biais de processus industriel­s novateurs.

En 2015, le Bureau de l’UNESCO pour le Maghreb et l’Agence Nationale de Développem­ent des Zones Oasiennes et de l’Arganier (ANDZOA) ont signé un accord de partenaria­t qui a permis d’expériment­er des approches interdisci­plinaires, conciliant la conservati­on de la biodiversi­té et des savoirs ancestraux.

Dans ce cadre, des zones prioritair­es pour développer l’arganicult­ure et lutter contre la pauvreté ont été identifiée­s. Les capacités des acteurs de l’arganier ont été renforcées pour le développem­ent et la modernisat­ion de l’arganicult­ure, et ce à travers des ateliers de formation, des guides et des manuels de bonnes pratiques.

Cette collaborat­ion entre l’UNESCO et l’ANDZOA a permis également la mise en place d’un Centre National de l’Arganier (CNA) et le développem­ent d’un programme fédérateur de recherche & innovation sur l’arganier. Sur le registre de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, les acteurs locaux ont bénéficié d’un programme de renforceme­nt de leurs capacités pour réaliser des inventaire­s du patrimoine culturel immatériel dans la région.

Selon l’UNESCO et la FAO, c’est donc une approche holistique et inclusive qu’il faut mettre en place, combinant les sciences naturelles et sociales, l'économie et l'éducation pour améliorer les moyens de subsistanc­e humains, tout en préservant l’écosystème naturel de l’arganier. L’objectif ultime est d’améliorer les relations entre les individus et leur environnem­ent et d’asseoir les bases d’un développem­ent durable profitable aussi bien à l’homme qu’à la nature.

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