Tous égaux face au bruit?
Qu’il s’agisse d’un vrombissement de moto, d’éclats de voix en pleine nuit, du cliquetis d’un ongle pianotant sur un coin de table, les exemples sont infinis et aboutissent à une certitude: non, nous ne sommes pas égaux face aux bruits qui nous assaillent. Face à un même éclat sonore, certains éprouveront de l’enthousiasme, d’autres de l’amusement ou le plus vif des agacements. Dans la balance?
«Une équation mêlant notre mémoire et tous les souvenirs sonores qu’elle recèle ainsi que notre état émotionnel au moment où le bruit survient. Et, bien souvent, en découle une anticipation que notre cerveau ne peut s’empêcher de réaliser, associant par exemple un claquement de portière à un cambriolage imminent si l’on a déjà vécu un tel événement», explique le Dr Stephen Perrig, neurologue et médecin adjoint au service de pneumologie, membre de l’équipe du centre de médecine du sommeil des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
Et chez certaines personnes, la conjugaison de ces facteurs aboutit à un état d’alerte excessif, les rendant irritables la journée et mettant en péril la qualité de leur sommeil la nuit. «Pendant le sommeil, quand nos yeux sont fermés, que notre système moteur et somatosensoriel (système captant les messages sensoriels à la surface du corps, ndlr) n’est pas sollicité, nos oreilles, elles, restent «ouvertes» et le cerveau est à l’écoute. Il ne va alors ainsi cesser de scanner et de trier chaque information auditive, selon ce même prisme individuel alliant notamment état émotionnel et vécu», poursuit l’expert. Et c’est ainsi qu’un bruit passera inaperçu pour certains mais déclenchera un réveil brutal pour d’autres. Dès lors, de jour comme de nuit, les situations peuvent être extrêmes. De là à parler de pathologie? «Même si l’agacement pour certains bruits porte aujourd’hui un nom, la misophonie, on ne la considère pas comme une maladie en soi, mais plutôt comme un trouble derrière lequel peut se cacher autre chose, comme un traumatisme passé ou un état de stress excessif, indique le spécialiste. Quand la gêne devient trop envahissante, il ne faut pas hésiter à consulter, surtout lorsqu’elle affecte la qualité du sommeil, car les conséquences sur la santé sont pernicieuses mais bien réelles.»