Une pandémie pas si silencieuse…
Cela ne vous a probablement pas échappé, durant le premier semi-confinement, l’absence de trafic routier, aérien et ferroviaire était frappant. Résultat, un silence ambiant seulement troublé par le passage furtif des ambulances. Pourtant, derrière cette parenthèse de calme apparent, les nuisances intra-habitat ont, elles, augmenté. Le nombre d’appels à la police pour nuisances sonores a en effet explosé en 2020, où près de deux fois plus d’appels ont été constatés par rapport aux années précédentes. Les bruits de voisinage, travaux, fêtes, enfants… se sont soudain transformés en cauchemar. Surtout pour ceux pratiquant le télétravail. «La sensibilité est relative, et le besoin de se concentrer peut décupler un bruit anodin, le faisant paraître comme anormalement élevé», explique le Pr Idris Guessous, médecin-chef du service de médecine de premier recours aux HUG. Les nuisances sonores ne sont donc pas toujours celles que l’on croit…
Pendant six ans, Clémence* a vécu au sixième étage d’un immeuble donnant sur un carrefour conjuguant à lui seul cinq routes et deux voies de tram, tout en étant un axe prioritaire d’ambulances fonçant vers l’hôpital cantonal à toute heure du jour et de la nuit.
Dès le premier jour dans cet appartement, j’ai su que ça allait être difficile. Il s’agissait d’un studio; conséquence, mon unique fenêtre et mon balcon donnaient tous deux sur ce terrible carrefour. Aux bruits incessants des voitures freinant puis redémarrant aux feux rouges s’ajoutaient ceux des deux-roues et les fausses accélérations si irritantes de leurs conducteurs quand ils trépignent à l’arrêt, les sirènes des véhicules d’urgence se déclenchant souvent brutalement au moment où ils traversent ce genre d’intersection et les éclats de voix le soir, la nuit… La journée, ce brouhaha a fini par se muer en bruit de fond relativement supportable, à condition de laisser la fenêtre fermée. Car je devais choisir: aérer ou pouvoir travailler, regarder la télé, parler au téléphone sans hurler. La nuit, c’était terrible. Fenêtres ouvertes comme fermées, j’étais réveillée presque toutes les nuits. Il y avait les vrais réveils, à la suite desquels je mettais parfois de longues minutes pour me rendormir, et tous les autres, qui perturbaient mon sommeil sans me réveiller complètement mais qui m’épuisaient tout autant. Chaque soir, la perspective de mal dormir m’oppressait. Le plus difficile, c’est que ce bruit incessant est prévisible et brutal à la fois. Il peut vraiment devenir une souffrance en soi. Pour ma part, j’ai pu déménager juste avant d’en subir des conséquences trop graves. Aujourd’hui, je vis dans un appartement où règne un calme total et je savoure l’apaisement que peut procurer le silence.