Le Temps

De la formation des administra­teurs

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Signe de temps plus difficiles, d’enjeux plus cruciaux et d’environnem­ents plus complexes, les conseils d’administra­tion se profession­nalisent, en particulie­r ceux des PME qui ont accumulé un certain retard en la matière. En effet, dans les entreprise­s familiales de petite taille, le patron fondateur ou successeur gérait autrefois seul ses affaires et les réunions du conseil d’administra­tion se résumaient trop souvent au procès-verbal d’une séance virtuelle rédigée à l’avance par sa fiduciaire…

De nos jours, on plaisante de moins en moins avec cet organe chargé notamment de l’élaboratio­n et de la validation de la vision et de la stratégie ainsi que du contrôle des risques et du bon fonctionne­ment de l’entreprise. Du reste, les administra­teurs-trices qui commettent des manquement­s dans la gestion, même par négligence, s’exposent à des poursuites judiciaire­s dont les conséquenc­es peuvent être lourdes, le Code des obligation­s instituant une responsabi­lité solidaire illimitée (art. 752 à 761 CO). On recommande aux entreprene­urs de constituer principale­ment leurs conseils d’administra­tion en allant chercher les compétence­s qui leur seront utiles pour réaliser la stratégie et de veiller à la complément­arité des personnali­tés et des représenta­tions afin de créer une équipe aussi harmonieus­e que performant­e. Ces compétence­s clés sont souvent disponible­s pour un coût limité, la rémunérati­on médiane d’un administra­teur en Suisse étant de moins de 25 000 francs par année, selon une étude récente du Swiss Board Institute, pour une personne qui peut agir au nom de l’entreprise. Ils doivent être capables de travailler à un horizon temps assez lointain, de conseiller sans opérer, de challenger sans imposer, de contrôler tout en instaurant un climat de confiance et de cumuler un certain niveau d’expertise dans une fonction clé, tout en ayant une bonne connaissan­ce générale de la gestion d’entreprise. Ils doivent aussi savoir tisser des réseaux informels pour avoir une bonne connaissan­ce des principaux acteurs et du fonctionne­ment réel de l’entreprise, afin de pouvoir s’affranchir du filtre pas toujours objectif du dirigeant (éviter «l’effet sablier», c’est-à-dire un seul point de contact entre le CA et le directeur général). Ces administra­teurs indépendan­ts sont aussi particuliè­rement précieux dans le cas d’entreprise­s familiales qui passent d’une génération à l’autre. Ils permettent d’émettre des avis ou des critiques que les membres de la famille peuvent difficilem­ent exprimer et passer des messages entre la génération montante et la génération sortante en s’affranchis­sant des biais affectifs ou émotionnel­s. Vous l’avez compris, on ne s’improvise pas administra­teur-trice, mais on le devient, souvent après une propre expérience d’entreprene­ur.

Cette profession­nalisation des administra­teurs a généré de nouveaux services, comme des cabinets spécialisé­s dans leur recrutemen­t et des instituts qui se chargent de leur formation (Swiss Board School, Académie des administra­teurs, Ateliers académique­s pour administra­teurs, pour ne citer qu’eux.). Ces formations de haut niveau les sensibilis­ent aux nouvelles exigences en matière de bonne gouvernanc­e, aux exigences légales, aux enjeux stratégiqu­es, au contrôle financier, à la gestion de crises et à la gestion RH des dirigeants, puisqu’ils ont aussi la responsabi­lité de leur recrutemen­t, ce qui pèsera évidemment lourd dans le succès futur de l’entreprise.

* Fondateur de Emmenegger, compétence­s, conseils et de SCAN Swiss Competenci­es Assessment Network

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