Une réforme inutile et coûteuse
La LAMal fête cette année ses 20 ans d’existence. Elle avait atteint sa majorité en 2014, date de la dernière votation pour une caisse publique ou unique, rejetée par la population à plus de 60%. Le refus de cette troisième initiative populaire sur le sujet ancrait définitivement, du moins le pensait-on, la LAMal dans le paysage des 10 assurances sociales de notre pays.
Mais la FRC, au lieu d’admettre le verdict populaire comme il est d’usage en démocratie, a remis sans pudeur l’ouvrage sur le métier sitôt connu le résultat de la votation de 2014, en prenant en otage les 4 cantons romands dont une minorité importante de la population avait refusé la création d’une caisse publique. La FRC propose une nouvelle mouture d’une étatisation rampante de la santé et de l’accès aux soins sans même chercher des solutions aux défis qui nous attendent.
Il n’est pas inutile de rappeler que l’assurance maladie de soins obligatoire est le fruit d’une longue évolution trouvant son origine dans une loi entrée en vigueur en 1911 qui n’avait été révisée qu’une seule fois en 1964, les autres tentatives de la moderniser n’ayant pas trouvé l’approbation des citoyens, avant que le peuple n’accepte en 1994 la LAMal telle qu’elle est appliquée aujourd’hui et qui a élargi sensiblement les prestations.
L’assurance obligatoire des soins est une assurance sociale organisée au niveau national et non cantonal. Le catalogue des prestations et certains prix sont établis au plan national. Il en découle une solidarité nationale entre tous les assurés au sein d’une caisse maladie. Quel meilleur adage que «un pour tous, tous pour un» pour illustrer le principe de l’assurance et surtout d’une assurance sociale.
Durant toutes ces décennies, les caisses maladie ont fait la preuve de leurs compétences et de leur professionnalisme. Elles ont remboursé les prestations médicales consommées par leurs assurés, limité leurs frais administratifs afin de ne prélever que les primes nécessaires correspondant aux coûts de santé de leurs affiliés.
Les défis de l’assurance maladie à résoudre sont les augmentations inexorables des coûts dus notamment à l’évolution de la technologie, aux progrès de la médecine et au vieillissement de la population, qui représentent 95% de la prime que nous payons. La proposition de «caisse de compensation» de la FRC n’apporte aucune réponse à cette problématique. La FRC se cantonne à vouloir créer une structure intermédiaire supplémentaire qui augmenterait inévitablement la bureaucratie et les frais administratifs, qui s’élèvent aujourd’hui à 5% des primes, voire les impôts.
La FRC, qui s’en défendra, entend faire contrôler et surveiller les caisses maladie – tâches du département du conseiller fédéral Alain Berset – par le canton ou ses structures proches, non pas pour juguler l’augmentation des coûts, mais par refus de la décision démocratique. C’est pourquoi la FRC tire argument de la «chasse aux bons risques»: il s’agit de stigmatiser les caisses et leurs collaborateurs comme étant des vautours à l’affût de chaque assuré jeune et bien portant. Cet argument est simplement fallacieux, car c’est le citoyen qui décide auprès de quelle caisse il veut être assuré en fonction de ses besoins et non la caisse maladie.
La fixation des primes se fonde sur des prévisions. Elles sont établies pour l’année suivante en fonction des coûts de l’année précédente. Dès lors, cette prévision du besoin en primes n’est pas une science exacte, et le résultat effectif ne sera connu que l’année d’après. On est sincèrement en droit de se demander si la structure cantonale envisagée par la FRC serait plus à même de prévoir la prime nécessaire et ce qu’il adviendrait si elle était insuffisante pour payer les coûts des prestations médicales.
En tout état de cause, le remède proposé par la FRC ne va pas dans le sens d’une maîtrise des défis qui nous attendent, mais «revisite» une recette qui a été refusée plusieurs fois par le peuple en privant les assurés de choisir ce qui correspond le mieux à leurs besoins.