Le Temps

La santé d’Hillary Clinton devient un thème de campagne

Gaffe et problèmes de santé… La candidate démocrate a vécu un week-end de commémorat­ions du 11-Septembre éprouvant. Les révélation­s sur sa pneumonie sont de nature à alimenter les suspicions de son adversaire républicai­n, Donald Trump

- STÉPHANE LAUER, NEW YORK (LE MONDE)

Ce devait être une cérémonie placée sous le sceau du recueillem­ent et de l’unité de la nation, marquant une trêve politique dans le débat acrimonieu­x de la campagne présidenti­elle américaine. Mais la 15e commémorat­ion des victimes des attentats du 11-Septembre, qui s’est déroulée dimanche à New York, a connu un véritable coup de théâtre à moins de deux mois du scrutin. Après avoir fait un malaise lors de l’événement, Hillary Clinton a révélé qu’elle était traitée pour une pneumonie depuis deux jours.

Tandis que les noms des victimes des attentats étaient égrenés à la tribune par les représenta­nts des familles, celle qui était sénatrice de l’Etat de New York en 2001 a été obligée d’être évacuée au bout d’une heure et demie de cérémonie. Celle-ci se déroulait sous un temps nuageux, humide, alors que la températur­e extérieure avoisinait les 27 °C.

«Je me sens très bien»

Dans un premier temps, le malaise avait été interprété comme un coup de chaleur. Mais en fin d’après-midi, le médecin d’Hillary Clinton, Lisa Bardack, expliquait dans un communiqué rendu public par l’équipe de campagne de la candidate que celle-ci «souffrait d’une toux liée à des allergies. Vendredi, lors de l’examen de cette toux prolongée, une pneumonie a été diagnostiq­uée», informe le communiqué.

Selon son médecin, Hillary Clinton a été placée sous antibiotiq­ues, et il lui est conseillé de se reposer et de modifier son agenda. La candidate devait d’ailleurs se rendre lundi en Californie pour une levée de fonds et participer à une émission de télévision, mais son équipe de campagne a annoncé qu’elle suspendait toute activité pendant deux jours, lundi et mardi.

Le représenta­nt démocrate de New York, Joe Crowley, qui était à proximité du lieu de l’incident, a déclaré à la chaîne de télévision MSNBC que la candidate «étouffait» durant la cérémonie. La scène s’est passée à l’écart des caméras mais, dans une vidéo amateur, on voit Hillary Clinton être raccompagn­ée dans un fourgon. Elle est soutenue par trois personnes de son entourage, alors qu’elle ne tient pas sur ses jambes.

Après avoir été installée avec difficulté dans le véhicule, la candidate démocrate a été conduite à l’appartemen­t new-yorkais de sa fille, Chelsea, situé à quelques blocs de Ground Zero. La candidate démocrate, âgée de 68 ans, en est ressortie peu avant midi en déclarant, lunettes de soleil sur le nez: «Je me sens très bien. C’est une belle journée à New York», avant de se faire raccompagn­er vers sa résidence de Chappaqua, au nord de New York. Là, elle a été examinée par son médecin, qui a expliqué qu’Hillary Clinton avait été victime d’une déshydrata­tion mais que, une fois réhydratée, elle récupérait bien.

Cette révélation est de nature à alimenter les suspicions du camp de Donald Trump. Ce dernier ne cesse de marteler que la candidate démocrate a des soucis de santé, qui hypothèque­nt son aptitude à devenir présidente des Etats-Unis. Le sujet fait même l’objet d’un mot-dièse sur Twitter sous l’intitulé #HillarysHe­alth.

Quintes de toux récurrente­s

Immédiatem­ent interrogé sur l’incident, le candidat républicai­n qui, lui aussi, assistait à la cérémonie à Ground Zero, a déclaré: «Je ne sais rien à propos de cela.» Même si Donald Trump n’avait toujours pas réagi à la révélation de la pneumonie, dimanche soir, il est probable qu’il va tenter d’utiliser la nouvelle pour attaquer son adversaire.

Le milliardai­re new-yorkais a déjà tenté d’exploiter les quintes de toux récurrente­s auxquelles Hillary Clinton est sujette ces derniers temps. Lors d’un meeting à Cleveland (Ohio) la semaine dernière, la candidate démocrate a ainsi été victime d’une crise qui l’a obligée à arrêter son discours pendant plusieurs minutes. «Chaque fois que je pense à Trump, je deviens allergique», avait-elle plaisanté. Mais son adversaire n’avait pas hésité à profiter de la situation pour demander que «les deux candidats publient des bilans médicaux détaillés», bien que le candidat républicai­n, âgé de 70 ans, soit resté lui-même jusqu’à ce jour peu prolixe sur son état de santé.

Le lendemain de ce meeting, l’exFirst Lady avait confié à des journalist­es qu’elle était sous antihistam­inique pour traiter des problèmes d’allergie. Il a donc fallu attendre vendredi dernier pour que sa pneumonie soit diagnostiq­uée et quarante-huit heures pour en révéler l’existence.

En juillet 2015, le docteur Bardack avait signé une lettre dans laquelle elle affirmait qu’Hillary Clinton était dans une «condition physique excellente et apte à exercer» la présidence. Le document indiquait juste qu’elle souffrait d’hypothyroï­die et d’allergies au pollen.

Pour la candidate démocrate, il s’agit du second coup dur d’un week-end qui avait mal commencé vendredi, lors d’une soirée de levée de fonds. La candidate avait en effet commis une incroyable gaffe en traitant les électeurs de Donald Trump de «pitoyables». Elle avait ainsi assuré devant des caméras de télévision que, «pour généralise­r grossièrem­ent, vous pouvez mettre la moitié des partisans de Trump dans le panier des pitoyables», ajoutant: «Les racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophob­es. A vous de choisir.»

Excuses

Des déclaratio­ns qui ont enflammé le débat électoral, poussant Hillary Clinton à tenter de désamorcer la polémique. «Généralise­r grossièrem­ent n’est jamais une bonne idée», s’est-elle excusée. Ce faux pas résonne étrangemen­t avec celui commis il y a quatre ans par le républicai­n Mitt Romney, qui lui aussi avait distingué deux électorats: les makers (ceux qui «font») et les takers (ceux qui «prennent»), laissant entendre que ces derniers, représenta­nt 47% de la population, étaient des assistés. Cette insinuatio­n avait constitué un moment charnière dans la précédente élection présidenti­elle, finalement remportée par Barack Obama.

Une analogie que Donald Trump ne s’est pas privé de souligner. «Hillary Clinton vient d’avoir son moment 47%, a-t-il raillé sur Twitter. Quelle terrible chose n’a-t-elle pas dite à propos de tant d’Américains respectabl­es», ajoutant: «Alors que beaucoup de ses partisans ne voteront jamais pour moi, je les respecte tous quand même.»

Alors qu’il est encore trop tôt pour parler d’un tournant de la campagne 2016, un sondage Washington Post-ABC, publié dimanche, montre que la candidate démocrate fait toujours la course en tête avec 46% des intentions de vote, contre 41% pour son adversaire. Toutefois, cette enquête a été réalisée avant ce week-end compliqué pour Hillary Clinton.

«Pour généralise­r grossièrem­ent, vous pouvez mettre la moitié des partisans de Trump dans le panier des pitoyables» HILLARY CLINTON

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ÉTATS-UNIS Victime d’un malaise lors des commémorat­ions du 11-Septembre, Hillary Clinton, qui a dû annuler des meetings, souffrirai­t d’une pneumonie. Alimentées par Donald Trump, les inquiétude­s autour de son état de santé pourraient plomber la...
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(JUSTIN SULLIVAN/GETTY IMAGES) Hillary Clinton, dimanche, pendant la 15e commémorat­ion des attentats du 11-Septembre.

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