La mobilité du futur passera par le rail
Les statistiques 2015 montrent qu’on se déplace à peu près autant qu’en 2010, mais davantage en train. Des indicateurs utiles pour les décisions politiques futures, dont l’enveloppe de la deuxième tranche d’investissement dans le réseau ferroviaire
Ces prochains mois, le Conseil fédéral, puis le parlement seront appelés à prendre de grandes décisions sur la mobilité du futur. Ils devront se prononcer sur des essais pilotes de tarification (mobility pricing) et fixer l’enveloppe de la deuxième tranche d’investissement dans le réseau ferroviaire, à réaliser d’ici à 2030 ou 2035. Sera-t-elle de 7 ou de 12 milliards? Craignant que le tunnel du Brütten, devisé à 3 milliards entre Zurich et Winterthour, ne se taille la part du lion, la Conférence des directeurs des transports de Suisse occidentale (CTSO) réclame d’ores et déjà que la variante à 12 milliards soit privilégiée. Cela permettrait d’assurer des investissements complémentaires afin de faire circuler dix trains grandes lignes par heure entre Lausanne et Genève, de financer la nouvelle liaison entre Neuchâtel et La Chaux-deFonds et de doubler intégralement le tunnel du Lötschberg.
Amélioration de l’offre ferroviaire
Tous ces investissements seront-ils réellement nécessaires? Pour répondre à cette question, il est important de connaître l’évolution de la mobilité et de la demande. Tous les scénarios élaborés par les offices fédéraux, en particulier celui du Développement territorial (ARE), reposent sur une croissance des besoins. Le trafic voyageurs devrait progresser d’environ 25%, principalement via les transports publics (51%) et la mobilité douce (+32%) contre seulement 18% pour le trafic motorisé individuel. Quant au transport de marchandises, il devrait augmenter de 37% en moyenne.
Néanmoins, selon un rapport publié l’été dernier, l’ARE pronostique que l’augmentation du trafic serait moins rapide que ces vingt dernières années. Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS), publiés mardi, le confirment. Le microrecensement 2015 montre que la mobilité de la population à l’intérieur du pays est restée stable depuis le précédent décompte cinq ans plus tôt. La distance moyenne parcourue a été de 36,8 kilomètres (36,7 en 2010, 31,3 en 1994) et le temps moyen de trajet journalier s’est établi à 90,4 minutes (contre respectivement 91,7 et 82,6 minutes). Cela signifie que les déplacements se sont accélérés, surtout depuis 2005, ce qui est à mettre en lien avec l’amélioration de l’offre ferroviaire.
Ce sont d’ailleurs les déplacements en train qui gagnent le plus de terrain. Certes, l’utilisation de la voiture reste le moyen le plus utilisé (65%), loin devant le train (20%, un point de plus qu’en 2010), et les transports publics routiers (4%). La distance journalière parcourue en train est passée en cinq ans de 4,2 à 7,5 km, alors que celle effectuée en véhicule privé a augmenté de 21,3 à 23,8 km. Le taux d’occupation des voitures reste stable: il est de 1,56 personne contre 1,6 lors de la précédente enquête.
«Casser les bouchons»
Une analyse par régions donne une image assez contrastée. Logiquement, les deux cantons-villes de Bâle et de Genève devraient avoir la plus forte proportion d’utilisation des transports publics. C’est juste pour Bâle-Ville (43%), qui devance tous les autres. Mais Genève ne vient, avec 24%, qu’en huitième position, derrière Zurich, Berne ou encore Uri. En contrepartie, le canton du bout du lac affiche quasiment la même part de mobilité douce (13%) que Bâle-Ville (14%). L’indice de motorisation individuelle s’élève à 61% à Genève, contre 43% à Bâle-Ville. Les cantons romands se trouvent tous dans le peloton de tête, avec des taux oscillant entre 74 et 76%. On relèvera encore que le vélo électrique s’impose toujours plus comme un outil privilégié de mobilité. Il représente 7% des déplacements, contre seulement 2% en 2010.
Les loisirs constituent toujours le principal motif de déplacement (44% des distances journalières moyennes). Les transports professionnels représentent 24%. Ils sont en revanche concentrés sur les heures de pointe: 37% des trajets s’effectuent entre 7 et 8 heures du matin et 42% entre 17 et 18 heures. Ces résultats devront être pris en compte pour les décisions politiques à venir, l’un des objectifs étant de «casser les bouchons» se produisant aux heures de pointe, insiste la directrice de l’ARE, Maria Lezzi, qui souligne que le télétravail offre aussi des possibilités intéressantes. Si l’on inclut les voyages en avion hors frontières, qui sont en constante hausse (+57% en cinq ans), les Suisses ont parcouru en moyenne près de 25000 km en 2015, relève encore l’OFS.
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Le vélo électrique gagne également du terrain et représente 7% des déplacements, contre seulement 2% en 2010