Le Temps

Un piège pour la droite

- R. W.

Edouard Philippe parviendra-t-il à percer la digue que s’efforcent de consolider les dirigeants du parti «Les Républicai­ns» (LR)? De la réponse à cette question dépendront à la fois l’issue des législativ­es des 11 et 18 juin et le début du quinquenna­t Macron.

Pour parvenir à gouverner au centre – soit à la tête d’une majorité d’élus appartenan­t ou ralliés à «La République en Marche», soit en obtenant des majorités d’idées à géométrie variable – le premier ministre français nommé lundi doit d’abord fissurer le mur de la droite traditionn­elle, à laquelle il dit continuer d’appartenir.

Première cible: les 25 parlementa­ires ou figures centristes ou LR à avoir lancé, dès sa nomination, un appel à soutenir Emmanuel Macron. Certains, comme l’ancien ministre de l’agricultur­e de Nicolas Sarkozy Bruno Le Maire, sont donnés entrants dans le gouverneme­nt qui sera annoncé mercredi. D’autres, comme Nathalie Kosciusko-Morizet pourraient jouer un rôle clé à la future Assemblée nationale. Leur argument de choc? Comment convaincre les Français que la droite est encore moderne, si elle s’oppose au plus formidable pari politique de ces vingt dernières années. «Plus la droite va apparaître conservatr­ice, plus Macron aura de l’espace», prédit le politologu­e Dominique Reynié.

L’autre piège, pour la droite, est médiatique. L’histoire que va concocter, dans les jours prochains, le tandem Macron-Philippe autour des promesses de réformes et de remise sur les rails de l’Union européenne afin de redonner de la compétitiv­ité à la France… est bien plus séduisante que le cheval de bataille des réductions fiscales prônées par «Les Républicai­ns», dont la campagne sera dirigée par l’habile mais peu charismati­que maire de Troyes François Baroin. Comment, par exemple, convaincre le public de droite de ne pas voter proMacron alors que même le numéro un du patronat, Pierre Gattaz, a exhorté mardi matin le président à «aller vite» en ajoutant «que des hommes et des femmes politiques disent on va jouer ce renouveau […] ça me paraît tout à fait sain»?

Dernier élément du piège: Le Front national, dont Marine Le Pen vient de reprendre la présidence après l’avoir abandonné dans l’entre-deux-tours. Il a présenté lundi ses candidats et se profile comme l’opposant en chef au «macronisme» trop libéral et européen. Le slogan a été donné par Marine Le Pen au soir du second tour: patriotes contre mondialist­es. De quoi siphonner le peu d’air qui reste à la droite traditionn­elle après l’échec de son candidat François Fillon, convoqué de nouveau par les juges le 30 mai.

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