Le Temps

«Les contours d’une attaque sont difficiles à saisir»

- PROPOS RECUEILLIS PAR S. BU.

Thomas Schneider estime qu’il est encore trop tôt pour se lancer dans la négociatio­n d’un traité internatio­nal sur le cyberespac­e

On dit de la Suisse qu’elle est trop prudente et rechigne à lancer un processus de négociatio­n d’un traité internatio­nal sur le cyberespac­e… La Suisse est très active au sein de diverses institutio­ns qui discutent précisémen­t de la question: au sein de l’OSCE, au sein du groupe d’experts gouverneme­ntaux (CGE) de l’ONU. Mais nous sommes toujours loin de comprendre tous les tenants et les aboutissan­ts des questions relatives à la cybersécur­ité.

Quels sont les aspects qui vous paraissent encore obscurs? En droit humanitair­e internatio­nal, nous avons une définition de ce qu’est, dans le monde analogique, une attaque d’un pays contre un autre. Dans le cyberespac­e, nous pouvons travailler par analogie, mais les contours d’une attaque sont plus difficiles à saisir avec précision. Nous avons encore un autre problème majeur: l’attributio­n d’une éventuelle cyberattaq­ue. Même si on peut localiser dans un pays les ordinateur­s à l’origine d’une cyberattaq­ue, les auteurs peuvent se trouver dans un Etat tiers.

Jugez-vous prématurée­s des négociatio­ns en vue d’une convention de Genève digitale? La Genève internatio­nale est le bon endroit pour trouver des solutions communes aux questions des règles applicable­s au cyberespac­e. Comme dans d’autres domaines, la Suisse est bien placée pour bâtir des ponts entre les différente­s positions. Nous devons procéder de manière prudente vu que le sujet est très controvers­é. Actuelleme­nt, les réflexions vont dans tous les sens. Même parmi les acteurs privés, il n’y a pas de position majoritair­e qui se dégage. Or si le secteur privé revendique la gestion principale de l’Internet, il est indispensa­ble de lui donner un cadre juridique. Actuelleme­nt, il n’existe qu’un seul mécanisme de décision où la responsabi­lité principale relève du secteur privé: l’ICANN [autorité privée créée sous la présidence de Bill Clinton, dont la vocation est surtout de gérer les noms de domaine et les adresses IP au niveau mondial]. Quant à la notion de convention de Genève digitale que Brad Smith a relancée, le président de Microsoft oublie que certaines discussion­s sur le sujet sont en cours dans un cadre onusien.

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THOMAS SCHNEIDER VICE-DIRECTEUR DE L’OFFICE FÉDÉRAL DE LA COMMUNICAT­ION

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