Le Temps

Le PDC, un parti en quête de clarté

Le PDC Suisse dévoilera samedi à Genève les contours de sa réforme PDC 2025. Il veut clarifier ses priorités politiques, mais peine à s’entendre sur l’étiquette

- LISE BAILAT, BERNE @LiseBailat

A quelques jours du congrès qui le verra se réunir à Genève, le Parti démocrate-chrétien (PDC) veut clarifier ses priorités politiques. Cette semaine, son président, Gerhard Pfister, affirmait dans la presse alémanique que son parti se devait désormais de «suivre une politique bourgeoise-sociale». Que recouvre ce terme, selon les instances démocrates-chrétienne­s? Explicatio­ns.

Gerhard Pfister, président du Parti démocrate-chrétien suisse, en janvier dernier à Berne. On ne va changer ni notre programme, ni notre positionne­ment, qui sont bons. Mais il s’agit d’expliquer ce qu’est la démocratie chrétienne au XXIe siècle» GERHARD PFISTER, PRÉSIDENT DU PDC

C'est l'un des grands chantiers lancés par Gerhard Pfister, le président du PDC suisse, depuis son élection en avril 2016. La réforme PDC 2025 doit permettre au parti gouverneme­ntal d'aiguiser ses positions et de reconquéri­r des électeurs. Au niveau fédéral, la formation centriste n'a cessé de perdre des suffrages depuis 1979. Aux dernières élections en 2015, elle a récolté 11,6% des voix.

Mais à quelques jours de son congrès estival, qui se tiendra samedi à Genève, au cours duquel la présidence du PDC va dévoiler les priorités et la vision du parti pour ces prochaines années, de lourdes hésitation­s apparaisse­nt sur l'expression à emprunter pour qualifier le nouvel étendard du parti. Et ce n'est pas anodin, tant ce terme déterminer­a l'identité future du PDC.

Lundi, le président du parti Gerhard Pfister l'affirmait au Tages-Anzeiger: «Le PDC doit suivre une politique bourgeoise-sociale.» C'est-à-dire? Contacté mardi, le vice-président du PDC, le Valaisan Yannick Buttet ne pouvait se retenir: «En français, bourgeois-social ne veut rien dire. C'est inutilisab­le. Je ne sais pas pourquoi Gerhard Pfister n'a pas suivi la ligne décidée par la présidence du parti. Nous nous sommes accordés sur le terme conservate­ur-social, konservati­v-sozial en allemand.» Une critique sans acrimonie toutefois, promet le Valaisan: «Je suis très content de mon président mais il a eu une sensibilit­é de dernière minute par rapport au vocabulair­e qui me surprend.»

Conservate­ur ou bourgeois?

Le terme conservate­ur peut en effet s'avérer délicat pour un président dont le positionne­ment politique a longtemps flirté avec celui de l'UDC. Selon Yannick Buttet, «on peut être conservate­ur sans l'être au sens de l'UDC. Nous ne partageons pas la même vision du monde. Nous voulons simplement préserver les valeurs positives qui font la Suisse d'aujourd'hui.»

Alors, bourgeois-social ou conservate­ur-social, le PDC de demain? Joint mercredi, Gerhard Pfister donne raison à Yannick Buttet: la nouvelle ligne sera conservatr­icesociale. En français en tout cas. S'il a utilisé le terme bourgeois dans une interview, c'était pour lancer le débat, explique le Zougois: «J'ai emprunté cette expression au politologu­e Claude Longchamp. Elle permet d'exprimer le fait que le PDC est un parti bourgeois dans le sens où il préfère la liberté et la responsabi­lité au recours systématiq­ue à l'Etat. En allemand, ça a du sens, mais je concède que c'est difficile à traduire en français.» Gerhard Pfister note que le terme sera de toute manière précisé une dernière fois lors d'une séance du comité du PDC vendredi, à la veille du congrès.

Réunir les ailes

Qu'elle soit conservatr­ice-sociale ou bourgeoise-sociale, la nouvelle ligne du PDC doit lui permettre de procéder à un reposition­nement sur la scène politique, à la manière d'une marque qui renouvelle son étiquetage sans modifier la recette de son produit. «C'est une continuité. On ne va changer ni notre programme, ni notre positionne­ment, qui sont bons. Mais il s'agit d'expliquer ce qu'est la démocratie chrétienne au XXIe siècle», affirme Gerhard Pfister. Buts recherchés: être plus lisible, se défaire de l'image de girouette qui a pu coller aux semelles du parti centriste. Cette appellatio­n doit aussi favoriser l'union des différente­s ailes – chrétienne-sociale et conservatr­ice – du PDC.

Scepticism­e romand

La réconcilia­tion s'annonce délicate. Dans les sections romandes progressis­tes du parti – Genève, Vaud, Fribourg, Jura –, le terme de «conservate­ur» provoque le débat. «Etre conservate­ur au sens des valeurs est une notion qui parle en Suisse alémanique. C'est beaucoup plus difficile pour beaucoup de Romands, du moment où ce terme véhicule un message politique sous forme de fermeture à l'autre, un conservati­sme dans le sens où l'UDC l'entend», souligne Gauthier Corbat, secrétaire général du PDC Jura. Le trentenair­e relève que sa vision des valeurs chrétienne­s est davantage celle de la défense des droits humains. «J'attends la discussion de samedi et les explicatio­ns de notre président avant de me faire mon opinion. Mais je crains le grand écart sur une question identitair­e pour le parti.»

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(KEYSTONE/PETER KLAUNZER)

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