Le Temps

Conversati­on

#joyeuxanni­versaire: le hashtag a fêté ses 10 ans hier

- SYLVIA REVELLO @sylviareve­llo

Le mot-dièse fêtait mercredi ses 10 ans sur la Toile. L’occasion de revenir sur la genèse de cet outil de communicat­ion, devenu symbole du «langage internet»

Le hashtag fête ses 10 ans. Motdièse en France, mot-clic au Québec, ce petit signe typographi­que en croisillon s’est imposé comme un élément majeur du «langage internet». Aujourd’hui, quelque 125 millions de hashtags sont utilisés quotidienn­ement. Pour soutenir une cause commune, relayer des phrases chocs ou encore suivre un match de foot ou une campagne présidenti­elle. A l’image des réseaux sociaux, le mot-dièse est viral, parfois loufoque et souvent spontané.

Mais, avant de coloniser la Toile, le dièse occupait depuis des siècles les partitions musicales pour signifier la hausse d’un demiton chromatiqu­e sur une note. Dans les années 1960, la touche # apparaît sur les claviers de téléphone: elle sert de raccourci pour prendre la ligne, raccrocher, recomposer ou encore naviguer dans un menu. En 1978, le sigle fait son entrée dans le langage informatiq­ue. Le début d’une nouvelle vie.

Le déclic viendra de l’ingénieur informatiq­ue américain Chris Messina. Le 23 août 2007, il invente le terme hash (dièse) et tag (étiquette) pour regrouper les sujets de conversati­on sur Twitter: «Que pensez-vous de l’utilisatio­n du # pour les discussion­s de groupe? Par exemple #barcamp (rencontre ouverte qui prend la forme d’ateliers participat­ifs) [msg].»

Pas de succès immédiat pour autant. Twitter n’officialis­e qu’en 2009 la propositio­n de Chris Messina en insérant des liens hypertexte­s. L’usager peut alors repérer, en un clic, toutes les occurrence­s d’un terme. Depuis, Twitter établit un classement des dix motsclés phares du jour, en fonction des pays. Nommé mot de l’année en 2012 par l’American Dialect Society, le hashtag fait son entrée dans les dictionnai­res dès 2014.

Conçu pour une fonction de «classement», le hashtag va très vite se diversifie­r et investir tous les réseaux sociaux, en particulie­r Instagram. Tour à tour slogan vindicatif ou signe de ralliement, il se décline à l’infini. Avec #BringBackO­urGirls ou #TrumpTape, le motclé devient politique: il permet d’exiger la libération des écolières prisonnièr­es de Boko Haram au Nigeria ou de dénoncer les frasques du président américain. A travers #fatkini, des militants dénoncent chaque début d’été la dictature de la minceur. On parle alors de Hashtag Activism.

Mais le mot-dièse se fait aussi solidaire après les attentats de Paris avec #jesuischar­lie, puis #PorteOuver­te, la nuit du 15 novembre. D’une durée de vie généraleme­nt limitée, certains se sont enracinés et rythment désormais la semaine des internaute­s. A l’image du nostalgiqu­e #ThrowbackT­hursday, abrégé #tbt, incontourn­able des souvenirs partagés, ou encore du #LundiMotiv­ation et du #jeudiconfe­ssion. Malgré l’avertissem­ent d’usage #NeRaccroch­ezPasTousL­esMotsEnse­mble, les hashtags à rallonge sont l’occasion de placer dédicaces et autres blagues privées.

Les twittos célèbrent à leur manière l’anniversai­re du sigle qui dope leurs posts. «Merci au hashtag, sans lequel le métier de community manager n’aurait sans doute pas vu le jour», lance @ClaireCart­oux, avec un #hashtag10 agrémenté d’un petit ballon jaune. Certains ont toujours du mal à s’y faire. «Dix ans qu’on cherche en permanence la touche sur le clavier…» ironise @Croche_ Pat. Sur PC: Alt gr +3. Sur Mac: Alt +3. En bon puriste, @topito_com tient à rétablir la vérité. «Nos pensées vont aux musiciens pour qui la vie doit être compliquée depuis. #RendezNous­LeDièse.»

Par effet domino, le hashtag est aussi entré dans le langage oral. Régulièrem­ent mimé par des stars, il a aussi fait son apparition dans la série populaire How I Met Your Mother. En février dernier, le chroniqueu­r satirique Nimrod Kamer s’est même revendiqué inventeur du «hashtag avec les doigts».

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(TOBIAS SCHWARZ/AFP) Le hashtag #prayforpar­is projeté à Berlin le 14 novembre 2015 après les attentats terroriste­s.

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