Conversation
#joyeuxanniversaire: le hashtag a fêté ses 10 ans hier
Le mot-dièse fêtait mercredi ses 10 ans sur la Toile. L’occasion de revenir sur la genèse de cet outil de communication, devenu symbole du «langage internet»
Le hashtag fête ses 10 ans. Motdièse en France, mot-clic au Québec, ce petit signe typographique en croisillon s’est imposé comme un élément majeur du «langage internet». Aujourd’hui, quelque 125 millions de hashtags sont utilisés quotidiennement. Pour soutenir une cause commune, relayer des phrases chocs ou encore suivre un match de foot ou une campagne présidentielle. A l’image des réseaux sociaux, le mot-dièse est viral, parfois loufoque et souvent spontané.
Mais, avant de coloniser la Toile, le dièse occupait depuis des siècles les partitions musicales pour signifier la hausse d’un demiton chromatique sur une note. Dans les années 1960, la touche # apparaît sur les claviers de téléphone: elle sert de raccourci pour prendre la ligne, raccrocher, recomposer ou encore naviguer dans un menu. En 1978, le sigle fait son entrée dans le langage informatique. Le début d’une nouvelle vie.
Le déclic viendra de l’ingénieur informatique américain Chris Messina. Le 23 août 2007, il invente le terme hash (dièse) et tag (étiquette) pour regrouper les sujets de conversation sur Twitter: «Que pensez-vous de l’utilisation du # pour les discussions de groupe? Par exemple #barcamp (rencontre ouverte qui prend la forme d’ateliers participatifs) [msg].»
Pas de succès immédiat pour autant. Twitter n’officialise qu’en 2009 la proposition de Chris Messina en insérant des liens hypertextes. L’usager peut alors repérer, en un clic, toutes les occurrences d’un terme. Depuis, Twitter établit un classement des dix motsclés phares du jour, en fonction des pays. Nommé mot de l’année en 2012 par l’American Dialect Society, le hashtag fait son entrée dans les dictionnaires dès 2014.
Conçu pour une fonction de «classement», le hashtag va très vite se diversifier et investir tous les réseaux sociaux, en particulier Instagram. Tour à tour slogan vindicatif ou signe de ralliement, il se décline à l’infini. Avec #BringBackOurGirls ou #TrumpTape, le motclé devient politique: il permet d’exiger la libération des écolières prisonnières de Boko Haram au Nigeria ou de dénoncer les frasques du président américain. A travers #fatkini, des militants dénoncent chaque début d’été la dictature de la minceur. On parle alors de Hashtag Activism.
Mais le mot-dièse se fait aussi solidaire après les attentats de Paris avec #jesuischarlie, puis #PorteOuverte, la nuit du 15 novembre. D’une durée de vie généralement limitée, certains se sont enracinés et rythment désormais la semaine des internautes. A l’image du nostalgique #ThrowbackThursday, abrégé #tbt, incontournable des souvenirs partagés, ou encore du #LundiMotivation et du #jeudiconfession. Malgré l’avertissement d’usage #NeRaccrochezPasTousLesMotsEnsemble, les hashtags à rallonge sont l’occasion de placer dédicaces et autres blagues privées.
Les twittos célèbrent à leur manière l’anniversaire du sigle qui dope leurs posts. «Merci au hashtag, sans lequel le métier de community manager n’aurait sans doute pas vu le jour», lance @ClaireCartoux, avec un #hashtag10 agrémenté d’un petit ballon jaune. Certains ont toujours du mal à s’y faire. «Dix ans qu’on cherche en permanence la touche sur le clavier…» ironise @Croche_ Pat. Sur PC: Alt gr +3. Sur Mac: Alt +3. En bon puriste, @topito_com tient à rétablir la vérité. «Nos pensées vont aux musiciens pour qui la vie doit être compliquée depuis. #RendezNousLeDièse.»
Par effet domino, le hashtag est aussi entré dans le langage oral. Régulièrement mimé par des stars, il a aussi fait son apparition dans la série populaire How I Met Your Mother. En février dernier, le chroniqueur satirique Nimrod Kamer s’est même revendiqué inventeur du «hashtag avec les doigts».
▅