Le Temps

Le Conseil fédéral veut alléger la protection du loup

- FLORIAN FISCHBACHE­R

Le gouverneme­nt propose de déclasser le loup, d’espèce «strictemen­t protégée» à simplement «protégée», au niveau européen. De quoi raviver la controvers­e entre chasseurs et défenseurs du prédateur

Le Valais va-t-il réussir à faire plier la Convention de Berne, qui régit depuis 1979 la conservati­on des espèces protégées en Europe? Une initiative cantonale déposée en 2014 demandait que la chasse au loup soit autorisée toute l'année, en contradict­ion avec le texte européen. Après l'adoption de l'initiative par le Conseil national, et son refus par le Conseil des Etats en 2016, la commission de l'environnem­ent des Etats avait demandé au gouverneme­nt de revoir le statut du loup.

C'est désormais chose faite. Le gouverneme­nt a annoncé mercredi qu'il allait demander la déclassifi­cation du loup de «strictemen­t protégé» à «protégé» auprès du Comité permanent de la Convention de Berne d'ici à juillet 2018. Une requête identique de la Suisse avait déjà été rejetée en 2006.

«Un recul général»

Une telle rétrograda­tion offrirait davantage de latitude pour la gestion de l'espèce. «On ne demande pas d'ôter toute protection au loup, mais l'actuelle Convention de Berne ne laisse pas la possibilit­é aux régions de réguler cette espèce problémati­que de manière optimale», explique Greg Ballestraz, de la Fédération valaisanne de sociétés de chasse. Le chasseur précise que son organisati­on «est à 200% derrière cette décision du Conseil fédéral», et cite en exemple la gestion de la population de bouquetins.

Du côté des organisati­ons environnem­entales, on estime que le loup n'est qu'un épiphénomè­ne, qui cache «un recul très net de la protection» de certaines espèces dans le projet de révision de la loi sur la chasse présentée par le Conseil fédéral.

Dans un communiqué commun, Pro Natura, le WWF et BirdLife regrettent la volonté «de régler toujours plus par les armes les conflits concernant d'autres espèces protégées telles que le lynx, le castor ou le cygne tuberculé». «On dit vouloir préserver la biodiversi­té, puis on donne aux cantons la possibilit­é d'éliminer des espèces qui ne leur plaisent pas, c'est contradict­oire», soulève Nicolas Wüthrich, responsabl­e de l'informatio­n de Pro Natura, en relevant «les effets positifs, avérés scientifiq­uement, du loup pour la biodiversi­té».

En Valais, les dégâts causés par le loup ne cessent d'augmenter: 217 animaux de rente tués au cours de l'année 2016, alors qu'ils n'étaient que 37 en 2012. Dans les faits, un canton peut déjà, avec l'accord de l'Office fédéral de l'environnem­ent (OFEV), réguler les effectifs de loup, si au moins quinze animaux de rente ont été tués en quatre mois sur le territoire d'une meute de loups comprenant des jeunes. Un loup peut aussi être tiré s'il a tué au moins 35 moutons ou chèvres en quatre mois ou s'il a tué 25 animaux en un mois.

Mais ces mesures ne sont pas suffisante­s et surtout très contraigna­ntes pour les régions, selon Greg Ballestraz. Au contraire, pour Nicolas Wüthrich, «il est inquiétant de vouloir remettre en cause une convention internatio­nale à cause d'un problème domestique dans un coin de pays».

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