Nyon votera sur les requérants
Les citoyens de la commune décideront de l’octroi d’une parcelle destinée à accueillir un centre de requérants. Aux traditionnels opposants du projet s’ajoutent d’inhabituels partisans
«Nous en accueillons peu, et nous les accueillons mal», résume Hélène Menut, membre de l’association 24.9, qui soutient la création d’un foyer d’hébergement pour migrants à Nyon. En janvier, le Conseil communal avait tout d’abord approuvé l’octroi d’une parcelle à l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), avant d’opter pour un référendum spontané, qui permettra aux Nyonnais de s’exprimer euxmêmes sur le sujet le 24 septembre. Une consultation qui représente «une première en Suisse romande», selon Evi Kassimidis, porte-parole de l’EVAM. Un foyer d’accueil d’une capacité encore indéterminée serait construit sur le terrain en question.
«Aujourd’hui, beaucoup de migrants sont logés dans un abri de la protection civile (PC). Certains depuis plus de deux ans! Nous sommes peu ouverts par rapport à d’autres communes du canton et nous aimerions changer cela», explique Hélène Menut. «Là aussi, le soutien d’une association citoyenne est une première», se réjouit la porte-parole de l’EVAM. Un apport bienvenu, «d’autant plus qu’il s’agit d’un groupe de citoyens issus de tous milieux et de divers partis politiques. Ce qui démontre bien que l’accueil de requérants d’asile est l’affaire de tous.» Fin juillet 2017, 78 personnes bénéficiaient des services de l’EVAM à Nyon. Un chiffre largement inférieur au taux d’accueil moyen dans le canton de Vaud. A titre comparatif, Vevey ou Renens, villes de taille semblable, en accueillent environ le double.
Pas dans mon jardin
Trouver des communes prêtes à mettre à disposition des structures d’accueil n’est pas chose aisée. «En 2015, au pic de la crise, nous avons envoyé un courrier à l’ensemble des communes vaudoises de plus de 2000 habitants (seuil défini dans la loi cantonale) en leur exposant l’urgence de la situation. Toute aide était la bienvenue, même un immeuble voué à la démolition à moyen terme. Sur plus de 70 communes, les réponses reçues se comptaient sur les doigts d’une main, raconte Evi Kassimidis. L’ouverture d’un centre sur la région de La Côte, plus particulièrement à Nyon, est justifiée. Par souci d’équité et d’équilibre de répartition», résume-t-elle. Les requérants sont distribués sur l’ensemble du territoire suisse selon une clé de répartition basée essentiellement sur la démographie cantonale. Troisième de Suisse, Vaud en accueille environ 8%. Il incombe par la suite aux cantons de répartir les requérants d’asile sur leur propre territoire. «Plusieurs solutions ont déjà été recherchées à Nyon, sans succès. C’est le troisième projet de ce genre», précise la porte-parole.
Si la présence d’un comité de soutien est nouvelle, les traditionnels opposants sont aussi de la partie. Chef de groupe UDC à la commune de Nyon et vice-président d’Accueil raisonnable, qui s’oppose à l’octroi de cette parcelle, Sacha Soldini défend une autre vision: «L’association ne revient pas sur la question d’accueillir ou non, accueillir est une évidence. C’est la dignité offerte aux nouveaux arrivants dans un grand centre que nous remettons en question. Les privés ne peuvent pas accueillir des migrants sans WC séparés, et là on fait un foyer dans lequel ils doivent partager sanitaires et cuisines, de surcroît sans la possibilité de sociabiliser avec une famille suisse. C’est un peu paradoxal.» La solution mise en avant par Accueil raisonnable passe par l’attribution d’appartements aux requérants. Certes difficiles à trouver sur La Côte, ces logements offriraient un espace digne et au contact de la population suisse, favorisant ainsi l’intégration des nouveaux arrivés. «Il faut être visionnaire, on peut faire mieux que du parcage dans une grosse boîte», soutient la présidente du groupe, Véronique Burki.
Un soutien populaire n’est pas exclu le 24 septembre, comme en atteste une expérience similaire en Suisse alémanique: en 2016, la commune bernoise traditionnellement UDC de Hasle s’est prononcée sur la fermeture d’un centre d’accueil pour requérants. Malgré une forte opposition lors de son ouverture en 2015, et à la surprise générale, ses 3300 habitants ont finalement plébiscité son maintien à plus de 75%.
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Fin juillet 2017, 78 personnes bénéficiaient des services de l’EVAM à Nyon