Le Temps

Attentats islamistes: fatalité, vraiment?

- MARIE-HÉLÈNE MIAUTON

Partout dans le monde, les terroriste­s islamistes répandent la mort et la souffrance. Le MoyenOrien­t et l’Afrique payent un lourd tribut aux fanatiques, mais l’Europe est également touchée puisque le bilan, décompté du début de l’année 2017 à la mi-août, est de 77 morts et plus de 400 blessés. Désormais qu’il ne se passe plus un mois sans incident improvisé ou attaque meurtrière planifiée, le scénario des événements se répète à l’identique au point de prendre des allures de banalité. Les terroriste­s font leur sale boulot, lâche et meurtrier. Les gouverneme­nts attaqués, avant même que les faits soient clarifiés, tentent d’écarter l’hypothèse terroriste, comme si c’était islamophob­e de soupçonner immédiatem­ent ceux qui, depuis une décennie, sont pourtant responsabl­es de l’immense majorité des attentats à travers le monde, et le revendique­nt haut et fort.

Cette pudibonder­ie verbale révèle une complaisan­ce larvée avec l’ennemi qu’on omet désormais de nommer: le terrorisme n’est plus islamiste, il s’est désincarné; ce sont les voitures-béliers qui écrasent les passants, pas leurs conducteur­s; les tueurs sont «des jeunes» même lorsqu’ils ont 35 ans, comme s’il fallait les déresponsa­biliser. Pour les dédouaner de leurs actes, nombreux sont rangés désormais dans les cas psychiatri­ques, nouvelle façon de cacher la caque au chat! En conséquenc­e de cette façon biaisée de présenter les choses, les population­s se lamentent sur leurs morts avec force bougies et bouquets, comme pour une catastroph­e naturelle, mais ils ne s’arment pas psychologi­quement pour résister et pour faire front. «Même pas peur!» est devenu leur slogan, enfantin et faussement courageux, alors qu’il faudrait justement avoir peur pour analyser le danger, le combattre et exiger que cela cesse.

Mais comment avoir peur alors que tout concourt à donner l’illusion de la fatalité. Ainsi la fréquence des événements, l’un chassant l’autre, émousse l’effet de sidération et laisse croire que toute résistance est inutile, qu’il «faut vivre avec». Les rituels mis en place rappellent les grandes procession­s d’autrefois pour conjurer les avanies du sort, de la peste aux grandes famines, et pour faire contrition de nos fautes. De même, nous battons notre coulpe pour nos erreurs passées, au lieu de condamner fermement l’Etat Islamique et ses guerriers. La conclusion à laquelle nous sommes amenés est donc que, si le terrorisme est une fatalité, il ne se peut combattre et nul n’en est responsabl­e. Mektoub!

Voilà pourquoi les chefs de gouverneme­nt et l’essentiel des médias usent de discours lénifiants, répétitifs, convenus. Ils entretienn­ent l’émotion, éclairent à tour de rôle leurs bâtiments emblématiq­ues aux couleurs du pays en deuil, mettent les drapeaux en berne, observent des minutes de silence et organisent de grands enterremen­ts nationaux. L’Espagne reçoit des Tweets de condoléanc­es, les mêmes qu’elle avait envoyés quelques mois auparavant à la France ou à la Grande-Bretagne… Le rituel est bien rodé mais, une fois les patenôtres récitées, aucune décision n’est prise pour arrêter l’hécatombe, étymologiq­uement le «sacrifice de cent boeufs». Des boeufs ou des moutons?

Evidemment, il s’agit pour les dirigeants européens de couvrir l’impéritie de leur politique migratoire et sécuritair­e. En tentant de minimiser les conséquenc­es de leurs erreurs, ils espèrent que nul ne leur demandera des comptes. Pourtant, au gré des événements, la vérité se fait éclatante: ce n’est pas forcément la misère sociale qui mène au djihad, ce sont bien des imams intégriste­s qui suscitent les vocations, les fichés S se baladent effectivem­ent sans surveillan­ce à travers l’Europe de Schengen, l’EI profite impunément des flux de migrants incontrôla­bles pour nous réexpédier ses combattant­s, c’est bien sous l’étendard de leur foi que les terroriste­s tuent et c’est la haine qui guide leurs pas! On aura beau tenter de dire le contraire, les faits sont têtus et, bientôt, le roi sera nu.

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