Le Temps

Au commenceme­nt, un jeu de hasard

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La musique est depuis toujours un jeu de hasard. L’aléatoire a infusé l’oeuvre impression­nante de Wolfgang Amadeus Mozart. «Il devait inventer des diversions pour briser la routine, imagine le claviérist­e Martin Chabloz. Mais il restait le maître du jeu. Sa musique demande une somme de connaissan­ces considérab­le.»

En 1787, le compositeu­r autrichien a mis au point un jeu de dés musical. Il suffisait de tirer les dés pour composer menuets ou contredans­es au moyen de cartes sur lesquelles étaient inscrites des mesures composées par le maître. Cette forme simple de «compositio­n algorithmi­que» continue d’inspirer les chercheurs. «A la place de lancer des dés, on utilise un ordinateur et des outils statistiqu­es», indique Florian Colombo, scientifiq­ue à l’EPFL et créateur d’un compositeu­r artificiel.

Ada Lovelace, une mathématic­ienne visionnair­e

La mathématic­ienne anglaise Ada Lovelace est une pionnière dans ce domaine. Au XIXe siècle, cette femme visionnair­e décrit une «machine analytique» qui pourrait être programmée afin de résoudre les problèmes les plus complexes, comme composer de la musique. C’est elle qui a eu la vision du calculateu­r universel, une idée qu’Alan Turing formaliser­a près de cent ans plus tard.

L’un des pères de l’informatiq­ue est connu pour avoir cassé le cryptage des machines de communicat­ion allemandes Enigma pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais son laboratoir­e a également été le théâtre d’une première historique: un morceau de musique joué par un ordinateur. C’était en 1951. La machine a repris, à sa manière, trois chansons connues du grand public: l’hymne britanniqu­e «God Save the King» (George VI est toujours roi à l’époque), la comptine «Baa Baa Black Sheep» et quelques mesures du grand classique du jazz de Glenn Miller «In The Mood».

«Alan Turing n’était pas tellement intéressé par l’idée de programmer l’ordinateur pour jouer des morceaux convention­nels de musique: il utilisait les notes pour indiquer ce que faisait l’ordinateur», précisent les chercheurs Jack Copeland et Jason Long sur le site de la British Library. C’est un jeune professeur, Christophe­r Strachey (1916-1975), appelé à devenir un des plus grands informatic­iens du Royaume-Uni, qui se chargea d’élaborer un programme informatiq­ue musical, sur la base du manuel d’utilisatio­n de l’ordinateur d’Alan Turing. Depuis, les ordinateur­s ont fait beaucoup de progrès.

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