La vache a-t-elle besoin de ses cornes?
Vingtquatre heures après l’élection d’un nouveau conseiller fédéral, les sénateurs ont débattu de la dignité des animaux de rente
La Confédération doit-elle soutenir financièrement les éleveurs qui n’écornent pas leur bétail? Mieux: la Constitution doit-elle stipuler que la Suisse est un pays qui préserve la dignité des animaux de rente agricoles? Après une excursion dans le Simmental la veille qui a eu valeur d’étude de terrain, le Conseil des Etats a répondu non, jeudi, par 28 voix contre 8 et 8 abstentions.
«Il y a des sujets plus importants», admet la conseillère aux Etats Anita Fetz (PS/BS), disant probablement tout haut ce que d’autres pensent tout bas. Mais son collègue Robert Cramer (Verts/GE) l’a immédiatement corrigée: «On parle de la carte de visite de notre pays. Notre débat aura sur le plan international un retentissement au moins comparable à celui qui a entouré l’élection mercredi d’un nouveau conseiller fédéral.» Et il ne croit pas si bien dire. Une équipe de la chaîne de télévision allemande ARD arpentait les couloirs du Palais fédéral, tentant de suivre Armin Capaul, paysan grison à l’origine de cette initiative populaire. Elle n’a pas estimé nécessaire de faire le déplacement la veille déjà pour la succession de Didier Burkhalter, chef de la diplomatie suisse.
Armin Capaul a suivi le débat sans se faire d’illusions. Cigare au bec, il explique sur la terrasse du Palais que la question doit être tranchée par le peuple. Et qu’il ne veut de toute façon pas d’un contre-projet ou de tout autre bricolage législatif qui édulcorerait son initiative. Propriétaire de huit vaches, il estime que les détenteurs de bétail à cornes doivent être soutenus étant donné que ce bétail a besoin de davantage de place et de soins. Ce faisant, il veut surtout encourager les éleveurs à faire comme lui. Car une vache ne possède pas des cornes pour rien mais pour communiquer avec ses soeurs de prairies.
Le sujet a donné lieu à un échange entre sénateurs très prometteur pour la suite. Roberto Zanetti (PS/SO) a notamment rappelé la souffrance de l’animal au moment de l’écornage: «Les cornes sont brûlées au fer! Imaginez qu’on vous fasse la même chose chez le podologue. Au lieu de vous couper et de vous limer les ongles, on les brûle! D’accord, le problème de mycose est résolu à jamais, mais au prix de quelle souffrance!» Le débat au Conseil national est attendu avec impatience.
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«Imaginez qu’on vous fasse la même chose chez le podologue» ROBERTO ZANETTI (PS/SO)