Nicolas Blancho et deux de ses associés inculpés
Le Ministère public de la Confédération (MPC) met en accusation le président du Conseil central islamique suisse et deux autres membres. En cause: la diffusion d’un entretien avec un combattant djihadiste en Syrie
Trois dirigeants du Conseil central islamique suisse (CCIS) accusés de propagande terroriste devront se présenter devant la cour du Tribunal pénal fédéral, à Bellinzone. Le Ministère public de la Confédération (MPC) met en accusation le président du CCIS, Nicolas Blancho, le chargé de la communication Qaasim Illi, ainsi que le responsable du «département pour les productions culturelles» de l'association, Naim Cherni. Les trois meneurs de ce groupe d'obédience salafiste fondé en 2009 étaient déjà visés par une procédure.
Tous trois sont accusés d'avoir violé la loi fédérale interdisant les groupes «Al-Qaida» et «Etat islamique» et les organisations apparentées. En cause: des films réalisés en Syrie entre fin septembre 2015 et mi-octobre 2015. Dans l'une de ces vidéos, toujours visible sur le site YouTube, Naim Cherni s'entretient longuement avec Abdallah al-Muhaysini, un leader de l'organisation Jaysh al-Fath, coalition de plusieurs groupes de combattants formée durant la guerre en Syrie, liée à Al-Qaida. Le Département américain du Trésor considère le Saoudien comme un «leader clé» du groupe Jabhat al-Nosra. Son interview est sous-titrée en anglais, allemand et français.
Le MPC reproche au CCIS d'avoir offert à ce combattant djihadiste «une plateforme de premier plan, multilingue et multimédia pour présenter et propager avantageusement sa propre personne et l'idéologie de l'organisation terroriste Al-Qaida». Il accuse en outre les trois leaders du CCIS d'avoir «activement relayé» ces films sur les réseaux sociaux et lors d'une manifestation publique. La diffusion publique, en novembre 2015, de ce film que le CCIS considère comme un documentaire, avait alerté les autorités.
Un matériel de propagande
Selon le MPC, ce matériel vidéo s'apparente à de la propagande, car il renforce le «pouvoir d'attraction» d'Al-Qaida «sur des membres existants ou potentiels» et, de ce fait, «encourage ses activités criminelles». Le CCIS avait déjà rejeté ces accusations lors de la première diffusion du film, affirmant qu'il avait pour but de donner la parole à des opposants de l'Etat islamique. Dans une interview au Temps en mai 2016, Nicolas Blancho dénonçait une «procédure politique» du MPC. L'entretien réalisé avec Abdallah al-Muhaysini, disait-il, est un «documentaire de la réalité sur le terrain».
Les juges du Tribunal pénal fédéral de Bellinzone devront décider si le film est un documentaire, comme l'affirme son auteur en invoquant la liberté d'expression, ou s'il relève de la propagande en faveur du terrorisme.
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