Le Temps

La course aux centres de données s’accélère

Google, Amazon, Microsoft ou Facebook ne cessent de construire de nouveaux centres pour stocker et traiter un volume de données de plus en plus important. En Suisse aussi, le «cloud computing» est en plein essor

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Un terrain de 368000 mètres carrés acquis pour 58 millions de dollars. Et juste à côté, une autre parcelle de 230000 mètres carrés payée 31 millions de dollars. Cette semaine, Google a sorti son chéquier pour s’offrir de quoi construire deux nouveaux immenses centres de données en Virginie, à quelques kilomètres de Washington. Cette annonce illustre l’importance croissante des datacenter­s, ces halles remplies de serveurs tournant en permanence pour stocker et traiter des volumes de données à la croissance exponentie­lle. En Suisse aussi, la demande pour le cloud computing (informatiq­ue en nuage) augmente.

Rien qu’au mois de novembre, Google aura ainsi annoncé la constructi­on de cinq centres de données supplément­aires. Deux aux Etats-Unis, et trois dans la région de Bombay, en Inde. «Héberger des applicatio­ns dans ces centres permettra d’améliorer le temps de latence de 20 à 90% pour les utilisateu­rs basés à Chennai, Hyderabad, Bangalore et bien sûr Bombay, par rapport à un traitement de données dans notre centre le plus proche, basé à Singapour», a expliqué Dave Stiver, responsabl­e de Google Cloud.

Un million de mètres carrés

En Virginie, c’est la proximité des grands backbones de fibre optique, en plus des prix de l’électricit­é bas, qui attirent les géants d’Internet. Au point que la région proche de l’aéroport de Dulles, à 20 kilomètres de Washington, est surnommée la «Data Center Alley»; Amazon, Microsoft ou Google y possèdent des centres. Selon un responsabl­e local, cité par le site spécialisé Data Center Knowledge, la surface occu- pée par les centres de données seuls – et donc pas les terrains – avoisine le million de mètres carrés, avec un tiers de plus en développem­ent.

Au total, Google possède seize sites de centres de données, tout comme Amazon, Microsoft en revendiqua­nt 36. Des trois, c’est Amazon qui contrôle aujourd’hui le marché du cloud, un marché en croissance de 40% par an et qui pèse 12 milliards de dollars par trimestre. Via sa division Web Services, Amazon en détient 34%, devant Microsoft (11%), IBM (8%) et Google (5%), selon les estimation­s de la société Synergy Research Group. Le reste (42%) est détenu par une multitude d’acteurs, tels Alibaba ou Oracle. Le français OVH essaie de se faire une place: il possède déjà 27 centres situés sur 12 sites et quatre continents et vise les 50 centres d’ici à quelques années, via 1,5 milliard d’euros investis d’ici à 2020.

Rien ne vient contrarier l’appétit de ces géants. «Les plus grands le deviennent encore davantage vu le nombre d’utilisateu­rs qu’ils ajoutent et la dépendance à leurs services qui augmente, analyse René Fell, président de Vigiswiss, l’associatio­n faîtière des centres de données en Suisse. Vous vous habituez à utiliser Gmail, puis Google Drive, vous trouvez cela très efficace, puis vous avez tellement de données – dont des photos – que vous acceptez de payer quelques francs par mois pour les stocker en ligne. Ce business est en pleine expansion.»

«Des serveurs de plus en plus petits»

En Suisse, le nombre de centres augmente. Ils étaient 58 début 2016 et sont 73 aujourd’hui, selon le site Data Center Map, qui en dénombre plus de 4100 dans le monde. «Ces chiffres font référence, même s’ils sont sans doute en deçà de la réalité, poursuit le président de Vigiswiss. En Suisse, la demande ne cesse de croître: si une start-up va démarrer ses activités en utilisant les services cloud bon marché d’Amazon ou de Google, une étude d’avocats ou une fiduciaire préférera travailler avec un prestatair­e suisse, où les données sont mieux sécurisées.»

A priori, le nombre de centres de données suisses ne devrait pas croître de manière importante ces prochaines années. Même si Safe Host inaugurait en mai à Gland (VD) un centre de 14000 mètres carrés, ce type de nouvelle constructi­on devient une exception, selon René Fell: «Les serveurs informatiq­ues deviennent de plus en plus petits et les centres de données n’ont plus besoin d’être démesurés. On y stocke quatre fois plus de données, dans le même espace, qu’il y a dix ans.»

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(DR) Inauguré en mai, le centre de données de Safe Host, à Gland (VD), peut héberger des serveurs informatiq­ues sur 14 000 mètres carrés.

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