Le Temps

Une véritable Coupe du monde pour la Suisse

- LIONEL PITTET @lionel_pittet

Avec le Costa Rica, la Serbie et surtout le Brésil comme adversaire­s, l’équipe de Vladimir Petkovic a hérité d’un groupe aussi attractif que relevé. Idéal pour démontrer qu’elle a grandi ces dernières années

Les pragmatiqu­es espéraient que l’équipe de Suisse hérite de la Russie ou de la Pologne comme tête de série de son groupe à la Coupe du monde 2018. Les romantique­s appelaient de leurs voeux le Brésil. Ce sont eux qui ont gagné: la Nati affrontera la Seleção de Neymar le 17 juin pour son entrée en lice dans le tournoi russe. Elle enchaînera contre la Serbie le 22 juin, puis contre le Costa Rica le 27 juin.

Un groupe E attractif et relevé, qui lui promet de beaux matches à défaut de lui garantir une qualificat­ion sans trembler. Ce sera une véritable Coupe du monde, avec des affiches rares et du suspense.

La tâche de Xherdan Shaqiri et ses coéquipier­s ne sera pas facile. Mais ils auront ainsi une véritable occasion de démontrer par les résultats ce qu’ils n’hésitent plus à clamer depuis des mois: à l’échelle de l’histoire du football suisse, ils forment une génération spéciale. Peut-être la meilleure de toutes.

Pas de proie facile

En Russie, ils auront l’occasion de le prouver. Il faudra pour cela survivre au premier tour, puis briser le plafond de verre des huitièmes de finale auquel la Nati s’est heurtée en 2006 et 2014. Mais là encore, cela ne relèvera pas de la formalité. En terminant deuxième du groupe E, elle rencontrer­ait le premier du groupe F, celui de l’Allemagne championne du monde…

Jusqu’à ce vendredi, l’équipe de Suisse entretenai­t la réputation d’être plutôt vernie au petit jeu des tirages au sort. En 2006, elle s’est qualifiée pour les huitièmes de finale du Mondial allemand dans un groupe qu’elle partageait avec la France, le Togo et la Corée du Sud. Huit ans plus tard, elle réalisait la même performanc­e au Brésil dans une poule où figuraient le Honduras, l’Equateur et à nouveau la France. Lors des récentes éliminatoi­res, beaucoup d’observateu­rs ont encore pointé la faiblesse d’un groupe composé avec le Portugal, la Hongrie, la Lettonie, les Iles Féroé et Andorre.

Mais à Moscou, les mains innocentes des huit légendes du football réunies spécialeme­nt pour l’occasion à la salle de concert du Kremlin n’ont pas fait le moindre cadeau aux hommes de Vladimir Petkovic. Aucun de ses trois adversaire­s n’a l’allure d’une proie facile.

La Suisse figurait dans le deuxième chapeau. Avec le Brésil, elle a hérité de l’une des têtes de série les plus redoutées. Humiliés en demi-finale de leur Coupe du monde à domicile par l’Allemagne (7-1), les «Auriverde» sont en quête de rachat. Emmenés par un Neymar décidé à devenir le meilleur joueur du monde, ils ont dominé les qualificat­ions de la zone Amérique du Sud, terminant en tête du championna­t avec dix points d’avance sur leur dauphin, l’Uruguay. La plupart des observateu­rs les considèren­t parmi les plus sérieux prétendant­s au titre l’été prochain avec l’Allemagne, l’Espagne et la France.

La Seleção fait vraiment figure d’épouvantai­l, mais les deux autres matches ne seront pas faciles non plus. En 2014, le Costa Rica figurait dans le «groupe de la mort» de la Coupe du monde brésilienn­e avec l’Italie, l’Uruguay et l’Angleterre… et le petit pays d’Amérique centrale avait terminé en tête. Son aventure ne s’était arrêtée qu’en quarts de finale de la compétitio­n. La Serbie, quant à elle, était sans doute la meilleure des huit équipes figurant dans le quatrième chapeau. Elle a terminé en tête de son groupe des éliminatoi­res européenne­s.

Périple géographiq­ue

A chaud, Vladimir Petkovic s’est déclaré «satisfait du tirage», considéran­t que la Suisse a «les moyens de se qualifier». Le périple de son équipe sera sportif, mais aussi géographiq­ue. Son premier match (contre le Brésil) se déroulera à Rostov, à 1000 kilomètres au sud de Moscou. Le deuxième (contre la Serbie) se disputera à Kaliningra­d, dans une enclave entre la Baltique, la Pologne et la Lituanie, à 1300 kilomètres à l’ouest de la capitale. Le dernier (contre le Costa Rica) emmènera la Nati à Nijni Novgorod, à 500 kilomètres à l’est de Moscou. Depuis le camp de base prévu à Samara (1000 kilomètres au sud-est de la capitale), les trajets seront longs et rajouteron­t de la profondeur au défi de sortir d’un groupe difficile.

«Jamais aussi redoutable que dans l’adversité»

Parmi les sept autres, il n’y a guère que le D (Argentine, Islande, Croatie, Nigeria) et le F (Allemagne, Mexique, Suède, Corée du Sud) qui paraissent aussi relevés. La Russie, à domicile, a été plutôt épargnée en héritant de l’Arabie saoudite (contre qui elle disputera le match d’ouverture le 14 juin), de l’Egypte et de l’Uruguay. Le Portugal et l’Espagne disputeron­t le premier gros choc du tournoi le 15 juin, mais devraient ensuite s’en sortir sans trop de soucis face au Maroc et à l’Iran. Dans cinq des huit groupes, deux favoris se détachent très clairement.

Président de l’Associatio­n suisse de football, Peter Gilliéron ne cache pas qu’il aurait préféré un tirage plus clément mais demeure ambitieux: «Le quart de finale demeure l’objectif assigné. J’ai le sentiment que l’équipe de Suisse n’est jamais aussi redoutable que dans l’adversité.»

Il faudra survivre au premier tour, puis briser le plafond de verre des huitièmes de finale auquel la Nati s’est heurtée en 2006 et 2014

 ?? (GRIGORY DUKOR/REUTERS) ?? Diego Maradona, alias «La Mano de Dios», a eu la main lourde pour l’équipe de Suisse lors du tirage au sort de la Coupe du monde 2018 en Russie.
(GRIGORY DUKOR/REUTERS) Diego Maradona, alias «La Mano de Dios», a eu la main lourde pour l’équipe de Suisse lors du tirage au sort de la Coupe du monde 2018 en Russie.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland