THE YOUNG GODS, 30 ANS (ET UN PEU PLUS) DE BIZARRERIES
Un livre regorgeant de documents divers salue l’épopée du groupe fondé à Fribourg en 1985
En 2014, la Confédération remettait le premier Prix suisse de musique, nouvelle récompense fédérale visant à saluer des contributions exceptionnelles. Son lauréat? Le Fribourgeois Franz Treichler, charismatique leader depuis le milieu des années 1980 des Young Gods, groupe suisse pionnier de la musique industrielle, cité comme une influence majeure – on l’a souvent répété – par des artistes tels David Bowie, Trent Reznor (Nine Inch Nails) et The Edge (U2).
En 2005, les Young Gods fêtaient leur vingtième anniversaire en grande pompe, deux soirs durant, à l’enseigne du Montreux Jazz Festival. Une première reconnaissance officielle pour un groupe habitué des clubs underground d’ici et d’ailleurs, qui a toujours cherché à se renouveler et à expérimenter, rendant hommage à Kurt Weill sur son troisième album, avant de développer un projet ambient en compagnie de l’anthropologue Jeremy Narby, de proposer un spectacle en hommage au festival de Woodstock, d’enregistrer avec le quatuor à cordes Barbouze de chez Fior ou encore, plus récemment, de collaborer avec le groupe brésilien Naçao Zumbi. En 2010, le documentaire Pionniers solitaires revenait sur le parcours des «jeunes dieux», expliquant comment le groupe a toujours été porté vers l’avenir, cherchant de nouveaux sons et de nouveaux modes d’expression. Cette année, c’est vraiment vers le passé – avant la sortie attendue d’un nouvel album dans le courant de l’année prochaine – que se tourne The Young Gods/Documents 1985-2015,
un livre compilant pêle-mêle des centaines de photos et de coupures de presse – toutes indexées en fin de volume. L’occasion de se rendre compte, notamment, à quel point leurs premiers enregistrements suscitèrent l’enthousiasme de la presse internationale. Sorti en 1987, The Young Gods, premier effort du groupe éponyme, fut ainsi élu album de l’année par l’influent
Melody Maker londonien, les Helvètes devançant alors Prince, New Order, The Smiths, The Cure, R.E.M. et bien d’autres artistes pour le moins essentiels.
A la suite des près de 700 pages (!) de documents, Franz Treichler revient dans un long entretien sur l’épopée hors norme d’un groupe somme toute inclassable. Evoquant de la bizarrerie d’une musique sortie de nulle part, il renvoie à une certaine tradition suisse du collage, dans laquelle il inclut aussi bien le mouvement Dada que Jean Tinguely et Pipilotti Rist, de même que les Zurichois de Yello, autre groupe suisse à avoir fait oeuvre de pionnier.