Marine Le Pen promet un FN rassembleur
Devant la presse étrangère, la présidente du Front national affirme avoir tiré les leçons de son échec présidentiel de mai 2017. Alliances, implantation locale et changement de nom du parti sont désormais ses priorités
On savait que le Front national n’était plus un parti de contestation. Mais un nouveau pas doit être franchi pour en faire «pleinement un parti de gouvernement», selon Marine Le Pen, qui s’exprimait jeudi à Paris devant la presse étrangère. A moins d’un mois du congrès de sa formation les 10 et 11 mars à Lille, la présidente du FN a décliné son agenda jusqu’aux deux prochaines échéances électorales, qu’elle juge «déterminantes»: les européennes de juin 2019 et les municipales du printemps 2020. Avec trois objectifs: rassembler, poursuivre l’implantation locale frontiste et changer de nom.
«La vérité est que nous avons cassé le plafond de verre»
MARINE LE PEN
Le Front national, créé en 1972, ne s’appellera donc plus ainsi à la fin de 2018, mais ce changement n’interviendra pas au congrès, pour des raisons statutaires. «J’ai un nom en tête que je ne vous dirai pas. Cela doit aller vite», a poursuivi Marine Le Pen en insistant à plusieurs reprises sur la nécessité d’une refondation et du rassemblement pour le parti d’extrême droite, après son échec au second tour devant Emmanuel Macron: «Nous devons nous refonder et cela passe clairement par un nouveau nom. Il faut marquer la fin d’un chapitre et l’ouverture d’un nouveau. Un vote des adhérents sera organisé très vite après le congrès.»
Première alliance
La présidente du Front national avait accusé le coup après sa défaite de mai 2017. Son duel télévisé catastrophique face à l’actuel président français avait semé le doute au sein de sa formation, conduisant son ex-bras droit Florian Philippot à claquer la porte en septembre pour créer son propre mouvement, Les Patriotes, aujourd’hui très marginal. Son retour sur le devant de la scène en ce début 2018, sur fond de Brexit et de nouveaux succès électoraux des partis souverainistes et anti-immigration en Allemagne et en Autriche, est toutefois programmé: «La vérité est que nous avons cassé le plafond de verre lors de cette présidentielle. Un Français sur trois a voté pour moi. Nos huit députés ont été élus en duel au second tour, et non lors d’une triangulaire comme auparavant. Notre implantation locale a partout payé. Et nous avons pour la première fois fait alliance dans l’entre-deux-tours avec un autre mouvement politique. Cette culture de l’alliance sera la clé de nos futurs succès. Nous devons apprendre à faire des compromis qui ne sont pas des compromissions.»
L’objectif du Front national est limpide: ratisser plus large à droite, en restant bien campé sur son national-souverainisme antiUnion européenne. L’alliance conclue pour la présidentielle avec le mouvement Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan (4,7% des voix au premier tour) est donc revendiquée comme une réussite. Et même si Marine Le Pen ne l’a pas confirmé, une liste commune pour les européennes apparaît fort probable. «Une liste de rassemblement est mon souhait. Même si chacun conservera son identité.»
L’équation familiale
Au-delà, c’est vers les Républicains de Laurent Wauquiez, jeune dirigeant très résolu à aller chercher les voix du côté de la droite dure, que la présidente du FN voit son réservoir de suffrages: «Les souverainismes ne sont pas en crise. Au contraire! Il y a un boulevard face au pôle mondialiste incarné par Emmanuel Macron et par la droite traditionnelle, assènet-elle. Laurent Wauquiez est un perroquet qui reprend les refrains de Sarkozy. Il n’a cessé, dans le passé, d’être la caution de l’européisme béat. Le Parti populaire européen (PPE), dont les Républicains sont membres, a la poursuite de l’intégration communautaire dans ses statuts! S’il croit avoir branché les pompes aspirantes sur le FN, qu’il prenne garde, nous pourrions le siphonner.»
L’équation familiale Le Pen est, on le sait, indissociable en France du Front national, parti créé par son père Jean-Marie, à qui la justice a permis au début de février de rester président d’honneur même si sa fille l’a exclu du mouvement. Son éventuelle venue au congrès alimente le suspense. «Si quelqu’un représente mieux que moi le Front national pour la prochaine présidentielle, cette personne pourra être candidate», affirme la présidente, en confirmant que la porte du parti reste ouverte pour sa nièce Marion Maréchal-Le Pen. Celle-ci avait décidé, en 2017, d’abandonner la vie politique à moins de 30 ans après avoir été la plus jeune députée de France. Elle travaille désormais dans une entreprise spécialisée dans l’orientation des étudiants et suit de près les premiers pas du magazine L’Incorrect, lancé par quelques-uns de ses amis politiques. «Marion n’est pas un nouveau visage et je ne fais pas dans la vieillophobie, sourit Marine Le Pen. Mais je n’ai aucun problème là-dessus: elle peut revenir si elle veut revenir.»
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