Breitling écrit un nouveau chapitre de son histoire
Boutiques, collections, communication… La marque rachetée l’an dernier par un fonds d’investissement fait peau neuve. Le nouveau patron, Georges Kern, et son équipe effectuent actuellement un tour du monde pour présenter leur nouvelle stratégie
Ce n'est qu'un détail. Mais, sur le plan purement symbolique, c'est un peu embarrassant. La nouvelle équipe dirigeante de Breitling, à l'oeuvre depuis quelques mois pour faire redécoller la marque horlogère, a littéralement coupé les ailes de son logo. Dévoilée cette fin de semaine à Zurich lors d'un événement réunissant quelque 600 détaillants, journalistes et collectionneurs, cette nouvelle identité visuelle accompagnera une stratégie où le monde de l'aviation ne sera plus l'unique moteur de communication de la marque.
Hier, Shanghai. Aujourd'hui, Zurich. Demain, New York. La marque de Granges (SO) réalise ce début d'année un tour du monde sous forme de roadshow pour présenter sa nouvelle stratégie. Rachetée l'année dernière par le fonds d'investissement CVC à la famille Schneider, Breitling traverse aujourd'hui une révolution sans précédent. Georges Kern, ancien patron des marques horlogères du groupe Richemont, en est le chef d'orchestre. Et une large partie de l'équipe dirigeante est arrivée ces derniers mois.
Objectif Chine
L'un des axes du nouveau projet de Breitling pourrait se résumer en deux mots: objectif Chine. Pour l'heure, la marque réalise l'essentiel de ses ventes (estimées à 430 millions de francs par année) aux Etats-Unis. Avantage: elle n'a quasiment pas souffert de la crise récente qui a surtout frappé l'Asie. Inconvénient: elle se prive d'un important bassin de clients potentiels.
«L'Asie, c'est 50% du chiffre d'affaires dans l'industrie du luxe. Je recommanderais de ne pas l'ignorer et de commencer à faire des produits qui pourraient intéresser ces clients», affirmait Georges Kern dans ces colonnes l'automne dernier. Sa recommandation a logiquement été entendue: la marque prévoit d'ouvrir quelque dix points de vente en Chine au cours des prochains mois.
Nouvelles boutiques, nouveaux produits
Les boutiques, aujourd'hui très orientées pop art, seront d'ailleurs revisitées. Le décor de ces «lofts» – comme s'appelleront ces points de vente – sera résolument vintage. «Breitling n'est pas une marque de cartoons», insistait vendredi matin Georges Kern lors d'une présentation. C'est l'atelier neuchâtelois OÏ qui a décroché le mandat de ce relooking. «Nous avons eu des contacts avec des agences du monde entier, mais ils ont été de loin les meilleurs», assure le patron.
Ce changement de cap s'observe également dans les produits. Connue pour ses montres plutôt larges – qui ne conviennent que difficilement aux poignets plus fins des clients asiatiques – Breitling investit aujourd'hui des tailles plus modestes et des cadrans plus classiques. A l'image de la nouvelle Navitimer 8 lancée ces jours (43 mm de diamètre). Les prix resteront dans le segment 3000-10000 francs mais le nombre de références va être drastiquement réduit (de 600 à 100).
Air, mais aussi terre et mer
Ce repositionnement se traduit enfin et surtout dans la communication. Après l'air, Breitling vise désormais également la terre et la mer, énumère Tim Sayler, directeur marketing. Ce dernier arrive tout juste de chez Audemars Piguet, où il occupait le même poste depuis presque sept ans. Comme les autres membres de la direction, il a acheté des parts dans Breitling – une exigence de CVC, qui attend ainsi une implication maximale de leur part.
«La course automobile, le cyclisme, la plongée… Tout cela fait partie de notre histoire, assure-t-il. Mais le budget marketing de Breitling, pourtant au-dessus de la moyenne de l'industrie, était jusqu'à maintenant investi uniquement dans l'aviation.» Cette diversification devrait également séduire la clientèle asiatique: «Pour beaucoup de Chinois, l'aviation se résume à prendre un Boeing avec Cathay Pacific [ndlr: compagnie aérienne de Hongkong]. Il n'y a pas toute cette relation romantique que les Occidentaux entretiennent avec les pilotes et l'histoire de la discipline», soutient Tim Sayler.
Lorsqu'on lui parle des ailes disparues du logo, il rigole. Mais se dit convaincu qu'il s'agit de la bonne solution. «D'accord, symboliquement, c'est brutal. Mais l'ancien logo était devenu trop chargé, trop lourd, trop vieux. Ce «B» simplifié colle mieux à notre projet.» ▅