Diagnostic critique pour l’Hôpital fribourgeois
Un audit mené sur la gouvernance de l’HFR débouche sur le départ de sa directrice, Claudia Käch. Mais la mesure ne résoudra de loin pas à elle seule tous les problèmes de l’institution
L'Hôpital fribourgeois (HFR) traverse une vraie tempête, à la fois financière et structurelle. A la suite d'un audit ordonné par son conseil d'administration, celui-ci a décidé de se séparer de sa directrice, Claudia Käch, qui était en poste depuis 2014. Même si aucune grosse faute ne peut lui être reprochée, celle-ci quitte l'établissement au 24 février, soit avec effet immédiat. C'est dire l'ampleur de la crise.
Le départ – ou plutôt le licenciement – de Claudia Käch n'est pas une grande surprise. Non seulement celle-ci n'est pas parvenue à sortir l'hôpital des chiffres rouges, mais elle a perdu la confiance aussi bien de son conseil d'administration que de ses employés.
Un conseil lourd et politisé
Premier à réagir mercredi matin à 7h40 déjà, le Syndicat des services publics (SSP) n'a pas caché sa satisfaction. «Mme Käch s'est isolée dans sa tour d'ivoire», a déploré Gaétan Zurkinden, le responsable fribourgeois du SSP, qui récemment s'est opposé à la volonté de la direction de privatiser la buanderie de l'hôpital.
L'audit a été réalisé par la société Triaspect de Bienne, qui a mené près de 45 entretiens avec l'ensemble des instances décisionnelles: le conseil d'administration, la direction, mais aussi avec la Direction de la santé et des affaires sociales de la conseillère d'Etat Anne-Claude Demierre. Conclusion: les structures de l'HFR souffrent de graves lacunes de gouvernance. Le conseil d'administration, composé de 17 membres, est lourd et trop politisé. Les auteurs de l'audit proposent de le réduire à 9 personnes et d'en exclure à terme le ou la conseillère d'Etat, dont la double casquette pose problème.
Structure multisite
Si Claudia Käch est le premier fusible à sauter à la suite de cet audit, son départ ne résout pas les gros problèmes auxquels est confronté l'hôpital. «Bien que vieille de plus de dix ans, la nouvelle structure multisite de l'HFR n'est toujours pas arrivée à
maturité», a regretté le vice-président du conseil d'administration, Pierre Aeby.
L'Hôpital fribourgeois a mis beaucoup de temps à digérer le traumatisme de la disparition des hôpitaux de district, une entité à laquelle les Fribourgeois restent très attachés. Ces régionalismes avaient déjà usé la précédente directrice, Pauline de Vos. L'hôpital a perdu de nombreuses années à surmonter ce traumatisme alors qu'il aurait dû se préparer à la libéralisation du marché hospitalier, intervenue en 2012.
L'Hôpital fribourgeois est désormais à la croisée des chemins. Il sera assurément déchiré entre d'une part, les tenants d'un hôpital public dont le personnel conserve le même statut que celui de l'Etat et, d'autre part, les partisans d'une autonomisation de ses instances dirigeantes, qui veulent le libérer des contraintes du politique.
Mission impossible
«Le vrai problème de l'HFR n'est pas sa directrice, mais sa très faible marge de manoeuvre», déclare le député PDC Markus Bapst, qui a déposé une motion pour lui conférer davantage d'indépendance.
Président du conseil d'administration, Philippe Menoud s'est déclaré «raisonnablement optimiste» pour l'avenir de l'hôpital. Il doit être bien seul à penser cela. Cette année, l'HFR prévoit un déficit de 21 millions au budget, qui en est à sa énième version.
Le conseil d'administration doit non seulement réaliser 20 millions d'économies, mais aussi convaincre le Conseil d'Etat – avec lequel il se chamaille depuis des mois – de lui accorder 25 millions au titre des prestations d'intérêt général (PIG). Une mission quasiment impossible dans les conditions actuelles.
Le conseil d'administration porte lui aussi une responsabilité dans cette situation inquiétante, au point que certains ont aussi demandé la tête de Philippe Menoud. «C'est l'institution qui compte, pas moi», a assuré ce dernier, qui s'est déclaré prêt à «partir demain s'il le faut». Quoi qu'il en soit, les futurs dirigeants de l'HFR devront avoir le courage de prendre des décisions impopulaires.
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