JULIEN GATILLON SE REMET EN PISTE
A Megève, au sein d’un tout nouvel écrin hôtelier propriété de la famille Rothschild, le jeune chef poursuit sa grande aventure culinaire dans le restaurant doublement étoilé Le 1920
◗ Au coeur du domaine skiable du Mont d’Arbois, perché sur les hauteurs de Megève, un nouveau bijou hôtelier vient tout juste de sortir de terre. Avec ses faux airs de chalets de luxe d’Aspen, ce complexe étonne autant qu’il détonne en alliant subtilement un style alpin et une approche moderne. Au sein de ce joyau flambant neuf géré par la chaîne Four Seasons, Le 1920 est un clin d’oeil à l’année où fut créée la station d’hiver des Alpes françaises par la baronne Noémie de Rothschild. Près d’un siècle plus tard, le talentueux chef Julien Gatillon – ancien disciple de Philippe Rochat et de Benoît Violier au restaurant de l’Hôtel de Ville à Crissier – y marie gourmandise et tradition.
Vêtu d’une veste de cuisine immaculée, il a le regard perçant et les idées qui fusent. Natif de Poitou-Charentes, le jeune chef n’alimente aucun compte Instagram et ne s’affiche pas sur Facebook. «Je ne suis pas quelqu’un qui aime se mettre en avant. Il faut garder les pieds sur terre. N’oublions pas que nous ne sommes pas là pour sauver des vies. Nous ne faisons que de la cuisine», insiste Julien Gatillon alors que le restaurant est étrangement calme pour la saison. La faute à un soleil radieux qui caresse la montagne après quarante-huit heures de chutes de neige.
LE GOÛT DES BELLES CHOSES
Qu’importe… le repas est un festival d’excellence: la finesse et la justesse des jeunes poireaux rafraîchis au caviar et crème de cerfeuil émerveillent autant que les fameux rigatonis, tétragone, vieux parmesan à la truffe noire et la délicieuse noix de ris de veau, dorée au sautoir, accompagnée de ses cardons épineux de Pregny au beaufort et sa sauce au vin jaune.
Pour autant, Julien Gatillon reste extrêmement lucide. Son univers culinaire ne ressemble en rien à celui de ses confrères qui oeuvrent alentour. Lui ne travaille pas les produits de la région à outrance et ne s’en cache pas. «Ce n’est pas mon créneau. Je défends la grande gastronomie française de tradition au même titre que la famille pour laquelle je travaille.» Ici, tout commence par la sélection d’un produit de sai-
son cuit au millimètre et assaisonner avec précision. «Je recherche une certaine cohérence en créant au maximum trois fils conducteurs dans l’assiette. L’essentiel est de retrouver le goût des choses.» CHASSEUR D’ESCARGOTS
Au 1920, Julien Gatillon et ses équipes poursuivent ce qu’ils avaient démarré au Grand Chalet du Mont d’Arbois, «mais dans un tout nouvel écrin», précise celui qui évolue dans une ambiance de luxe bien éloignée de ce qu’il a connu à l’époque où, avec sa grand-mère, il chassait les escargots. «Elle cuisinait à l’ancienne avec un fourneau à bois. Elle adorait la lotte à l’américaine et même si le poisson était trop cuit, ce plat reste pour moi un souvenir impérissable.» Sa passion pour la cuisine ira ensuite crescendo. Le déclic se fera à l’Ecole hôtelière lors des premiers coups de feu.
Mais c’est son apprentissage au Restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier qui va tout changer. Julien Gatillon passe par tous les postes en tant que chef de partie: crustacés, volaille, viandes, poissons, garnitures et garde-manger. Une complicité se crée avec le chef Benoît Violier qui le prend sous son aile et lui inculque les valeurs du métier. «Il me surnommait «fiston». Maintenant, c’est le chef Franck Giovannini qui m’appelle ainsi. Crissier, c’est un établissement qui marque par sa rigueur et par son humanité, un véritable exemple pour tous les gens qui ont eu le privilège d’y travailler. Sans eux, je n’en serais pas là.»