Le Temps

Tiger Woods sort du bois. Enfin!

GOLF Deuxième du Valspar Championsh­ip à un coup du vainqueur Paul Casey, Tiger Woods a envoyé le signal qu’on attendait depuis quatre ans: il est de retour à son meilleur niveau

- PHILIPPE CHASSEPOT

Calculer le décalage horaire avec les Etats-Unis risque bien de redevenir le sujet principal de conversati­on des fans de golf. Savoir à quelle heure suisse joue Tiger Woods, pour rester scotché quatre heures durant devant le joueur le plus dément de l’histoire de son sport. Pour regarder ce spectacle unique avec des yeux de hibou, et hurler sans aucune pudeur quand l’homme au t-shirt rouge rentre des putts de nulle part pour chasser la victoire.

Sourire révélateur

Tiger Woods est-il de retour? La question revient depuis trois ans, à chaque tentative de come-back. Mais là, c’est enfin concret. Il a fini deuxième d’un tournoi très relevé ce dimanche, auquel participai­ent les tout meilleurs mondiaux. A un coup du vainqueur Paul Casey, après avoir eu sa chance sur le dernier green pour arracher le play-off (un putt de treize mètres resté un chouïa trop court). Signe très révélateur: Woods a quitté le parcours tout sourire, lui qui ne déteste rien tant que finir deuxième («le premier perdant», selon sa définition). Parce qu’il savait que la nuit était derrière lui.

Tiger Woods n’a repris la compétitio­n que fin janvier, et il n’a joué que quatorze tours de golf sur le circuit américain. Quatre fois opéré du dos depuis mars 2014, il était incapable de marcher il y a un an, ou de sortir de son lit sans se faire aider voilà six mois. Il l’avait dit lui-même fin 2017: «La question aujourd’hui, ce n’est pas de rejouer au plus haut niveau, mais juste de pouvoir mener une vie normale et m’amuser avec mes enfants.» Alors on trouvera toujours un oracle de pacotille au comptoir d’un club-house pour prétendre: «Je vous l’avais bien dit!»; la vérité, c’est qu’absolument personne n’y croyait.

Les réactions de ses collègues profession­nels sur Twitter valent tous les aveux. Ainsi Edoardo Molinari, trois victoires sur le Tour européen: «On est tous en train de rêver en plein jour, non? Ça n’est pas possible!» Puis: «Je me surprends dans ma chambre d’hôtel en train de hurler et de serrer le poing parce que Tiger vient de sauver son par.»

On ne devrait pas se montrer trop gourmand après une si longue attente, mais Woods aurait même dû gagner ce tournoi. Il a joué un golf fantastiqu­e toute la semaine, et ce dimanche, quelques petits putts en milieu de parcours n’ont fait qu’effleurer le trou plutôt que tomber dedans. Surtout, on a retrouvé toute la panoplie de sa grande époque: des pleins swings, un engagement sans retenue dans le rough, et même un par sauvé en s’éclatant la main contre un tronc d’arbre, signe d’un engagement total parce qu’un confort retrouvé.

Meilleur témoin de l’histoire, son compatriot­e Brandt Snedeker, qui a joué six fois avec lui cette année: «Son jeu de fer est revenu. Je l’ai vu taper des coups à l’ancienne, comme lui seul a jamais été capable de le faire.»

Woods s’incline devant l’Anglais Paul Casey (40 ans, 12e joueur mondial), en manque de victoire depuis 2014 parce que plombé par des dimanches aux nerfs délicats. Là, il a joué l’un des tours de sa vie (65, -6) pour revenir de l’arrière. Le même Casey qui avait déclaré vendredi: «Je veux que Tiger joue bien au golf, je veux qu’il gagne à nouveau, pour montrer à tous les petits jeunes ce que nous avons dû endurer pendant des années. Je veux gagner cette semaine, mais si ça n’arrive pas, alors je veux que ce soit lui.»

Voilà Tiger Woods revenu à la 149e place mondiale, lui qui était descendu 1199e en novembre 2017. Il rejouera dès jeudi à l’Arnold Palmer Invitation­al, un tournoi qu’il a déjà remporté huit fois. Puis au Masters, tout début avril, théâtre de quatre de ses quatorze victoires en Grand Chelem.

Son physique, seule réserve

Seule réserve, les questions sur son état physique resteront constantes, tant il a semblé cassé de partout au fil des ans. On aura toujours une crainte à la moindre grimace, une angoisse à chaque forfait. «J’ai tellement attendu que ça aille mieux, rappelait-il en début de semaine. Vous n’avez aucune idée à quel point ça a été dur. Aujourd’hui, je ne suis plus capable de rotation comme avant, je suis obligé d’apprendre à taper les coups différemme­nt. Le processus est toujours en cours.»

«J’ai tellement attendu que ça aille mieux. Vous n’avez aucune idée à quel point ça a été dur»

TIGER WOODS, GOLFEUR

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