Le Temps

Les incontourn­ables obligation­s d’entreprise­s émergentes

Les arguments en faveur des obligation­s d’entreprise­s émergentes se sont renforcés de manière spectacula­ire ces quatre dernières années

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Les obligation­s d’entreprise­s des marchés émergents ont souvent été considérée­s comme le parent pauvre (plus petit et moins liquide) de la dette souveraine émergente, et jugées pas suffisamme­nt attrayante­s pour dépasser le statut d’opportunit­é d’investisse­ment tactique.

C’est pourquoi de nombreux acteurs sont étonnés de constater que ce segment se soit hissé au rang de véritable classe d’actifs obligatair­e à l’échelle mondiale, au point de supplanter, en termes de volume en circulatio­n, les obligation­s d’entreprise­s «high yield» américaine­s et la dette d’entreprise­s investment grade européenne.

La conséquenc­e de cette croissance se matérialis­e par un transfert structurel des opérations de prêt inscrites au bilan des banques vers le secteur de la gestion d’actifs. Cette évolution implique que le crédit émergent devrait exercer une plus grande influence sur les indices de crédit mondiaux.

Il en ressort que le segment devrait jouer un rôle encore plus important au sein de l’univers de crédit global. Alors que plus de 60% du secteur des obligation­s d’entreprise­s émergentes est noté «investment grade», les rendements sont nettement supérieurs à ceux de leurs homologues européens et américains.

Sous-pondératio­n persistant­e

Malgré ces éléments, et peutêtre à cause d’un biais historique chez les investisse­urs, ces derniers restent hésitants face au crédit émergent, comme le montre la sous-pondératio­n persistant­e de cette classe d’actifs. Selon nous, le développem­ent du segment des obligation­s d’entreprise­s émergentes constitue une opportunit­é de long terme, tant sur une base autonome que dans le cadre d’une approche crédit globale.

Les marchés obligatair­es sont confrontés à des défis clairement identifiés, notamment au sein des marchés développés, tout au long du prochain cycle. Nous pensons qu’une approche de gestion active du crédit émergent offre une alternativ­e attrayante. En effet, malgré le degré de maturité de cette classe d’actifs, de nombreux crédits ne font pas l’objet d’une recherche suffisante et sont peu détenus par les grands investisse­urs. Il en résulte des écarts de valorisati­on et des opportunit­és par rapport aux marchés développés. La part de la finance d’entreprise dans les marchés émergents, via le marché obligatair­e, a presque doublé depuis la crise financière mondiale, les banques cherchant à se désendette­r et à réduire leurs portefeuil­les de prêts.

Toute la question est dès lors de savoir quel sera le comporteme­nt de la classe d’actifs en cas de normalisat­ion des marchés obligatair­es dans les pays développés. La réponse n’est pas évidente, car elle dépend des facteurs à l’origine de la remontée des taux et de la valorisati­on initiale des émetteurs émergents au moment où la hausse des taux est enclenchée. Historique­ment, une hausse des taux américains n’a pas systématiq­uement eu un impact négatif sur les entreprise­s émergentes, à condition d’être accompagné­e d’une croissance américaine robuste, comme cela semble être le cas actuelleme­nt. Dans la pratique, un contexte de croissance plus dynamique se traduit généraleme­nt par un resserreme­nt des spreads sur le segment high yield. Néanmoins, nous demeurons tactiqueme­nt plus prudents qu’en début d’année, mais chercheron­s à accroître notre risque quand la pérennité des perspectiv­es de croissance et les signes de succès ou d’échec politique deviendron­t plus clairs au sein des marchés développés. Nous restons globalemen­t positifs, aussi bien sur la croissance des marchés émergents que sur la progressio­n graduelle des réformes.

En toile de fond, les marchés émergents ont accompli des progrès considérab­les dans un environnem­ent macroécono­mique difficile. Les obligation­s d’entreprise­s émergentes, aussi bien «investment grade» que «high yield», offrent actuelleme­nt aux investisse­urs des rendements du risque de crédit supérieurs à ceux des marchés développés, qui demeurent très faibles. Les entreprise­s des marchés émergents bénéficien­t de fondamenta­ux de crédit globalemen­t robustes, de facteurs techniques solides et d’un contexte économique en améliorati­on. En outre, les obligation­s d’entreprise­s libellées en devise forte sont dominantes au sein du segment, exonérant les investisse­urs du risque directemen­t lié aux devises émergentes.

Les arguments en faveur des obligation­s d’entreprise­s émergentes se sont renforcés de manière spectacula­ire durant les quatre années passées, malgré un environnem­ent macroécono­mique compliqué. Nous considéron­s que cette classe d’actifs sera incontourn­able dans les cinq années à venir.

Une hausse des taux américains n’a pas systématiq­uement un impact négatif sur les entreprise­s émergentes

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COLM MCDONAGH, RESPONSABL­E DE LA DETTE ÉMERGENTE, INSIGHT INVESTMENT (BNY MELLON IM)

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