Le Temps

Mövenpick, son histoire s’écrira en France

Le groupe zougois a annoncé lundi l’acquisitio­n de sa branche hôtelière par le français AccorHotel­s. Un marché conclu avec le leader européen du secteur pour 560 millions de francs

- CHAMS IAZ @IazChams

La célèbre marque suisse de restaurati­on Mövenpick se sépare peu à peu de ses activités. Après avoir vendu ses emblématiq­ues glaces à Nestlé en 2003, c’est au tour de ses hôtels haut de gamme de changer de mains. Pour 560 millions de francs, sa société hôtelière a été vendue au groupe français AccorHotel­s lundi.

Le secteur est en phase de consolidat­ion ces dernières années. Avec l’achat de Mövenpick Hotels and Resorts, AccorHotel­s pourra encore monter en gamme et asseoir sa position de leader européen. La holding zougoise de Mövenpick représente 16000 collaborat­eurs, présents dans 84 hôtels et 27 pays, soit 20000 chambres. De plus, 42 projets d’hôtels sont en cours de réalisatio­n d’ici à 2021.

«Un demi-milliard de francs suisse, c’est un prix raisonnabl­e», justifie Demian Hodari, professeur de management stratégiqu­e à l’Ecole hôtelière de Lausanne (EHL), avant d’ajouter: «Le prince d’Arabie saoudite Al-Walid, propriétai­re de [33,3% de cette branche de] Mövenpick, a peut-être eu besoin de vendre ses actions pour des raisons politiques ou bien a souhaité se concentrer sur les Four Seasons dont il est aussi propriétai­re.»

«Phase de consolidat­ion»

«Mövenpick n’a pas vendu ses hôtels, mais son entreprise», rappelle le professeur. En effet, les groupes hôteliers ne sont généraleme­nt pas propriétai­res de biens immobilier­s, mais fonctionne­nt grâce à des franchises ou des contrats de gestion. Ils achètent un nom et bénéficien­t, s’il y en a, des avantages qui vont avec. Demian Houdari souligne le dynamisme du groupe français, qui était, lui, propriétai­re de nombreux hôtels: «Le président-directeur général d’Accor a séparé les biens dans AccorInves­t et il a ensuite vendu plusieurs parties de cette entreprise. Désormais, il utilise cet argent en achetant des entreprise­s plus petites, comme Mövenpick, et les intègre dans le système Accor.»

Jean-Christophe Babin, patron de Bulgari, la marque horlogère et joaillière qui se diversifie également dans l’hôtellerie, note que «les grands groupes hôteliers sont en train de passer par des phases de consolidat­ion». Mövenpick est une chaîne indépendan­te, qui a «certaineme­nt vu les synergies possibles avec un grand groupe comme AccorHotel­s. Il peut lui apporter plus de clients et des coûts opérationn­els sur les réservatio­ns plus compétitif­s», souligne-t-il.

L’objectif des entreprise­s hôtelières est d’être plus grandes pour être concurrent­ielles. C’est pourquoi, il y a deux ans, Marriott a acheté Starwoods, soit une entreprise de 1000 hôtels, et AccorHotel­s a racheté le canadien FRHI et ses enseignes Fairmont, Raffles et Swissôtel. Pour le professeur de l’EHL, Mövenpick n’avait que deux solutions: «Grandir en achetant d’autres entreprise­s ou être racheté.»

L’enseigne suisse a choisi la deuxième option, ce qui ne surprend pas Jean-Christophe Babin. «Mövenpick permettra au groupe français d’avoir une marque vraiment haut de gamme» et confortera sa position sur ce marché suite au rachat de FRHI. «Du point de vue d’AccorHotel­s, il y a une logique de portefeuil­le qui est indiscutab­le», assure-t-il. Le professeur de management stratégiqu­e le rejoint sur ce dernier point. «AccorHotel­s veut s’agrandir et avec cette transactio­n, il gagne 84 hôtels et 40 autres dans les prochaines années. De plus, la marque Mövenpick va certaineme­nt rester, car elle est connue en Asie, en Afrique et dans le Moyen-Orient, une zone importante pour Accor qui y a une présence assez faible», analyse-t-il.

Fondé en 1948

L’histoire de l’entreprise suisse continuera donc en France. Le fondateur de la marque, Ueli Prager, fils d’hôtelier, avait dû emprunter pour ouvrir son premier restaurant en 1948 à Zurich. Le premier maillon d’une chaîne à succès qui l’a conduit à ouvrir un autre restaurant en Allemagne en 1965, puis à s’ouvrir à l’internatio­nal. Mövenpick s’est lancé dans le secteur hôtelier en 1973 afin de diversifie­r son groupe. Cinq ans plus tard, la société Mövenpick fait son entrée en bourse et devient un groupe internatio­nal spécialisé dans la restaurati­on, l’hôtellerie et le commerce de vin.

Depuis le tournant des années 2000, l’enseigne à la mouette a cédé son activité de glace, s’est retirée de la bourse suisse en 2007 et, suite à la vente de ses hôtels, se concentre donc sur le segment de la restaurati­on et de la vente de vin.

«La marque Mövenpick va certaineme­nt rester, car elle est connue en Asie, en Afrique et dans le Moyen-Orient»

DEMIAN HODARI, PROFESSEUR DE MANAGEMENT STRATÉGIQU­E À L’ÉCOLE HÔTELIÈRE DE LAUSANNE

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(DR) Suite à la transactio­n, «Mövenpick permettra au groupe français d’avoir une marque vraiment haut de gamme», explique Jean-Christophe Babin, patron de Bulgari, marque horlogère et joaillière qui se diversifie dans l’hôtellerie.

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