Le Temps

Quelle gouvernanc­e pour le sport au XXIe siècle?

- PROFESSEUR À L’UNIVERSITÉ DE LAUSANNE Inscriptio­n sur www.unil.ch/idheap/ rendez-vous

Une soixantain­e de fédération­s sportives internatio­nales (FI) gouvernent le sport mondial depuis la Suisse, de la puissante Fédération internatio­nale de football associatio­n (FIFA), basée à Zurich depuis 1937, jusqu’à la Fédération internatio­nale de wushu (art martial chinois aussi appelé kung-fu) récemment installée à Lausanne. Elles édictent et contrôlent des règles mondiales, attribuent leurs championna­ts à des villes et pays, regroupent les fédération­s nationales et leurs clubs, luttent contre les dérives du sport comme le dopage ou la corruption.

Ces fédération­s souvent centenaire­s se voient aujourd’hui contester le monopole de l’administra­tion du sport par de nombreux nouveaux acteurs. Des acteurs commerciau­x comme les sponsors ou les ligues profession­nelles, mais aussi des acteurs publics comme des gouverneme­nts locaux ou nationaux, de plus en plus impliqués dans l’organisati­on de manifestat­ions sportives, dans la lutte contre les problèmes du sport ou tout simplement dans l’incitation à l’activité physique. Ce système à trois têtes nécessite une organisati­on du sport qui renouvelle celle en place grosso modo depuis la Belle Epoque et qui soit meilleure que la gouvernanc­e actuelle, souvent mise à mal par des scandales qui préoccupen­t de plus en plus les athlètes et les pouvoirs publics, notamment européens.

Mais qu’est-ce qu’un sport? Toutes sortes de sports ou discipline­s se créent tous les jours comme le swimrun ou le footgolf. D’autres se déchirent entre plusieurs FI existantes comme le stand up paddle (que les FI de canoë et de surf voudraient bien gouverner et qui ont demandé un avis au Tribunal arbitral du sport) ou le parkour (qui hésite entre la FI de gymnastiqu­e et sa propre FI autonome). Des sociétés commercial­es contestent le monopole de fait de certaines FI, comme Ice Derby qui voudrait organiser des compétitio­ns de patinage de vitesse liées à des paris sans interféren­ce de la FI de patinage, ainsi que le demande la Commission européenne.

Et l’eSport, ou plutôt les dizaines de jeux vidéo entre équipes ou individus qui frappent à la porte des grandes compétitio­ns internatio­nales et des associatio­ns faîtières de FI. Certains ont obtenu d’être inclus dans le programme des Jeux asiatiques de Jakarta 2018 et d’autres ont fait l’objet d’un tournoi organisé par un sponsor olympique juste avant les Jeux d’hiver de Pyeongchan­g 2018.

L’arrivée d’énormes quantités de données (big data) permet de mieux cerner les supporters ou les pratiquant­s qui peuvent se mettre en contact au travers d’une simple applicatio­n sur un téléphone intelligen­t, sans l’intermédia­ire d’un club. Voilà qui pourrait «disrupter» la traditionn­elle structure pyramidale du sport organisé, au sommet duquel se trouvent les fédération­s nationales et internatio­nales. D’autant plus que leur financemen­t traditionn­el par les droits de télévision s’essouffle au profit de la diffusion de vignettes vidéo sur internet.

Pour bien comprendre ces défis et en débattre, l’Université de Lausanne a invité le 7 juin prochain Patrick Baumann, le président de toutes les FI regroupées dans l’Assemblée globale des fédération­s sportives internatio­nales (GAISF), aussi membre du Comité internatio­nal olympique (CIO), du groupe de travail «Gouvernanc­e» de l’Associatio­n des fédération­s internatio­nales olympiques des sports d’été, du conseil de fondation de l’Agence mondiale antidopage (AMA), président de Lausanne 2020, etc. Il est l’un des dirigeants du sport mondial les plus au fait de toutes ces questions relatives à l’avenir du sport et de sa gouvernanc­e.

«Toutes sortes de sports ou discipline­s se créent tous les jours comme le swimrun ou le footgolf»

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JEAN-LOUP CHAPPELET

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