Le Temps

Les investisse­ments dans la fintech décollent

Les fonds levés par des start-up en 2017 ont triplé par rapport à 2016. Mais Genève et Lausanne restent en retrait d’une tendance qui touche avant tout Zurich et Zoug

- MATHILDE FARINE, ZURICH @MathildeFa­rine

Presque trois fois plus. En 2017, les start-up actives dans la fintech ont levé 151 millions de francs, contre 61 millions l'année précédente. C'est ce que révèle un rapport publié cette semaine par Swisscom, son think tank E-foresight et l'Institut pour les services financiers de Zoug (IFZ). Le nombre de tours de table s'est élevé à 48 au total.

A cette cagnotte record s'ajoutent les ICO (initial coin

offerings), ces levées de fonds à mi-chemin entre le crowdfundi­ng et l'entrée en bourse, qui se sont multipliée­s depuis l'an dernier à travers le monde. La Suisse fait partie des destinatio­ns les plus prisées de ce nouveau type de financemen­t, avec un montant total dépassant les 283 millions en 2017, récoltés par sept fintechs. La plus importante ICO, celle de Bancor, qui permet d'échanger des cryptomonn­aies, a atteint 151 millions de francs.

Un secteur mainstream

Des développem­ents qui ne surprennen­t pas Thomas Brändle, cofondateu­r de l'associatio­n des start-up suisses de la finance. Ce secteur n'est plus un phénomène de mode, selon lui, c'est devenu mainstream et tout le monde doit s'y intéresser. «Nous ne parlons plus de banque et de fintech comme de deux industries séparées», explique celui qui a lancé et dirige Run my Accounts, qui permet de gérer la comptabili­té des PME et des start-up.

Les cryptomonn­aies et la blockchain attirent le plus (37% des fonds investis), suivies par l'investisse­ment et la gestion d'actifs (19%) et la recherche liée aux données (15%). «L'importance des cryptos ne nous a pas étonnés, on voit bien à quel point tout le monde s'y intéresse et en particulie­r dans la Crypto Valley de Zoug, où l'environnem­ent et la régulation attirent toujours plus d'activités. Cette tendance va continuer», estime Manuela Disch, auteure du rapport et consultant­e chez Swisscom.

Genève et Lausanne distancées

C'est aussi le développem­ent de ces activités qui a changé la carte du financemen­t de la fintech suisse. Cette dernière a toujours été plus développée autour de Zurich et de Zoug, mais l'écart se creuse. L'an dernier, les deux cantons alémanique­s ont récolté respective­ment 58,5 millions et 32,7 millions, alors que Vaud et Genève se sont limités à 8,5 et 5,7 millions. Même SaintGall rivalise avec les deux cantons romands puisque ses fintechs ont touché 7,5 millions.

Au total, selon le dernier recensemen­t de Swisscom en mai, la Suisse compte 232 start-up actives dans la fintech. L'investisse­ment et la gestion d'actifs est le sousgroupe le plus important, avec 65 entités, suivi du crowdfundi­ng (47), puis des cryptos (34).

Un sondage effectué ces dernières semaines montre que les fondateurs de start-up estiment que la période actuelle est propice pour créer une entreprise ou chercher des financemen­ts. D'autant plus que les sources ne sont pas près de se tarir, selon les experts de Swisscom, qui tablent sur une poursuite de la croissance des fonds cette année. Pas plus tard que vendredi, plusieurs entreprise­s, dont Helvetia, Ringier (copropriét­aire du Temps) et Investis ont d'ailleurs annoncé qu'ils avaient investi dans Flatfox, une fintech spécialisé­e dans l'immobilier. Sans toutefois dévoiler le montant accordé.

Plus de prises de risque

En outre, «les investisse­urs, qui sont pour la plupart locaux, sont de plus en plus enclins à investir des montants importants. Ils sont davantage prêts à prendre des risques», explique encore Manuela Disch. Elle se base notamment sur la taille des transactio­ns réalisées en 2017, dont 11 ont dépassé les 5 millions, alors qu'il y avait eu seulement deux transactio­ns de cette valeur en 2016. La tendance risque aussi de continuer pour les ICO, mentionne encore le rapport, citant celle de SwissBorg, qui a obtenu 50 millions au début de cette année pour son projet de gestion de cryptofort­une.

Reste l'assurance, un peu à la traîne puisque les «insurtechs» n'ont obtenu que 5% des fonds levés en 2017. «L'industrie de l'assurance est en soi un peu plus prudente. Et il n'y a pas que les fournisseu­rs qui sont lents à adapter leur offre, les clients prennent aussi du temps à les adopter», explique encore Thomas Brändle. Il estime que les gens sont plus susceptibl­es de tester une nouvelle technologi­e pour le paiement que de changer leur routine quand il s'agit d'assurance. Ce qui n'empêche pas cette industrie d'offrir «un potentiel énorme».

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