AU SALON INDIEN DU THÉÂTRE DE VIDY
Un film peut se consommer dans un multiplex avec pop-corn. Il peut aussi se déguster dans un écrin inattendu. A Lausanne, Le livre d’image bénéficiera cet automne d’un traitement original, puisqu’il sera montré au Théâtre de Vidy, un établissement que Jean-Luc Godard goûtait au temps de René Gonzalez. L’idée est de recréer «un lieu de cinéma en dehors des salles de cinéma. C’est comme se retrouver dans le Salon indien de la première projection des frères Lumière», explique Fabrice Aragno. Investir un café ou une salle de classe, c’est d’abord une incitation à la rencontre, au débat, au dialogue.
La délocalisation autorise aussi des innovations techniques comme décaler les haut-parleurs, hérésie inimaginable dans une salle de cinéma. Par ailleurs, il ne s’agit pas d’une véritable projection, puisque le film est montré sur un écran plat «Aujourd’hui, sur les téléviseurs 8K, le contraste entre le noir et le blanc est de 10 000, alors qu’en salle, on arrive à peine à 2000. Le livre d’image a été fabriqué sur un grand écran plat, avec 10 000 de contraste. Projeté sur un écran blanc, le noir n’est jamais noir. C’est de la non-lumière sur du blanc, toujours un peu grisâtre. Tandis que sur un écran plat, LED ou plasma, c’est noir noir. Un gouffre.»
Le manifeste poétique mérite indéniablement cet abîme nocturne. «A cause de quoi la lumière? – A cause de l’obscurité» (in Film socialisme)… A. DN ▅