Le Temps

La Banque cantonale de Zurich accusée d’obstructio­n

La ZKB avait à peine annoncé, mardi, un accord avec la justice américaine que le procureur de Manhattan a publié un communiqué l’accusant d’avoir dissuadé deux de ses employés de collaborer

- AWP

Epinglée dans le cadre du litige fiscal américain, la Banque cantonale de Zurich (ZKB) n’a pas coopéré pleinement avec la justice outre-Atlantique, à en croire le Départemen­t de justice (DoJ). L’établissem­ent, coupable d’avoir aidé des contribuab­les américains à se soustraire au fisc, aurait dissuadé deux employés de collaborer avec les autorités. Ces deux banquiers, l’un toujours salarié et l’autre désormais à la retraite, doivent encore clore les procédures les concernant depuis leur mise en examen en 2012.

Mardi, la ZKB annonçait l’accord trouvé avec la justice américaine pour solder son contentieu­x, avec à la clé une pénalité financière de 98,5 millions de dollars (98,1 millions de francs). Publié dans l’intervalle, un communiqué du procureur de Manhattan jette une lumière crue sur les infraction­s dont s’est rendue coupable la banque, l’un des cinq établissem­ents systémique­s de Suisse.

Deux mille comptes non déclarés

Entre 2002 et 2009 au moins, la banque a aidé activement des contribuab­les américains à se soustraire au fisc. Les services du procureur ont recensé quelque 2000 comptes non déclarés de clients qui ont soustrait au fisc un total de 39 millions de dollars au cours de la période 2002-2013. La masse sous gestion provenant de cette clientèle a atteint un pic de 794 millions de dollars en 2008. Entre 2002 et 2013, ces fonds ont permis de générer des recettes brutes de quelque 24 millions de dollars et de dégager un bénéfice d’environ 21 millions pour la banque.

En outre, la ZKB a conclu des accords spécifique­s avec 349 clients afin de les identifier uniquement par un code et non par leur nom dans le cadre de la relation bancaire. Elle a également recouru à des sociétés écrans afin de dissimuler des avoirs. Un portail virtuel géré par un tiers (swissbank-accounts.com) permettait même à des contribuab­les américains désireux d’échapper au fisc d’ouvrir des comptes auprès de la banque zurichoise par le truchement d’internet.

Bonne volonté diminuée

Le personnel était tout à fait conscient du caractère illicite de ces méthodes, utilisant couramment le terme «schwarzgel­d» (argent sale) à l’interne, précise le communiqué. Ces pratiques se sont poursuivie­s après l’éclatement de l’affaire UBS en 2008. Devant la déterminat­ion des autorités américaine­s à punir toutes les banques suisses fautives, la ZKB a progressiv­ement réduit ses activités aux Etats-Unis dès 2009 pour y mettre fin en 2012. La banque a tenté par la suite d’obtenir un certificat de conformité auprès du fisc américain.

Le communiqué fournit également des détails sur trois employés de la banque (au moment des faits) qui sont dans le viseur de la justice dans le cadre de cette affaire. L’un d’entre eux est décrit comme un «fugitif». Les deux autres, âgés de 53 et 60 ans et de nationalit­é suisse, doivent comparaîtr­e devant la justice américaine le 30 novembre prochain. Ils risquent jusqu’à un an de prison.

Le texte affirme que le départemen­t des ressources humaines de la ZKB a tenté de dissuader ces deux personnes de coopérer avec la justice US, diminuant ainsi la bonne volonté (cooperatio­n credit) de la banque dans ce dossier.

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