Le Temps

Un trailer, comme les autres

- Par Servan Peca

Je ne suis pas un marginal, mais j'aime bien faire un pas de côté. Eviter, si possible, de faire comme la masse. Je l'écris avec conviction. Pourtant, en sport, je fais tout le contraire: comme avec mon grand amour le foot…

Mardi et jeudi, c'était jour d'entraîneme­nt. Et puis samedi il y avait match. Pendant plus de vingt ans, je l'ai pratiqué. Puis, il y a cinq ans, j'en ai trouvé un autre. J'ai changé ma façon de faire des footings de footeux, allongé les distances, quitté le bitume, grimpé des pentes pour les redescendr­e: je me suis mis à la course de montagne.

C'était beau, c'était pur. Plus personne ne pouvait me dicter, à coups de sifflet, à quel moment je devais courir. J'avais trouvé un sport original dans lequel j'étais libre.

Du moins c'est ce que je croyais. En réalité, je ne courais pas en montagne, j'étais juste devenu un trailer. Comme ceux qui énervent les randonneur­s parce qu'ils «ne prennent pas le temps de regarder le paysage». Comme ceux qui s'achètent le même t-shirt Salomon que Kilian Jornet.

Comme les autres, j'ai acheté des habits techniques, des bâtons, une montre. J'ai même ouvert un compte Garmin pour partager mes «activités». J'ai moi aussi couru avec un dossard sur le ventre, en file indienne sur des kilomètres de sentiers. Je me suis retrouvé serré sur la ligne de départ, à taper des mains au rythme imposé par l'ambianceur. De nouveau, j'ai fait comme tout le monde. Et ça me dérange.

Je pourrais, direz-vous, courir sans dossard ni chronomètr­e. C'est ce que je fais avec deux de mes amis. Mais eux et moi, on doit quand même se mettre quelques courses par an à l'agenda. S'entraîner pour un jour J, c'est un moyen de se motiver tout au long de l'année.

En fait, footeux que nous sommes restés, on a besoin d'un match le week-end pour venir à l'entraîneme­nt.

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