LES JOLIS MONDES DU FESTI
La biennale de photographie démarre ce samedi à Vevey. Parmi les 61 projets exposés, l’univers étrange et onirique de Coco Fronsac
Son nom, déjà, sonne comme un programme à tiroirs. Il y a ce Coco, évoquant la mode ou l’exotisme, ce Fronsac, appelant à la fronde et à l’aventure. Coco Fronsac, artiste parisienne, construit depuis trois décennies une oeuvre protéiforme et multicouche. La série Chimères et Merveilles est présentée dans le cadre du festival Images, à Vevey, aux côtés d’une soixantaine de projets.
D’abord, il y a les photographies. De vieux tirages en noir et blanc, généralement petit format, que la dame chine sur les marchés. On y voit des portraits de famille, des poses de premiers communiants ou de jeunes mariés immortalisées en studio. Puis il y a ce que Coco Fronsac décide d’ajouter. Un masque du sud de l’Alaska ou du golfe de Papouasie, un clin d’oeil à Max Ernst, quelques insectes et végétaux. Cela donne des images étranges et fantasmagoriques, tour à tour drôles ou oniriques.
CABINET DE CURIOSITÉS
«Ce sont des photographies au départ assez banales, comme on en a tous vu chez nos grands-parents. J’aime l’idée de leur donner une nouvelle vie. Je les choisis parce qu’une posture ou un accessoire suggèrent tout un champ de possibilités, ou simplement parce que j’éprouve une sorte de coup de foudre comme quand on choisit un gâteau à la pâtisserie, souligne l’artiste. Puis je les retravaille de manière assez instinctive, à l’acide, à la gouache ou avec des collages, en puisant dans mes collections. Je fabrique ainsi mon propre univers.» Les collections de Coco Fronsac sont multiples: champignons d’arbre, statuettes de colons africains, trésors des cabinets de curiosités, art primitif, livres de toutes sortes… Photographies, évidemment, glanées depuis toujours.
Les masques, qui la passionnent, sont les ingrédients de base de la série des Chimères. Les amérindiens ont sa préférence, «plus colorés et délirants que les africains», estime-t-elle.
INFLUENCE SURRÉALISTE
Chaque pièce est répertoriée pour rejoindre le recueil qui servira à ornementer les vieux tirages, sans respect des échelles. Coco Fronsac n’invente rien, sinon un nouveau monde. «J’ai commencé par la peinture, le dessin et la lithographie. Il est difficile de démarrer avec un papier blanc. La photographie est une base ouvrant mille perspectives, s’enthousiasme la quinquagénaire. Je suis d’ailleurs persuadée que si vous donniez la même image à dix artistes, ils en feraient dix oeuvres totalement différentes.»
L’héritière revendiquée des mouvements dada et surréaliste travaille sur de multiples séries en parallèle. Il y a les «dormeurs», collection de personnages aux yeux clos par une couche de peinture, les bébés «nés sous X», dont la maman fière comme un paon a été recouverte de noir, les premiers communiants aux robes crayonnées de petits démons… «J’aime détourner le sens d’une photographie, ajouter de l’humour, retwister l’histoire», s’amuse Coco Fronsac. Certains, dès lors, y voient presque une oeuvre sacrilège. «J’achète ces images dans les brocantes et les vide-greniers. Il m’est arrivé de trouver des vies entières dans les poubelles. Ces photographies, plus personne n’en veut. Moi, je leur donne une autre vie, merveilleuse qui plus est!» défend l’artiste. Ces aïeuls réinventés sont à découvrir dans les vitrines de l’ancienne ferronnerie, à Vevey. Quelques-uns, grandeur nature, croiseront les passants place Scanavin.
«Coco Fronsac: Chimères et Merveilles», du 8 au 30 septembre place Scanavin, dans le cadre du festival Images, à Vevey, en coproduction avec Atelier 20.